Siritz.com : Vous êtes l’exemple d’un exploitant indépendant important. Quelles sont les caractéristiques de votre multiplexe Métropolis ?
François Thirriot : Il a 10 écrans pour 2 000 fauteuils et réalise entre 400 000 et 430 000 entrées par an depuis son ouverture. On est sur une zone de 50 000 habitants. Et c’est une multiplexe de centre ville.
Siritz.com : C’est la tendance des nouveaux multiplexes depuis quelques années d’être de proximité et pas dans des centres commerciaux, hors des villes comme au départ.
FT : On voulait dynamiser le centre ville et pas l’abandonner pour l’affaiblir. On a eu la chance d’être accompagné par la ville. C’était une friche industrielle constituée de petits artisans qui ont été achetés les uns après les autres par la ville. Elle avait donc un foncier de 10 000 m2 sur lequel on s’est implanté en 2003. On a racheté le foncier et on est ainsi entièrement propriétaire du multiplexe.
Siritz.com : Donc, quand les salles ont fermé le 16 mars, vous n’aviez pas de loyer à payer.
FT : Mais il nous restait la fin des remboursements de l’emprunt réalisé pour effectuer cet investissement de 6,3 millions €. Il nous reste encore à rembourser 70 000 € par trimestre. Donc on était dans une situation qui n’était pas trop inconfortable.
Siritz.com : Et le personnel était en chômage partiel. Mais est-ce qu’il n’y avait pas d’autres frais ?
FT : On a maintenu pendant la fermeture une équipe réduite chargée de l’entretien, deux personnes qui venaient une fois par semaine pour mettre en route les machines et les éteindre. On en a profité pour faire du rangement. J’en faisais partie. Parce qu’on avait besoin de s’occuper. Mais c’était assez traumatisant d’entrer dans un cinéma qui accueille en moyenne 1 200 personnes par jour et qui était désert et silencieux.
Siritz.com : Il faut dire que les deux premiers mois de l’année, avant la fermeture des salles, la fréquentation avait été très mauvaise. Quasiment -30%.
FT : Effectivement. L’année dernière avait été une année record, du fait de l’offre de films. Quand j’ai vu ce qui était annoncé pour 2020 je savais que ce sera une mauvaise année. Et, à partir parti d’avril il faisait beau tous les jours. Même s’il n’y avait pas eu le Coronavirus on aurait été à – 30%. On serait descendu à moins de 200 millions de spectateurs sur l’année. Ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps.
La FNCF a fait un travail remarquable
Siritz.com : J’imagine que pendant cette fermeture vous communiquiez avec vos collègues du Syndicat français. Or, un certain nombre d’entre eux sont propriétaires de fonds de commerce ou gérants, donc ont un loyer à payer.
FT : On a effectivement beaucoup échangé, fait pas mal de visio-conférences. J’ai remonté toutes les difficultés et inquiétudes au bureau de la Fédération Nationale des Cinémas Français dont je fais partie. En fait, cette période de trois mois était stable au niveau des dépenses puisqu’il ne se passait rien. Mais ce qui nous inquiétait c’était la reprise. Or la profession s’est bien organisée. La FNCF a fait un travail remarquable à tous les niveaux pour essayer de nous accompagner. D’abord en préparant un guide sanitaire qui soit accepté et qui démontre aujourd’hui qu’il nous permet de rester ouvert. Puis par lors de la réouverture, par une campagne d’affichage à l’extérieur, qui a été formidablement accompagnée par les affichistes. Et par un film publicitaire qui a été fait en un temps record et qui a été diffusé sur les chaînes tv. Et cela est dû à un travail remarquable des permanents de la FNCF, du bureau et des présidents de syndicats.
Siritz.com : Oui, c’est à souligner quand on voit les problèmes d’autres professions comme les restaurants ou les salles de sport. Vous avez tout prévu et cela a fonctionné dès le début.
FT : Plus tout le travail nécessaire pour présenter un plan de relance au CNC, au ministère de la Culture et au Gouvernement. La FNCF a été l’un des fédérations les plus efficaces pour obtenir un soutien des pouvoirs publics qu’elle jugeait absolument nécessaire. Les résultats ont été rendus publics par la ministre au Congrès de Deauville. Cela a été pris comme exemple par la CICAE qui représente tous les exploitants européens.
Siritz.com : Donc les salles ont rouvert le 22 juin. Mais elles ont tout de suite eu à faire face à un problème majeur, c’est celui de l’approvisionnement en films américains. Comme la plupart des salles sont fermées aux Etats-Unis et que les majors font des sorties mondiales, pour éviter le piratage, il n’y a pas eu, sauf une exception, de sorties de blockbusters. Or, les films américains représentent en moyenne 55/60 % des entrées françaises et, beaucoup plus l’été, qui est la grande saison pour les sorties de films américains. Quelle a été chez vous la fréquentation comparée à une période normale ?
FT : L’été le cinéma américain peut représenter 70 à 80% des entrées. Les deux premières semaines, à Charleville, on était à 10% ou 15% des années précédentes. La troisième on est monté à 26% pour redescendre. C’est lié à l’offre de films, mais aussi à la météo. Il a fait presque tout le temps très beau, de juin à septembre. Puis on est monté doucement. A la dernière semaine d’août, avec la sortie de Tenet et une météo favorable, on était à presque 60%. Mais, ne l’oublions pas, avec un nombre de séances réduites.
Siritz.com :En outre il n’y avait pas la continuation d’autres blockbusters sortis en juillet et août.
