Canal+ a décidé unilatéralement de ne pas appliquer cette régle
Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal+, a annoncé que toutes les chaînes du groupe allaient diffuser leurs programmes en clair. Y compris les films de cinéma pour lesquels Canal+ bénéficie d’une chronologie de diffusion plus favorable que les chaînes en clair.
C’est ainsi que la semaine dernière Canal+ a diffusé en clair « Venise n’est pas en Italie » et « Trois jours et une vie » et que cette semaine elle va diffuser « Tanguy, le retour » (voir Cinescoop). Canal+ cinéma diffuse « Rebelles » lundi 23 et « Jusqu’ici tout va bien » mercredi 25. Le CSA a demandé au groupe Canal+ de revenir à une diffusion cryptée des films de cinéma au-delà du 31 mars.
Néanmoins nous avons voulu savoir, indépendamment de la réaction du CSA, quel était le droit en cas de non respect de la chronologie des médias par une chaîne cryptée. Nous avons demandé à maitre Gérald Bigle* (par ailleurs Sponsor de nos baromètres) de faire le point.
Siritz : Quelles sont les sanctions administratives en cas de non respect de la chronologie des médias
Gérald Bigle: En proposant l’accès à toutes leurs chaînes cinéma, séries, jeunesse et documentaires sur toutes les box des opérateurs télécoms pendant la période de confinement, Canal + remet en cause les délais prévus par la chronologie des médias.
Les sanctions
En cas de non respect de la chronologie des médias prévue aux articles L231-1 et suivants du Code du cinéma et des images animées, plusieurs sanctions existent. Les articles L421-1 et suivants du même code vise les sanctions administratives, notamment en cas de non respect des délais fixés (par la loi ou par accord professionnel).
Siritz : Quelles sanctions ?
Gérald Bigle : L’article 422-1 du Code du cinéma et des images animées prévoit un avertissement ; une réduction ou le remboursement des aides financières automatiques ou sélectives qui ont été attribuées ; une sanction pécuniaire.
Siritz : De combien s’élève cette sanction pécunière ?
Gérald Bigle : Il y a des plafonds. Ainsi, son montant ne peut exceder, lorsque la personne sanctionnée est une entreprise, 3% du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercices clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5% en cas de réitération dans un délai de cinq ans à compter de la date de notification de la première sanction.
En outre, il peut y avoir une exclusion du bénéfice de toute aide financière automatique ou sélective pour une durée ne pouvant excéder cinq ans. Il peut y avoir aussi une exclusion du calcul des sommes représentant les aides financières attribuées sous forme automatique mentionnées à l’article L. 311-1 pour une durée ne pouvant excéder cinq ans. Enfin, il peut y avoir une interdiction, pendant une durée ne pouvant excéder cinq ans, d’exercer des fonctions de direction dans une entreprise appartenant au secteur concerné.
Siritz : Il n’y a que des sanctions administratives ?
La concurrence déloyale
Gérald Bigle : Non. Les pratiques de Canal + pendant cette période exceptionnelle de confinement pourraient être aussi qualifiées de concurrence déloyale vis à vis d’autres
diffuseurs ayant acheté les droits en clair dans le respect des délais fixés par la chronologie des médias. Pour qualifier une concurrence déloyale, les trois conditions doivent être réunies : une faute, un préjudice, un lien de causalité.
Siritz: Quelles sont les sanctions pour concurrence déloyale ?
Gérald Bigle : Les sanctions sont de nature civile et peuvent être les suivantes : des dommages et intérêts, la cessation des agissement déloyaux, des mesures accessoires comme des mesures de publication.
Siritz : Mais le confinement ne peut-il justifier les mesures exceptionnelles prises par Canal+ ?
La force majeure
Gérald Bigle : La situation de confinement impose aux Français de devoir vivre chez eux, sans sorties possibles, ni cinéma. La télévision s’impose de fait comme une activité évidente dans ce contexte particulier. Mais s’agit-il d’un cas de force majeure au sens du Code civil, qui pourrait justifier les mesures exceptionnelles prises par Canal + ne respectant pas la chronologie des médias ?