On perd de l’argent toutes les semaines
FT : Et c’est toujours difficile de comparer. C’est la semaine de l’opération Cinécool. C’est une opération où les salles du Grand Est font un tarif unique à 4,5 €. Et on pense que cela a boosté la fréquentation. Mais un jour Olivier Snanoudj m’avait dit que pour bien marcher un film américain avait besoin d’un grand film français en face, ce qui n’était pas le cas. Et, sur la semaine du 9 au 15 septembre la fréquentation était à 24 % de l’an dernier, puis à 36%. Et la semaine dernière à 24%. En fait c’est très insuffisant. On perd de l’argent toutes les semaines.
Siritz.com : Pourquoi rester ouvert si vous perdez de l’argent toutes les semaines. Une grande partie des salles britanniques et américaines préfèrent fermer.
FT : Ce que l’on veut c’est rester ouvert. Et on a une différence avec beaucoup de pays c’est qu’on a une production nationale importante, diversifiée et capable de faire des entrées. « Les Tuches n°4 » qui va arriver est capable de faire venir du monde. Si on regarde les films qui vont sortir prochainement il n’y en a pas mal d’intéressants mais quand on regarde les distributeurs il n’y a pas d’américains. Aujourd’hui on essaye de tenir avec ça. Tenir est bien le terme.
Siritz.com : Et il faut que vous soyez ouverts pour soutenir les distributeurs et les producteurs français qui sont, par ailleurs, un atout pour les salles françaises. Est-ce que les chiffres du syndicat français sont à l’image de vos salles ?
FT : Il y a des disparités importantes. Les gros établissements de la périphérie parisienne sont encore plus touchés. Les salles art & essai s’en sortiraient un peu mieux.
Siritz.com : C’est ce que confirme une étude Comscore que nous avons publiée. C’est d’ailleurs normal parce qu’elles programment moins de blockbusters américains, voire aucun.
FT : Et elles ont un public régulier, fidèle à une salle et à sa programmation. Ce sont des gens qui « vont au cinéma », qui participent volontiers à des avant-premières avec le réalisateur. Nous, à Charleville, ceux qu’on ne voit plus ce sont les 15/30 ans. On craignait de perdre les seniors, qui auraient peur d’aller au cinéma. Or ils sont là. En revanche, les jeunes n’ont pas les films américains et français qu’ils ont l’habitude d’aller voir. Je m’attendais en juin, comme beaucoup de mes collègues, à être très ingénieux sur la programmation de juillet et août. J’ai donc repris des films des vieux catalogues, encouragé par les distributeurs, comme Warner. Mais on fait ça pendant un mois, pas quatre.
Siritz.com : Néanmoins, en général, les films français marchent comme ils auraient dû marcher hors crise sanitaire. Par exemple « Tout simplement noir », « Antoinette dans les Cévennes » ou « Les Apparences » réalisent de très bons scores.
FT : Ils font même parfois mieux. Certains distributeurs ont eu raison de sortir leur film à ce moment. Les plans de sortie étaient plus élargis. Certains établissements ont même fait de la multidiffusion pour compenser le nombre de séances réduit et le manque de films. Mais au niveau des salles la fréquentation était plus répartie.
Siritz.com : La ministre de la culture Roselyne Bachelot, et le président du CNC, Dominique Boutonnat, sont venus au Congrès de la FNCF. La profession s’attendait à un ensemble de mesures évoquées par le Premier ministre. Mais j’ai eu l’impression que les exploitants étaient impressionnés par l’ampleur réelle des mesures, leur caractère concret, leur simplicité et leur rapidité probable de mise en œuvre.
FT : Les exploitants ont en effet été très contents de constater que les discussions qui avaient été engagés avec les pouvoirs publics avaient abouti à ce que la ministre a annoncé. C’est vrai que, dans les circonstances actuelles, on avait un peu peur, parce qu’on n’est pas les seuls à souffrir. C’est dur partout. Heureusement que ces fonds vont permettre aux salles de cinéma à tenir un peu.
https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Un-plan-de-relance-et-de-modernisation-inedit-pour-le-cinema-et-l-audiovisuel
Siritz.com : Effectivement. C’est une aide jusqu’à la fin de l’année. Mais on ne peut raisonnablement espéré que la crise sanitaire aura disparu le 1er janvier. Elle ne commencera à cesser que lorsqu’il y aura un vaccin qui marche et qui est disponible partout. Qu’est-ce qui va se passer jusque là ? Et l’Etat n’a pas dit ce qu’il fera après le 1erjanvier.
Rien ne se déroule comme prévu
FT : Et en plus, depuis la réouverture des salles, on a une succession d’événements qui fait que rien ne se déroule comme on aurait voulu que ça se déroule. Les sorties de grands films sont retardées les uns après les autres. On va pouvoir tenir jusqu’à la fin de l’année, grâce au plan de soutien. Mais c’est la suite qui m’inquiète. Faudra-t-il un nouveau plan de relance ? suivi d’un plan de maintien? suivi d’un plan de sauvegarde, voir de sauvetage ? De toute façon on est très dépendant du cinéma américain.
Siritz.com : Et les américains tiennent à des sorties mondiales pour éviter le piratage. Or, une grande partie de leurs salles, donc de leur principal marché, restent fermées.
FT : Le marché américain c’est avant tout 4 villes, à commencer par New-York.
Siritz.com : Où la situation empire à nouveau. Donc, à l’heure actuelle, j’imagine qu’il n’y a pas de discussion de la FNCF avec les pouvoirs publics sur un soutien à partir de 1er janvier.
FT : Pas encore. Il y a des discussions en interne. Nous réfléchissons à l’après. Mais il faut permettre au CNC de distribuer les fonds qui nous ont été dévolus. Ce qui ne va pas être simple. Puis, dès la mi-octobre on commencera à discuter de la suite.
Siritz.com : Durant cette période les banques vous ont bien soutenus ?