Siritz : Comment caractériser un cas de force majeure ?
Gérald Bigle : Pour caractériser un cas de force majeure, l’événement doit être imprévisible, insurmontable et extérieur. Si ces critères sont remplis, la force majeure est exonératoire ou libératoire. Dans le contexte du droit du travail, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a d’ailleurs annoncé que « pour les entreprises, le coronavirus sera considéré comme un cas de force majeure ». Néanmoins, par le passé, les juges français ont ainsi refusé de qualifier de force majeure les épidémies de grippe H1N1 de 20092, du bacille de la peste3, du virus la dengue4 ou du virus du Chikungunya.
Siritz : Mais on voit mal en cas le confinement contraint Canal+ à offrir ses programmes de cinéma à tous les français.
*Maitre Gérald Bigle est spécialisé dans le droit du cinéma et de l’audiovisuel.
Le 23 mars 2020
Canal+ diffuse « Tanguy, le retour » en clair
CinéscoopAvec l’aval du CSA (Voir Editorial et Le Carrefour), la chaîne payante a diffusé, sans le crypter, le film d’Etienne Chatillez, sorti en salle le 10 avril 2019. Produit par NAC films pour 9,5 millions €, et distribué par SND, il avait réalisé plus d’un million d’entrées.
Canal + l’a pré-acheté 1,26 millions € et OCS 300 000 €. M6 l’a pré-acheté 2 millions € et coproduit pour 300 000 €. W9 l’a pré-acheté 300 000 €. M6 a donc apporté le double du financement de Canal+ mais ne pourra le diffuser qu’un an plus tard.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
30 mars 2020
Canal+ diffuse « Jusqu’ici tout va bien » en clair
CinéscoopLe film, interprété par Gille Lelouch et Malik Bentalla, a été réalisé par Mohamed Hamidi. Il est sorti le 27 février 2019 et a réalisé 575 000 entrées. Produit par Quad, son budget est de 8,43 millions €. Il a été distribué par TF1DA et Mars pour 1,4 millions € de minimum garanti, avec tous les mandats monde.
Canal+ l’a pré-acheté pour 1,36 millions €, Canal Afrique pour 3000 € et Multithématiques, y compris catch up, pour 278 000 €.
TF1 l’a coproduit pour 600 000 € et pré-acheté pour 1 million €. TMC l’a pré-acheté pour 200 000 €.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
30 mars 2019
« Yao » diffusé en clair par Canal+
CinéscoopCanal+ a diffusé en clair, la semaine dernière, « Yao », interprété par Omar Sy, réalisé par Philippe Godeau, et produit par la Pan-européenne (Philippe Godeau). Le film, qui était sorti en salle le 23 janvier 2019, distribué par Pathé, pour un minimum garanti de 2,5 millions €, a réalisé 427 000 entrées. Son budget est de 6,6 millions €.
Canal + l’a pré-acheté pour 1,57 millions €, Canal Afrique pour 3 000 € et Multithématiques (y compris catch up) pour 303 000 €. France 2 l’a coproduit pour 600 000 € et pré-acheté pour 600 000 €.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
30 mars 2019
Pour une taxe de solidarité sur les plates-formes de S-Vod et de VoD
ÉditorialDes bénéficiaires et des victimes
Dans tous les secteurs de l’économie, les grands vainqueurs du confinement quasi généralisé sont les entreprises numériques. Non seulement leur activité n’est pas arrêtée, ni même ralentie, mais elle boostée. C’est le cas des plates-formes de S-Vod comme Amazon Prime, Netflix et, bientôt de Disney +. Et aussi semble-t-il des plates-formes de Vod. Au contraire, les activité traditionnelles, comme la diffusion des films par les salles de cinéma, sont stoppées nettes. Les distributeurs et producteurs dont les films venaient de sortir ou allaient juste le faire, sont de véritables victimes. Dans ces conditions un effort de solidarité des premières ã l’égard des secondes est tout ã fait justifié et devrait être engagé au plus vite.