FT : Oui, en ce qui concerne les reports d’échéances sur 6 mois, voire un an. Mais report n’est pas annulation des intérêts complémentaires. Elles ne veulent pas faire plus. Et ça reste des banques.
Siritz.com : Elles ne peuvent combler le trou de l’économie française. Mais revenons à la situation du cinéma. Ce qui est frappant c’est que les français n’ont pas eu peur d’aller au cinéma. Quand l’offre était là, ils y ont été. Sil les jeunes y ont moins été c’est qu’il n’y avait pas les blockbusters américains. Donc, les français estiment que le cinéma est indispensable à leur vie sociale. C’est au moins une constatation qui peut rendre optimiste.
TF : Dès qu’il y a le film et la météo qui convient le public est là. Cela confirme que le cinéma c’est le loisir le plus accessible et le moins cher. Cela amène à un message d’optimisme. La question est de savoir combien de temps et comment on va continuer à continuer sans films américains.
LA REMUNERATION DE NICOLAS MAURY
CinéscoopPour la réalisation de « Garçon Chiffon »
Le long métrage de fiction « Garçon chiffon » qui sort cette semaine est réalisé par Nicolas Maury dont c’est le premier film, mais qui est connu comme comédien. Il en est aussi le principal interprète aux côtés de Nathalie Baye. Il avait réalisé un moyen métrage « Virginie ou la capitale » en 2010. Il est à l’heure actuelle un des interprètes de la série à succès « Dix pour cent » diffusée sur France 2
https://fr.wikipedia.org/wiki/Garçon_chiffon
Il est produit par CG Cinéma (Charles Gillibert) qui a mis son salaire de producteur et ses frais généraux en participation et investi du numéraire. Il est distribué par Les films du Losange, qui a donné un minimum garanti de 125 000 € pour les médias salles et vidéo et un autre de 90 000 € pour la vente internationale.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas_Maury
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Son budget est de 1,15 millions €. Pour la préparation, 25 jours de tournage et la post-production la rémunération du réalisateur est de 27 000 € réparti à part égal entre à valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. C’est un peu plus du quart de la rémunération médiane des réalisateurs de films français sortis depuis le début de l’année. https://siritz.com/financine/le-barometre-des-realisateurs-fin-octobre/
Le scénario est coécrit par Nicolas Maury, Sophie Fillières et Maudi Ameline pour une rémunération de 32 500 €.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
LE BAROMETRE DES REALISATEURS FIN OCTOBRE
FinanCinéLa rémunération des réalisateurs des films français sortis depuis le début de l’année
Jusqu’ici Siritz.com publiait chaque mois le baromètre de la rémunération des réalisateurs des films français sortis depuis le début de l’année. Mais ce baromètre mélange films de fiction, dessins animés et documentaires qui correspondent à des métiers différents et pour lesquels les rémunérations sont différentes. Nous allons continuer à publier ce baromètre. Mais nous en présenteront aussi un qui ne comprend que les films de fiction. Et nous fournirons des informations sur la rémunération des réalisateurs de dessins animés et de documentaire.
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Si on prend en compte la rémunération des réalisateurs de tous les films français sortis jusqu’à fin octobre, comparée à celle des 2 baromètres précédents, les modifications sont peu importantes. La plus élevée reste celle de Omar Sy, à 1,4 millions €. La rémunération moyenne a légèrement augmenté et la rémunération médiane a légèrement diminué.
Si on ne prend en compte que la rémunération des réalisateurs de films de fiction, on voit que la rémunération moyenne est plus élevée que celle concernant les réalisateurs de tous les films : 182 000 € contre 172 000 €. De même que la rémunération médiane. En octobre, la rémunération la plus élevée est celle de Nicolas Vannier pour « Poly », qui est de 400 000 €. https://siritz.com/cinescoop/la-remuneration-de-nicolas-vanier/
Depuis le début de l’année le réalisateur de film d’animation le mieux rémunéré a été Joann Sfar qui a adapté ses bandes dessinées « Petit vampire ». Elle est de 200 000€. https://siritz.com/cinescoop/la-remuneration-de-joann-sfar/
Elle est légèrement supérieure à celle de Rémi Chayé pour « Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary », qui est de 180 000 €. https://www.cinefinances.info/film/2248
En ce qui concerne le documentaire, la rémunération de loin la plus élevée est celle Thomas Piketty et Thomas Pemberton, pour l’adaptation au cinéma du best seller mondial de Thomas Piketty, « Le capitalisme au XXIième siècle ». Elle est de 126 000 €. https://siritz.com/financine/34-millions-e-pour-la-version-cinema-du-thomas-piketty/
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
LA REMUNERATION DE CLAUS DREXEL
CinéscoopPour la réalisation de « Sous les étoiles de Paris »
« Sous les étoiles de Paris » est une comédie dramatique qui sort cette semaine.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sous_les_étoiles_de_Paris
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Le film a un budget de 2,7 millions €. C’est une coproduction France (80%) et Belgique (20%). Ses producteurs délégués français sont Meneki Films (Didar Domehri) et Arches Films (Etienne Comar). Son producteur belge est Gapbusters (Jean-Yves Roubin). La distribution en salle en France est assuré par Diaphana qui a accordé un minimum garanti de 200 000 € et pris également le mandat vidéo pour un autre minimum garanti.
Il a été réalisé par Claus Drexel dont c’est le 3eme film.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Claus_Drexel
Pour la préparation, 37 jours de tournage et la post-production, sa rémunération de réalisateur est de 60 000 €, répartis à part égale entre à-valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. Il a coécrit le scénario avec Olivier Brunhes pour une rémunération partagée de 53 500 €.
C’est beaucoup moins que la rémunération médiane des réalisateurs de films français sortis depuis le début de l’année. https://siritz.com/financine/le-barometre-de-la-remuneration-des-realisateurs/
Son précédent film était un documentaire « América », sorti en 2018. Pour la préparation, 27 jours de tournage dans l’Arizona et la post-production sa rémunération était de 19 000 €, dont 5000 € d’à-valoir sur droits d’auteur et 14 000 € de salaire de technicien. Le film, distribué également par Diaphana avait réalisé 40 000 entrées.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
L’HEURE DE LA COVID ET DE L’IPHONE
ÉditorialLuc Béraud pointe deux nouvelles voies pour la création
La Covid offre un thème nouveau dont vont s’emparer les auteurs de films et de sėries. Le Festival « Ciné des villes, Ciné des champs », qui vient d’avoir lieu à Bourganeuf, au cœur de la Creuse, vient d’en fournir un exemple.https://www.francebleu.fr/infos/culture-loisirs/rentre-en-resistance-les-creusois-au-rendez-vous-a-cine-des-villes-cine-des-champs-a-bourganeuf-1603578874
Tout est parti de la Cinémathèque française qui, au dėbut du confinement, a lancé un astucieux appel d’offre aux auteurs français pour réaliser des courts métrages sur ce thème. Ces œuvres se trouvent sur le site de la Cinémathèque. Et le Festival a diffusé celui de Luc Béraud, « Enfermer dehors ».
Le réalisateur, y raconte, avec humour, le confinement qu’il a vécu seul dans sa maison dans la Creuse. En outre, il a tourné ce film avec son seul iPhone. Et, sur le grand écran du cinéma Claude Miller, on aurait cru qu’il avait été tourné avec une caméra de long métrage. C’est dire que ce court métrage ouvre d’un coup deux nouvelles voies au 7ème art.
Cette œuvre a été suivie de la projection d’un deuxième court métrage où le réalisateur révèle les secrets de son tournage. Là encore, avec humour, il se voit obliger d’admettre qu’un plan panoramique est dû ã la transgression de son principe de réalisation solitaire. Il n’a, en effet, pu le réaliser que grâce à l’intervention de son voisin. Mais, s’il avait pu prėparer son tournage, il aurait très bien pu incorporer au sommet du trépied un appareil réalisant mécaniquement ce panoramique.
C’est dire que le budget de certaines productions va pouvoir être écrasé. La Nouvelle vague qui a bouleversé la création mondiale n’a-t-elle pas été rendue possible par l’apparition des pellicules ultrasensibles ? Certes, pour l’instant aucun long métrage ni aucune série ne se passe pendant un confinement ou un couvre feu dûs à une pandémie. Mais nul doute qu’ils sont en train d’être écrits et permettront de renouveler tous les genres de la création cinématographique et audiovisuelle, notamment le comique de l’absurde et le suspense.
LA RÉMUNERATION DE RUBEN ALVES
CinéscoopLe réalisateur et scénariste de « Miss »
Warner, le distributeur de« Miss », a avancé d’une semaine sa sortie en salle pour la situer dès le début des vacances de la Tousaint. C’est une comédie réalisée par le franco-portugais Ruben Alves. C’est son deuxième long métrage en tant que réalisateur. Il a déjà réalisé de nombreux épisodes de séries et joué dans plusieurs films.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ruben_Alves
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Le film est produit par Chapka Films (Laetitia Galizine) et Zazi Films (Evelyne Beauvisage) pour 96% et la société belge Belga Films, pour 4%. Warner France pour tous les mandats de distribution sur la France a accordé un minimum garanti de 1,4 millions €.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Miss_(film
« La cage dorée », le premier film du réalisateur, sorti en 2013 et déjà une comédie, avait attiré 1,233 millions de spectateurs.
Sur « Miss », pour la préparation, 35 jours de tournage et la post-production, la rémunération de Ruben Alves a été de 125 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteurs et salaire de technicien. C’est légèrement moins que la rémunération moyenne des réalisateurs de films français depuis le début de l’année.https://siritz.com/financine/le-barometre-de-la-remuneration-des-realisateurs/
Par ailleurs, le scénario a été écrit par Elodie Namer avec lui. Aucune rémunération du scénario n’apparaît dans le budget, mais 285 000 € sont inscrits à la ligne Sujet.
Rappelons que le budget de la bande musicale du film est dans la Top 5 des musiques des films français sortis depuis le début de l’année.https://siritz.com/financine/miss-dans-le-top-5-des-musiques/
« La cage dorée », déjà produit par Zazi Films, avec Pathé comme coproducteur et distributeur, avait un budget de 7 millions €. Pour la préparation, 35 jours de tournage et la post-production, Ruben Alves avait reçu une rémunération de 102 500 €, dont 42 500 € en à valoir sur droits d’auteur et 60 000 € de salaire de technicien. Mais, les principaux comédiens étaient rémunérés en tant que dialoguistes pour une somme total de 40 000 € inscrits dans la ligne Sujet du budget de 74 000€.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
LA REMUNERATION DE NICOLAS VANIER
CinéscoopLe réalisateur de « Poly »
« Poly », qui sort cette semaine, est le second film que réalise Nicolas Vanier d’après l’œuvre de Cécile Aubry.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Poly_(film)
Le premier était le premier de la série des 3 « Belle et Sébastien ». Il avait réalisé plus de 3 millions d’entrées. Il est produit par Bonne Pioche (Yves Darondeau et Emmanuel Priou). C’est le 9ème long métrage de fiction du réalisateur qui a, par ailleurs, réalisé plusieurs documentaires à succès.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas_Vanier
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Le budget du film est de 11 millions €. Il est distribué par SND qui, pour tous les mandats a donné à minimum garanti de 2 millions €.Pour la préparation, 43 jours de tournage et la post-production Nicolas Vanier a reçu une rémunération de 400 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. C’est sensiblement plus que le double de la rémunération moyenne des réalisateurs français des films sortis depuis le début de l’année. https://siritz.com/financine/le-barometre-de-la-remuneration-des-realisateurs/
Il a par ailleurs co-écrit l’adaptation en scénario avec Jérôme Tonnerre et Maxime Giffard et ils se sont partagés 547 000 € inscrits à la ligne Sujet.