Comme on l’a vu dans des articles de la rubrique Cinescoop de Siritz des deux semaines précédentes, ceux qui sont particulièrement touchés sont les distributeurs et les producteurs des films qui venaient de sortir. Pour les films français, y compris ceux qui s’avéraient être des succès, il est impossible d’amortir l’investissement du distributeur en minimum garanti et frais d’édition en quelques jours, ni même en trois semaines. Et, pour ceux qui, de toute façon n’allaient pas amortir cet investissement, la perte sera aggravée.
Certains films ont si bien démarré qu’ils reprendront forcément leur exploitation en salle quand celles-ci rouvriront, si possible fin avril ou début mai. Mais ils devront relancer une campagne de promotion pour avertir les spectateurs. Et, même si, sur le long terme, cette période de confinement va sans doute donner aux français une fringale de sorties, il est probable que, pendant plusieurs semaines, ils vont attendre d’être certains que le virus ne frappera plus. D’ailleurs, le gouvernement ordonnera sans doute des reprises progressives.
Le confinement est un coup dur pour les distributeurs, mais aussi pour les producteurs des films concernés. Même quand ils ne comptaient pas toucher de suppléments de recettes, l’exploitation en salle générait du soutien automatique.
D’une manière générale, les baromètres de Siritz montrent que la distribution de la majorité des films français est, pour leur distributeur, une investissement déficitaire, les recettes ne couvrant pas les frais. Mais que ces déficits sont plus que compensés par les bénéfices de quelques films. Si, du fait d’un évènement aussi inattendu que l’actuel pandémie, les bénéfices de ces quelques films bénéficiaires se transforment en pertes, cela fausse l’économie du secteur au point de pouvoir menacer l’existence de leurs distributeurs et producteurs.
Cette situation exceptionnelle justifierait une mesure exceptionnelle que nous a suggéré, au cours d’une conversation sur l’analyse concrète de cette situation, le financier Serge Hayat, qui dirige notamment la sofica Cinėmage. Le président du CNC serait en effet en droit de demander au gouvernement de faire voter d’urgence par le Parlement une loi créant une taxe additionnelle de solidarité sur le chiffre d’affaires des plates-formes numériques, notamment Netflix, Disney +, Amazon Prime et les plates-formes de VoD. Elle serait de durée limitée, c’est å dite la durée du confinement et de ses effets, mais aussi des avantages procurées ã ces plates-formes. Si, par exemple, elle était d’un mois, avec un taux de 10% (0,8% du chiffre d’affaires annuel), on peut estimer que Netflix, avec ses quelques 7 millions d’abonnés paierait 7 millions € en un mois. Amazon Prime, avec autant d’abonnés, mais un tarif d’abonnement de moitié, paierait 3,5 millions € en un mois. Si on rajoute les autres plates-formes cela ferait au moins 14 millions € pour un mois de confinement. Pour 6 semaines cela ferait 21 millions €. Une goutte d’eau pour ces entreprises qui auront été favorisées par la crise sanitaire et une juste compensation pour les distributeurs et producteurs de films français victimes du confinement, ceux qui venaient de sortir ou allaient le faire, comme ceux dont le tournage a été soudainement arrêté sans pouvoir faire appel aux assureurs. Les producteurs de séries dont le tournage a été arrêté pourraient également bénéficier de ce soutien.
Et ces aides viseraient à relancer la fréquentation quand les salles rouvriront, en incitant les distributeurs à une nouvelle campagne de promotion et en augmentant le soutien automatique généré, pour les distributeurs et les producteurs, par les entrées des quelques semaines suivant la réouverture des salles.
Enfin, cette mesure ne pourrait bénéficier qu’aux films français, ce qui est dans la nature du soutien financier du CNC.