L’achat des droits du livre est revenu à 328 000 €.
Le précédent film de Nicolas Vanier était « Donne-moi des ailes », sorti en 2019. Il était produit par Radar Films (Clément Miserez) qui avait déjà produit « Belle et Sébastien » et il était distribué par SND. Pour la préparation, 33 jours de tournage et la post-production sa rémunération était de 320 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. Il avait co-écrit le scénario avec deux autres scénaristes et ils s’étaient partagés les 547 000 € inscrits à la ligne sujet.
Le film avait réalisé 1,437 millions d’entrées.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
LA REMUNERATION DE JOANN SFAR
CinéscoopLe réalisateur de « Petit vampire »
Le dessin animé « Petit vampire » est une adaptation des célèbres bandes dessinées de Joann Sfar. C’est d’ailleurs lui qui l’a réalisé.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Joann_Sfar
https://fr.wikipedia.org/wiki/Petit_Vampire_(film)
Il en est aussi le producteur délégué français à travers sa société Auchenille production, qu’il partage avec Antoine Delesvaux et Clément Oubrerie. C’est son 4ème long métrage en tant que réalisateur.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Petit_Vampire_(film)
A noter que la Belgique est coproducteur à 15% avec comme producteur Panache Production (André Logie).
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Le budget du film est 8 millions €. Il est distribué sur la France par StudioCanal qui a donné 800 000 € de minimum garanti pour les salles et 400 000 pour la vidéo.Pour la préparation, 52 semaine de tournage et la post-production la rémunération de Joann Sfar est de 200 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteur et salaire technicien. C’est sensiblement plus que la rémunération moyenne des réalisateurs des films français sortis depuis le début de l’année. https://siritz.com/financine/le-barometre-de-la-remuneration-des-realisateurs/ Les droits d’adaptation de la bande dessinée ont été de 380 000 €.
Le précédent film réalisé par Joann Sfar était « La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil », sorti en 2014 d’après le roman à succès de Sebastien Japrisot. Son budget était de 7,4 millions €. Il y avait déjà eu un film américain tiré de ce roman et réalisé par Anatole Litvak. Il était sorti en 1970.
Pour la réalisation de ce remake, la rémunération de Joann Sfar avait été de 148 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. Les droits d’adaptation du livre avaient été achetés 95 000 €. Joann Sfar avait co-écrit le scénario avec Guy Marchand, interprète du film, et Patrick Godeau, le producteur, et ils s’étaient partagés 359 000 €. Le film n’avait rassemblé que 87 000 entrées.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
LA REMUNERATION D’ALBERT DUPONTEL
CinéscoopPour « Adieu les cons »
Malgré la disparition de la séance du soir dans 12 zones rouges, Gaumont, comme tous les distributeurs, a maintenu la sortie cette semaine de « Adieu les cons » (voir Editorial https://siritz.com/editorial/ultime-proposition-du-cinema/)
C’est le 7ème long métrage réalisé par Albert Dupontel et dont il a écrit le scénario. Il est également l’un des principaux interprètes du film. Il faut dire qu’il mène depuis longtemps une carrière de comédien de cinéma et de théâtre.
Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.
Le producteur délégué du film est Manchester Films (Catherine Bozorgan) associé à Gaumont qui en est aussi le distributeur. Son budget est de 10,3 millions €.Pour la préparation, 39 jours de tournage et la post-production, Albert Dupontel a reçu une rémunération de 300 000 €, répartie à part égale entre à valoir sur droits d’auteurs et salaire de technicien. C’est presque le double de la rémunération des réalisateurs de films français sortis depuis le début de l’année. https://siritz.com/financine/le-barometre-de-la-remuneration-des-realisateurs/
Le scénario a été coécrit avec Xavier Némo qui a reçu un à valoir de 26 000 €. Albert Dupontel a, en outre, reçu une rémunération de 350 000 € inscrite à la ligne Sujet du budget.
Son précédent film, dont il était scénariste, réalisateur et interprète principal, était « Au revoir là-haut », également produit par Manchester films avec Gaumont et distribué par Gaumont. C’était une film d’époque dont le budget était de 20 millions € et il était sorti en salles en 2017.
Il était tiré du best-seller et Goncourt de Frédéric Lemaitre. Les droits avaient été achetés 300 000 €.
Pour la préparation, 58 jours de tournage et la post-production Albert Dupontel avait reçu une rémunération de 400 000 €. Pierre Lemaitre et Albert Dupontel s’étaient en outre partagés 550 000 € pour l’adaptation et les dialogues. Le film avait atteint 2,115 millions d’entrées.
*www.Cinefinances.info est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
ULTIME PROPOSITION DU CINEMA
ÉditorialPour éviter qu’il soit victime de l’effet domino
Le couvre-feu à 21 h est évidemment une catastrophe pour le cinéma. Comme pour beaucoup de professions comme le théâtre ou certains restaurants. La séance de 20 h représente en effet, en moyenne, 40% des entrées des films. Pour certains c’est même plutôt 50%. Et lez zones rouges concernées représentent environ un tiers des entrées. Mais, là encore, pour certains films c’est jusqu’à 50%. Ce qui représente donc une perte moyenne de 12% des entrées potentielles et 25% pour certains films.
C’est pourquoi un distributeur comme ARP qui sortait ce mercredi « Pronuptia », le film du grand réalisateur Coréen Yeon Sang-Ho, a annoncé vendredi qu’il suspendait la sortie de ce film. Et ce, bien que la promotion ait été engagée et que de nombreux exploitants avaient déjà organisé des avant-premières.
Et, comme débutent les vacances de la Toussaint, d’autres films importants sont programmés pour ce mercredi et ont lancé leur promotion. C’est le cas d’ « Adieu les cons », de et avec Albert Dupontel, produit et distribué par Gaumont. C’est un film dont le budget dépasse les 10 millions €. En revanche r « Petit Vampyr », un dessin animé de Joann Sfar, distribué par Studio Canal et « Poly », réalisé par Nicolas Vannier et distribué par SND, s‘adressant à un public familial et d’enfants sont sans doute moins touchés par la suppression de la dernière séance. Et ils sont de toute façons destinés à sortir pendant les vacances scolaires.
Risque de report de la sortie des films après la Toussaint
Finalement ARP a décidé de maintenir la sortie de son film pour ne pas sanctionner les exploitants qui ne sont pas dans les zones rouges et alors que les vacances de la Toussaint sont une période de haute fréquentation.Mais les distributeur des films qui doivent sortir d’ici la fin novembre, comme le très attendu « Aline », de et avec Valérie Lemercier, distribué par Gaumont, ont tout intérêt à retarder leur sortie au-delà de la fin du couvre feu. Or, sans les films américains qui représentent normalement entre 55 et 60% de la fréquentation, les salles perdent déjà de l’argent tous les jours. C’est ce rappelait dans le Carrefour de la semaine dernière, François Thirriot, le président du Syndicat français, le principal syndicat d’exploitants. https://siritz.com/le-carrefour/ultime-proposition-de-la-fncf/ Ce qui signifierait que les salles de cinéma, faut d’approvisionnement en nouveaux films importants seraient condamnées à fermer.
Maintenir la séance de 20 heures
La FNCF et toute la profession du cinéma ont proposé que les salles puissent maintenir leur séance de 20 h et que le ticket fasse fois pour les spectateurs de cette séance qui rentreraient chez eux. La ministre de la culture a soutenu cette mesure. Mais le Premier ministre l’a refusé, arguant que le couvre feu, pour être efficace, doit être simple et pas truffé d’exceptions. Il est en effet probable que si le cinéma obtenait le bénéfice de cette exception le gouvernement devrait répondre aux demandes d’une avalanche de professions qui auraient de bonnes raison de demander une exception de ce type. L’enjeu sanitaire est tel que cette position se comprend.
Compenser les entrées perdues
Pour éviter que les distributeurs reportent la sortie de leurs films et que les salles soient obligées de fermer, la FNCF et la profession ont proposé une autre solution à l’Etat. Il s’agirait de compenser financièrement le chiffre d’affaires que représente la dernière séance. Ainsi, l’année dernière, pendant ces 6 semaines, le cinéma a réalisé 30 millions d’entrées. Actuellement le cinéma, sans les films américains, réalise 40% des entrés de l’année dernière. Ce qui donnerait 12 millions d’entrées. Si, du fait du couvre-feu, les salles perdaient 40% de leurs entrées restantes , cela représenterait 4,8/5 millions d’entrées. Les zones rouges représentent en moyenne 40% de ces entrées, soit 2 millions d’entrées. Si les pouvoirs publics accordaient une compensation de 5 € par place, répartie à 50/50 entre salle et distributeur, sur ces entrées perdues, cela leur coûterait 10 millions €.
Cette somme s’ajouterait aux 50 millions € d’aide que Roselyne Bachelot a annoncé aux exploitants à la Congrès de Deauville.
https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Un-plan-de-relance-et-de-modernisation-inedit-pour-le-cinema-et-l-audiovisuel
Mais si l’ensemble des salles ferment dès la fin de vacances scolaires pour un mois, il faut déduire la TVA et la TSA que l’Etat perdrait sur quelques 7/8 millions d’entrées. Soit de l’ordre 3 ou 4 millions € . Plus le coût du chômage partiel de l’ensemble du personnel de toutes les salles de France.
Si les pouvoir publics refusent cette proposition il est à craindre que de nombreux exploitants et distributeurs ne survivent pas à cette nouvelle fermeture. Tandis que certains distributeurs de films très attendus risquent de céder à nouveau aux sirènes des plate-formes américaines. Et donc que la profession subisse un effet domino qui décime ses rangs.
FRANCOIS THIRRIOT SUR LA SITUATION DE L’EXPLOITATION
Le CarrefourSiritz.com : Vous êtes l’exemple d’un exploitant indépendant important. Quelles sont les caractéristiques de votre multiplexe Métropolis ?
François Thirriot : Il a 10 écrans pour 2 000 fauteuils et réalise entre 400 000 et 430 000 entrées par an depuis son ouverture. On est sur une zone de 50 000 habitants. Et c’est une multiplexe de centre ville.
Siritz.com : C’est la tendance des nouveaux multiplexes depuis quelques années d’être de proximité et pas dans des centres commerciaux, hors des villes comme au départ.
FT : On voulait dynamiser le centre ville et pas l’abandonner pour l’affaiblir. On a eu la chance d’être accompagné par la ville. C’était une friche industrielle constituée de petits artisans qui ont été achetés les uns après les autres par la ville. Elle avait donc un foncier de 10 000 m2 sur lequel on s’est implanté en 2003. On a racheté le foncier et on est ainsi entièrement propriétaire du multiplexe.