Canal+ diffuse « Trois jours et une vie » en clair
CinéscoopVendredi 27 mars, Canal+ a diffusé en clair (voir Le Carrefour) , le film « Trois jours et une vie », réalisé par Nicolas Boukrief et interprété par Sandrine Bonnaire, Pablo Pauly, Charles Berling et Philippe Torreton. Il était sorti en salle le 18 septembre 2019 et a réalisé 99 000 entrées, dont moins de 100 000, ce qui réduit sa fenêtre de diffusion après la sortie en salle de 8 à 6 mois.
Produit par Mahi films, son budget était de 7,2 millions €. Canal+ l’a pré-acheté pour 1,15 millions €, Canal Afrique pour 3 000 € et Multithématiques pour 232 000 €. France 3 l’a pré-acheté pour 500 000 € et coproduit pour 300 000 €.
23 mars 2020
Tous les films français sortis les 26 février et le 4 mars en forte perte
Cinéscoop3,8 millions € de perte sur investissement pour les distributeurs
La fermeture des salles de cinéma a frappé tous les films. Tout particulièrement ceux qui venaient de sortir et n’ont eu que trois jours d’exploitation . Mais ceux qui étaient sortis la semaine précédente, et même deux semaines auparavant.
A l’aide des informations fournies par Cinéfinances.info et avec la méthode d’évaluation mise au point par Siritz (voir ci-dessous), a été calculée la marge brute de la distribution des films français sortis le 26 février et le 4 mars.
Il s’agit de films bénéficiant de l’agrément et dont les contrats sont déposés au CNC. Sont également sortis des films dits « sauvages » qui n’auraient pas eu les points nécessaires pour être agréés et bénéficier du soutien du CNC. Ils n’ont donc déposé aucun contrat et ne sont pas pris en compte dans ces calculs.
Les films pris en compte sont :
-sortis le 26 février : « Cyrille, agriculteur 30 ans, 20 vaches, du lait, du beurre, des dettes » (distribué par ARP sélection), « Lucky » (Apollo Films), « L’Etat sauvage » (Pyramide distribution), « Mes jours de gloire (Bac films), Mine de rien(Orange studio)
-sortis le 4 mars : De Gaulle (SND), Papi Sitter (Gaumont).
Pour tous ces films le distributeur est loin de pouvoir couvrir ses investissements (minimum garanti et frais d’édition) avec les recettes salles et même en prenant en compte le soutien automatique du CNC. Y compris De Gaulle qui était parti pour être un véritable succès.
Selon nos calculs la marge brute cumulée de ces 7 films est une perte de 3,8 millions € avec les recettes salles et de plus de 2,6 millions € si l’on prend en compte le sotien financier.
Bien entendu, si les distributeurs sont en perte, il en est de même des producteurs. Non seulement ils ne toucheront pas de supplément sur recette salles du distributeur, mais leur soutien automatique sera très inférieur à ce qu’il aurait normalement du être.
A titre d’exemple, le très bon démarrage de De Gaulle, avec plus de 500 000 entrées la première semaine, laissait espérer jusqu’à 2 millions d’entrées. Le devis initial du film est de 11,6 millions €. Selon le plan de financement, son producteur, Vertigo productions, y a investi 3,16 millions en numéraire, mais aussi 230 000 € de salaire producteur en participation (environ la moitié de cette rémunération) et 461 000 € de frais généraux en participation (presque la totalité). Des investissements qui auraient été rentables sans l’arrêt brutal des salles.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
Le 23 mars 2020
Hausse de la rémunération des réalisateurs de films de fiction en janvier 2020
BaromètresUne évolution qui contraste avec l’évolution des résultats des films français d’une année sur l’autre
Si on compare la rémunération (droit d’auteur+ salaire de réalisateur technicien) des réalisateurs des films français sortis en janvier 2020 par rapport à celle des films sortis en janvier 2019 on note une nette hausse.
Cette hausse des rémunération des réalisateurs est en grande partie due à la hausse du pourcentage des budgets des films consacrés à cette rémunération.
Il se trouve que les résultats financiers des films français d’une année sur l’autre (voir les deux baromètres sur les résultats de la distribution) se sont singulièrement détériorés.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
Le 23 mars 2020
Le droit en cas de non respect de la chronologie des médias
Le CarrefourCanal+ a décidé unilatéralement de ne pas appliquer cette régle
Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal+, a annoncé que toutes les chaînes du groupe allaient diffuser leurs programmes en clair. Y compris les films de cinéma pour lesquels Canal+ bénéficie d’une chronologie de diffusion plus favorable que les chaînes en clair.
C’est ainsi que la semaine dernière Canal+ a diffusé en clair « Venise n’est pas en Italie » et « Trois jours et une vie » et que cette semaine elle va diffuser « Tanguy, le retour » (voir Cinescoop). Canal+ cinéma diffuse « Rebelles » lundi 23 et « Jusqu’ici tout va bien » mercredi 25. Le CSA a demandé au groupe Canal+ de revenir à une diffusion cryptée des films de cinéma au-delà du 31 mars.
Néanmoins nous avons voulu savoir, indépendamment de la réaction du CSA, quel était le droit en cas de non respect de la chronologie des médias par une chaîne cryptée. Nous avons demandé à maitre Gérald Bigle* (par ailleurs Sponsor de nos baromètres) de faire le point.
Siritz : Quelles sont les sanctions administratives en cas de non respect de la chronologie des médias
Gérald Bigle: En proposant l’accès à toutes leurs chaînes cinéma, séries, jeunesse et documentaires sur toutes les box des opérateurs télécoms pendant la période de confinement, Canal + remet en cause les délais prévus par la chronologie des médias.
Les sanctions
En cas de non respect de la chronologie des médias prévue aux articles L231-1 et suivants du Code du cinéma et des images animées, plusieurs sanctions existent. Les articles L421-1 et suivants du même code vise les sanctions administratives, notamment en cas de non respect des délais fixés (par la loi ou par accord professionnel).
Siritz : Quelles sanctions ?
Gérald Bigle : L’article 422-1 du Code du cinéma et des images animées prévoit un avertissement ; une réduction ou le remboursement des aides financières automatiques ou sélectives qui ont été attribuées ; une sanction pécuniaire.
Siritz : De combien s’élève cette sanction pécunière ?
Gérald Bigle : Il y a des plafonds. Ainsi, son montant ne peut exceder, lorsque la personne sanctionnée est une entreprise, 3% du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercices clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5% en cas de réitération dans un délai de cinq ans à compter de la date de notification de la première sanction.
En outre, il peut y avoir une exclusion du bénéfice de toute aide financière automatique ou sélective pour une durée ne pouvant excéder cinq ans. Il peut y avoir aussi une exclusion du calcul des sommes représentant les aides financières attribuées sous forme automatique mentionnées à l’article L. 311-1 pour une durée ne pouvant excéder cinq ans. Enfin, il peut y avoir une interdiction, pendant une durée ne pouvant excéder cinq ans, d’exercer des fonctions de direction dans une entreprise appartenant au secteur concerné.
Siritz : Il n’y a que des sanctions administratives ?
La concurrence déloyale
Gérald Bigle : Non. Les pratiques de Canal + pendant cette période exceptionnelle de confinement pourraient être aussi qualifiées de concurrence déloyale vis à vis d’autres
diffuseurs ayant acheté les droits en clair dans le respect des délais fixés par la chronologie des médias. Pour qualifier une concurrence déloyale, les trois conditions doivent être réunies : une faute, un préjudice, un lien de causalité.
Siritz: Quelles sont les sanctions pour concurrence déloyale ?
Gérald Bigle : Les sanctions sont de nature civile et peuvent être les suivantes : des dommages et intérêts, la cessation des agissement déloyaux, des mesures accessoires comme des mesures de publication.