Siritz.com : Donc, quand les salles ont fermé le 16 mars, vous n’aviez pas de loyer à payer.
FT : Mais il nous restait la fin des remboursements de l’emprunt réalisé pour effectuer cet investissement de 6,3 millions €. Il nous reste encore à rembourser 70 000 € par trimestre. Donc on était dans une situation qui n’était pas trop inconfortable.
Siritz.com : Et le personnel était en chômage partiel. Mais est-ce qu’il n’y avait pas d’autres frais ?
FT : On a maintenu pendant la fermeture une équipe réduite chargée de l’entretien, deux personnes qui venaient une fois par semaine pour mettre en route les machines et les éteindre. On en a profité pour faire du rangement. J’en faisais partie. Parce qu’on avait besoin de s’occuper. Mais c’était assez traumatisant d’entrer dans un cinéma qui accueille en moyenne 1 200 personnes par jour et qui était désert et silencieux.
Siritz.com : Il faut dire que les deux premiers mois de l’année, avant la fermeture des salles, la fréquentation avait été très mauvaise. Quasiment -30%.
FT : Effectivement. L’année dernière avait été une année record, du fait de l’offre de films. Quand j’ai vu ce qui était annoncé pour 2020 je savais que ce sera une mauvaise année. Et, à partir parti d’avril il faisait beau tous les jours. Même s’il n’y avait pas eu le Coronavirus on aurait été à – 30%. On serait descendu à moins de 200 millions de spectateurs sur l’année. Ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps.
La FNCF a fait un travail remarquable
Siritz.com : J’imagine que pendant cette fermeture vous communiquiez avec vos collègues du Syndicat français. Or, un certain nombre d’entre eux sont propriétaires de fonds de commerce ou gérants, donc ont un loyer à payer.
FT : On a effectivement beaucoup échangé, fait pas mal de visio-conférences. J’ai remonté toutes les difficultés et inquiétudes au bureau de la Fédération Nationale des Cinémas Français dont je fais partie. En fait, cette période de trois mois était stable au niveau des dépenses puisqu’il ne se passait rien. Mais ce qui nous inquiétait c’était la reprise. Or la profession s’est bien organisée. La FNCF a fait un travail remarquable à tous les niveaux pour essayer de nous accompagner. D’abord en préparant un guide sanitaire qui soit accepté et qui démontre aujourd’hui qu’il nous permet de rester ouvert. Puis par lors de la réouverture, par une campagne d’affichage à l’extérieur, qui a été formidablement accompagnée par les affichistes. Et par un film publicitaire qui a été fait en un temps record et qui a été diffusé sur les chaînes tv. Et cela est dû à un travail remarquable des permanents de la FNCF, du bureau et des présidents de syndicats.
Siritz.com : Oui, c’est à souligner quand on voit les problèmes d’autres professions comme les restaurants ou les salles de sport. Vous avez tout prévu et cela a fonctionné dès le début.
FT : Plus tout le travail nécessaire pour présenter un plan de relance au CNC, au ministère de la Culture et au Gouvernement. La FNCF a été l’un des fédérations les plus efficaces pour obtenir un soutien des pouvoirs publics qu’elle jugeait absolument nécessaire. Les résultats ont été rendus publics par la ministre au Congrès de Deauville. Cela a été pris comme exemple par la CICAE qui représente tous les exploitants européens.
Siritz.com : Donc les salles ont rouvert le 22 juin. Mais elles ont tout de suite eu à faire face à un problème majeur, c’est celui de l’approvisionnement en films américains. Comme la plupart des salles sont fermées aux Etats-Unis et que les majors font des sorties mondiales, pour éviter le piratage, il n’y a pas eu, sauf une exception, de sorties de blockbusters. Or, les films américains représentent en moyenne 55/60 % des entrées françaises et, beaucoup plus l’été, qui est la grande saison pour les sorties de films américains. Quelle a été chez vous la fréquentation comparée à une période normale ?
FT : L’été le cinéma américain peut représenter 70 à 80% des entrées. Les deux premières semaines, à Charleville, on était à 10% ou 15% des années précédentes. La troisième on est monté à 26% pour redescendre. C’est lié à l’offre de films, mais aussi à la météo. Il a fait presque tout le temps très beau, de juin à septembre. Puis on est monté doucement. A la dernière semaine d’août, avec la sortie de Tenet et une météo favorable, on était à presque 60%. Mais, ne l’oublions pas, avec un nombre de séances réduites.
Siritz.com :En outre il n’y avait pas la continuation d’autres blockbusters sortis en juillet et août.
On perd de l’argent toutes les semaines
FT : Et c’est toujours difficile de comparer. C’est la semaine de l’opération Cinécool. C’est une opération où les salles du Grand Est font un tarif unique à 4,5 €. Et on pense que cela a boosté la fréquentation. Mais un jour Olivier Snanoudj m’avait dit que pour bien marcher un film américain avait besoin d’un grand film français en face, ce qui n’était pas le cas. Et, sur la semaine du 9 au 15 septembre la fréquentation était à 24 % de l’an dernier, puis à 36%. Et la semaine dernière à 24%. En fait c’est très insuffisant. On perd de l’argent toutes les semaines.
Siritz.com : Pourquoi rester ouvert si vous perdez de l’argent toutes les semaines. Une grande partie des salles britanniques et américaines préfèrent fermer.
FT : Ce que l’on veut c’est rester ouvert. Et on a une différence avec beaucoup de pays c’est qu’on a une production nationale importante, diversifiée et capable de faire des entrées. « Les Tuches n°4 » qui va arriver est capable de faire venir du monde. Si on regarde les films qui vont sortir prochainement il n’y en a pas mal d’intéressants mais quand on regarde les distributeurs il n’y a pas d’américains. Aujourd’hui on essaye de tenir avec ça. Tenir est bien le terme.