Siritz : Mais le confinement ne peut-il justifier les mesures exceptionnelles prises par Canal+ ?
La force majeure
Gérald Bigle : La situation de confinement impose aux Français de devoir vivre chez eux, sans sorties possibles, ni cinéma. La télévision s’impose de fait comme une activité évidente dans ce contexte particulier. Mais s’agit-il d’un cas de force majeure au sens du Code civil, qui pourrait justifier les mesures exceptionnelles prises par Canal + ne respectant pas la chronologie des médias ?
Siritz : Comment caractériser un cas de force majeure ?
Gérald Bigle : Pour caractériser un cas de force majeure, l’événement doit être imprévisible, insurmontable et extérieur. Si ces critères sont remplis, la force majeure est exonératoire ou libératoire. Dans le contexte du droit du travail, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a d’ailleurs annoncé que « pour les entreprises, le coronavirus sera considéré comme un cas de force majeure ». Néanmoins, par le passé, les juges français ont ainsi refusé de qualifier de force majeure les épidémies de grippe H1N1 de 20092, du bacille de la peste3, du virus la dengue4 ou du virus du Chikungunya.
Siritz : Mais on voit mal en cas le confinement contraint Canal+ à offrir ses programmes de cinéma à tous les français.
*Maitre Gérald Bigle est spécialisé dans le droit du cinéma et de l’audiovisuel.
Le 23 mars 2020
Des principes aux mesures concrètes
ÉditorialQuoi qu’il en coûte
Le pays, de chacun d’entre nous au Président de la République, s’adapte ã cette situation de guerre. L’Etat interviendra « quoi qu’il en coûte » pour permettre aux entreprises, aux salariés, aux familles et aux services publics de passer ce cap difficile, sans sombrer. Mais après avoir affirmé un principe, il faudra le mettre en œuvre concrètement dans de multiples cas de figure.
Par exemple, en ce qui concerne la fermeture de salles, le chômage du personnel sera pris en charge par l’Etat. Mais les exploitants ont des frais généraux, dont, souvent, des loyers qu’ils auront du mal à payer sans recettes. Est-ce que le non paiement de la TSA sur les recettes des semaines passėes sera suffisant ? Ou faudra-il faire appel à un soutien bancaire exceptionnel ? Dans les deux cas, cela allègera la trésorerie, mais ne compensera pas la perte.
Sorties interrompues ou reportées pour les distributeurs et tournages interrompus ou décalés pour les producteurs
Pour les distributeurs, deux articles de la rubrique Cinescoop montrent ã quel point c’est un terrible coup dur pour les films qui venaient de sortir. Mais des films sortis depuis plus longtemps et encore ã l’affiche, ne pourront pas non plus atteindre l’équilibre. Les films récemment sortis, quand les salles vont rouvrir, vont-ils reprendre leur exploitation ? Si la réouverture a lieu fin avril, les films ayant bien démarré ne devront-ils pas relancer une campagne de promotion qui pèsera sur leurs rėsultats ? Il ne semble pas que le gouvernement ait prėvu d’indemnisation. D’autres films auront du mal ã retrouver des ėcrans, et, de toute façon, une relance de la promotion ne serait pas rentable. D’où le fait que le CNC envisage la possibilité de ne pas faire respecter le dėlai de 4 ou 3 mois pour la sortie en VoD et DVD. Mais, sauf cas particuliers, ces recettes DVD et Vod sont infinitésimales par rapport aux recettes salles.
Pour les films qui allaient sortir en salle, ils pourront sortir directement en VoD et DVD. Mais les distributeurs devront rembourser les aides reçues pour la sortie cinéma. Certains pourront ensuite sortir en salle, mais sans bénéficier du soutien automatique.