Siritz.com : Et il faut que vous soyez ouverts pour soutenir les distributeurs et les producteurs français qui sont, par ailleurs, un atout pour les salles françaises. Est-ce que les chiffres du syndicat français sont à l’image de vos salles ?
FT : Il y a des disparités importantes. Les gros établissements de la périphérie parisienne sont encore plus touchés. Les salles art & essai s’en sortiraient un peu mieux.
Siritz.com : C’est ce que confirme une étude Comscore que nous avons publiée. C’est d’ailleurs normal parce qu’elles programment moins de blockbusters américains, voire aucun.
FT : Et elles ont un public régulier, fidèle à une salle et à sa programmation. Ce sont des gens qui « vont au cinéma », qui participent volontiers à des avant-premières avec le réalisateur. Nous, à Charleville, ceux qu’on ne voit plus ce sont les 15/30 ans. On craignait de perdre les seniors, qui auraient peur d’aller au cinéma. Or ils sont là. En revanche, les jeunes n’ont pas les films américains et français qu’ils ont l’habitude d’aller voir. Je m’attendais en juin, comme beaucoup de mes collègues, à être très ingénieux sur la programmation de juillet et août. J’ai donc repris des films des vieux catalogues, encouragé par les distributeurs, comme Warner. Mais on fait ça pendant un mois, pas quatre.
Siritz.com : Néanmoins, en général, les films français marchent comme ils auraient dû marcher hors crise sanitaire. Par exemple « Tout simplement noir », « Antoinette dans les Cévennes » ou « Les Apparences » réalisent de très bons scores.
FT : Ils font même parfois mieux. Certains distributeurs ont eu raison de sortir leur film à ce moment. Les plans de sortie étaient plus élargis. Certains établissements ont même fait de la multidiffusion pour compenser le nombre de séances réduit et le manque de films. Mais au niveau des salles la fréquentation était plus répartie.
Siritz.com : La ministre de la culture Roselyne Bachelot, et le président du CNC, Dominique Boutonnat, sont venus au Congrès de la FNCF. La profession s’attendait à un ensemble de mesures évoquées par le Premier ministre. Mais j’ai eu l’impression que les exploitants étaient impressionnés par l’ampleur réelle des mesures, leur caractère concret, leur simplicité et leur rapidité probable de mise en œuvre.
FT : Les exploitants ont en effet été très contents de constater que les discussions qui avaient été engagés avec les pouvoirs publics avaient abouti à ce que la ministre a annoncé. C’est vrai que, dans les circonstances actuelles, on avait un peu peur, parce qu’on n’est pas les seuls à souffrir. C’est dur partout. Heureusement que ces fonds vont permettre aux salles de cinéma à tenir un peu.
https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Un-plan-de-relance-et-de-modernisation-inedit-pour-le-cinema-et-l-audiovisuel
Siritz.com : Effectivement. C’est une aide jusqu’à la fin de l’année. Mais on ne peut raisonnablement espéré que la crise sanitaire aura disparu le 1er janvier. Elle ne commencera à cesser que lorsqu’il y aura un vaccin qui marche et qui est disponible partout. Qu’est-ce qui va se passer jusque là ? Et l’Etat n’a pas dit ce qu’il fera après le 1erjanvier.
Rien ne se déroule comme prévu
FT : Et en plus, depuis la réouverture des salles, on a une succession d’événements qui fait que rien ne se déroule comme on aurait voulu que ça se déroule. Les sorties de grands films sont retardées les uns après les autres. On va pouvoir tenir jusqu’à la fin de l’année, grâce au plan de soutien. Mais c’est la suite qui m’inquiète. Faudra-t-il un nouveau plan de relance ? suivi d’un plan de maintien? suivi d’un plan de sauvegarde, voir de sauvetage ? De toute façon on est très dépendant du cinéma américain.
Siritz.com : Et les américains tiennent à des sorties mondiales pour éviter le piratage. Or, une grande partie de leurs salles, donc de leur principal marché, restent fermées.
FT : Le marché américain c’est avant tout 4 villes, à commencer par New-York.
Siritz.com : Où la situation empire à nouveau. Donc, à l’heure actuelle, j’imagine qu’il n’y a pas de discussion de la FNCF avec les pouvoirs publics sur un soutien à partir de 1er janvier.
FT : Pas encore. Il y a des discussions en interne. Nous réfléchissons à l’après. Mais il faut permettre au CNC de distribuer les fonds qui nous ont été dévolus. Ce qui ne va pas être simple. Puis, dès la mi-octobre on commencera à discuter de la suite.
Siritz.com : Durant cette période les banques vous ont bien soutenus ?
FT : Oui, en ce qui concerne les reports d’échéances sur 6 mois, voire un an. Mais report n’est pas annulation des intérêts complémentaires. Elles ne veulent pas faire plus. Et ça reste des banques.
Siritz.com : Elles ne peuvent combler le trou de l’économie française. Mais revenons à la situation du cinéma. Ce qui est frappant c’est que les français n’ont pas eu peur d’aller au cinéma. Quand l’offre était là, ils y ont été. Sil les jeunes y ont moins été c’est qu’il n’y avait pas les blockbusters américains. Donc, les français estiment que le cinéma est indispensable à leur vie sociale. C’est au moins une constatation qui peut rendre optimiste.
TF : Dès qu’il y a le film et la météo qui convient le public est là. Cela confirme que le cinéma c’est le loisir le plus accessible et le moins cher. Cela amène à un message d’optimisme. La question est de savoir combien de temps et comment on va continuer à continuer sans films américains.