Mėmes questions pour les productions de cinéma et de tv, en tournage, en préparation ou en post-production. Certes les intérimaires seront en chômage payé pendant la période d’arrêt. Mais est-ce que le contrat sera juste suspendu pour reprendre ? Ou comédiens et techniciens pourront-ils commencer un nouvel emploi, prėvu ã cette date par un autre contrat ? Si ces questions sont laissées ã des arbitrages au cas par cas on va vers la confusion la plus totale.
En fait, il semble que le gouvernement et le Parlement vont devoir se pencher au plus vite sur la question et voter une loi considérant cette situation sanitaire et les mesures de confinement comme un cas de force majeur le déclenchement des assurances. Mais si celles-ci ont ã prendre en charge le coût de la suspension d’activité, puis à couvrir le risque d’épidémie, c’est leur équilibre économique qui risque d’être en cause.
Canal+ crée un problème
Ainsi, chaque jour on dėcouvre de nouveaux problèmes et il faudra improviser des solutions.
L’un d’entre eux a ėtė créé de toute pièce par Canal + qui a dėcidė de diffuser tous ses programmes en clair pendant le confinement, y compris les films de cinéma. Dès mercredi dernier la chaêne a donc fait fi de la chronologie des médias, que l’industrie et Canal+ ont mis des années à élaborer, en diffusant des films de cinéma en clair dans sa fenêtre privilégiée. Et ce, sans en avoir informé les chaînes gratuites concernées. La chaîne va recommencer cette semaine (voir Cinescoop). Le CSA a été saisi et a autorisé Canal+ a poursuivre cette transgression jusqu’au 31 mars.
Dans Le Carrefour, maître Gerald Bigle, a accepté d’analyser le droit dans le cas d’une transgression de ce type. Comme on le voit les sanctions pourraient être très lourdes. En tout cas on ne voit pas quelle » force majeur » contraindrait Canal+ à cette transgression.
En outre, au-delà de l’aspect juridique, il faut rappeler que le gouvernement va faire voter une loi rėformant l’audiovisuel, pour, notamment, soumettre les plates-formes internationales à notre réglementation. Ce n’était pas le moment, de la part de notre instance de régulation, de réagir avec une telle mansuétude à l’égard d’une transgression par un des nos principaux acteurs d’une règle essentielle qu’il a contribué à mettre en place.
Enfi, le gouvernement a obtenu que Disney retarde son lancement pour ne pas saturer nos réseaux de transmission alors que Canal+ augmente la consommation des téléspectateurs en étendant sa réception à l’ensemble des français.
DISPARITION DE PATRICK LELAY
La semaine dernière a vu la disparition de ce fantastique manager de TF1 privatisé, qui en a fait la première chaîne française et la première chaîne européenne. pour quelqu’un comme moi c’est énormément de souvenirs, et de bons souvenirs.
Le 23 mars 2020
Canal+ cinéma diffuse « Rebelles » en clair
FinanCinéLundi 23 mars Canal+ cinéma diffuse en clair, en transgression de la chronologie des médias (voir Le Carrefour) le film « Rebelles »,réalisé par Allan Mauduit et interprété par Cecile de France, Yolande Moreau et Audrey Lamy. Produit par Albertine Productions, il est sorti le 13 mars 2019 et a réalisé 925 000 entrées.
Son budget est de 4,5 millions €. Canal+ l’avait pré-acheté 787 000 €, dont le catch up pour la Suisse. Multithématiques l’a pré-acheté 126 000 € et Canal Afrique 3000 €.
France 3 l’a pré-acheté 350 000 € et coproduit pour le même montant.
Les chiffres de cet article proviennent de Cinéfinances.info www.Cinefinances.info* est un site, accessible par abonnement, destiné aux professionnels du cinéma. Il publie le budget, le plan de financement et la répartition des recettes de tous les films français qui sortent (hors les films « sauvages » qui ne déposent pas leurs contrats au registre public et ne demandent donc pas l’agrément qui leur permettrait d’accéder à l’aide du CNC). Il dispose d’un puissant moteur de recherche multicritères et de 10 ans d’archives.
23 mars 2020