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Les 9 premiers mois de 2023 nous conduisaient vers une année pleine à au moins 200 millions d’entrées. En 2024, fin mai nous avions près de 20% de retard sur la même période de l’année précédente, principalement du fait de l’absence de blockbusters américains, suite à la grève de 6 mois qui avait stoppé la production de Hollywood. Cela correspondait à une courbe menant à moins de 150 millions d’entrées en année pleine. Et, avec les débuts des championnats d’Europe de football, juin semblait devoir aggraver l’écart.

Or c’est l’inverse qui s’est produit puisqu’à la fin juin l’écart des 6 premiers mois de 2024 par rapport à la même période de 2024 n’est plus que d’environ 10%. C’est que, coup sur coup, sont sortis trois films qui ont fait exploser les entrées. Tout d’abord, dès le début mai,  est apparu le phénomène « Un p’tit truc en plus » qui est parti pour quelques 10 millions d’entrées. https://siritz.com/editorial/le-ptit-truc-en-plus-du-cinema/.  Depuis 2022 seul «Avatar : la voie de l’eau » avait, avec ses 14,2 millions d’entées, avait dépassé ce chiffre.Et, parmi les films français, il faut remonter à 2014, avec « Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu » et ses 12,3 millions d’entrées, pour le voir dépassé https://fr.wikipedia.org/wiki/Qu%27estce_qu%27on_a_fait_au_Bon_Dieu_%3F

Puis, le 19 juin est arrivé le dessin animé « Vis Versa 2 » qui a rassemblé 1,933 millions d’entrées la premières semaine. https://fr.wikipedia.org/wiki/Vice-versa_2 Certes, chaque année un ou deux films font encore mieux. Mais, sorti en juin 2015 le premier « Vice Versa » n’avait démarré qu’avec 787 000 entrées pour finir avec un total de 4,55 millions. Le deuxième volet va largement dépasser ce total.

Enfin, le 28 juin, la nouvelle version de « Le comte de Monte-Christo » démarre un vendredi avec 30 000 entrée sur Paris-Périphérie  https://siritz.com/cinescoop/et-de-trois-alexandre-dumas/. Or avec une durée de 3 heures ce film n’a que 3 séances et, surtout, une seule séance le soir. En outre, la fête de cinéma débutant 2 jours plus tard, un grand nombre de sectateurs potentiels ont dû se réserver pour elle. C’est tout de même la moitié du premier vendredi de « Avatar : la voie de l’eau » qui a fini avec 14,2 millions de spectateurs. Si le film d’Alexandre de la Patellière et Matthieu Delaporte réalisait la moitié de ce total, ce serait beaucoup plus que le total des entréesdes deux « Trois mousquetaires ».https://siritz.com/cinescoop/les-trois-mousquetaires-milady/

La profession craint évidemment la concurrence de jeux Olympiques. Et, aussi, les incertitudes de la vie politique. Mais ces trois exemples rappellent que le cinéma est un marché d’offre : certains films réalisent de très fortes entrées quelles que soit le contexte.

Sean Baker, le réalisateur américain indépendant qui a obtenu la Palme d’or du dernier Festival de Cannes avec « Aurora » l’a bien dit : « le cinéma est fait pour être vu dans une salle de cinéma. Le public veut y vibrer, y rire, y pleurez ensemble ».

Une vérité que nous rappelle l’énorme succès du film français, « Un p’tit truc en plus », la première réalisation d’Arthus qui en est aussi l’un des rôles principaux, une comédie qui traite du handicap mental et qui est interprété par des handicapés mentaux. https://siritz.com/editorial/le-ptit-truc-en-plus-du-cinema/

Ses performances sont phénoménales. Il a démarré avec 1,131 millions d’entrée et la seconde semaine et n’a baissé que de 13% en seconde semaine, alors qu’un recul de 30% est considéré comme un succès. Et surtout, sa troisième semaine, avec 1,3 millions d’entrées, ce qui correspond à une progression de 33%, est de loin la plus forte.   Et il semble que la quatrième semaine ne reculera que de quelques pour cent, portant le film à 4,7 millions d’entrées, ce qui le place déjà, et de loin, au sommet du box-office 2024, loin devant « Dune 2 ».

A ce stade il est totalement impossible se savoir jusqu’où il est capable d’aller. Il est en tout cas probable qu’il dépassera le record de 2023, les 7,3 millions d’entrées de « Super Mario ». Ce qui est incroyable c’est qu’il paraitrait que le projet avait été refusé par plusieurs producteurs, puis plusieurs distributeurs.  Décidément le  cinéma n’est pas une science exacte.

Bien entendu ces performances permettent aux entrées nationales hebdomadaires de progresser par rapport à l’année dernière : de 3% la semaine de sortie du film, de 67% sa seconde semaine et de 8% sa troisième. Or, les 9 premiers mois de 2023 nos salles étaient à un étiage de 200 millions d’entrées. Cette année, en entrées cumulées elles sont certes toujours à moins 14% de l’année dernière à la même époque , mais principalement du fait du trou d’air de la production américaine. Or, deuxième semestre et, surtout, à partir de la fin des jeux Olympiques l’offre américaine devait retrouver son niveau habituel.

Ce qui est certain c’est que les films français, eux, sont à un étiage très fort. Le double prix obtenu par « Emilia Perez » de Jacques Audiard au Festival de Cannes est encore une illustration de l’excellence du cinéma français. Il est très rare qu’un film soit doublement couronné et il est probable que le jury n’a pas voulu attribué une Palme d’or a un film qui avait déjà le prix d’interprétation. Après la Palme d’or et les deux golden Globes attribués l’année dernière à « Anatomie d’une chute » de Justine Triet notre création ne cesse de briller.

Aucune phrase ne peut mieux résumer l’économie du succès au cinéma que le titre de la comédie française qui est en train de faire remonter la fréquentation de nos salles à ses plus hauts niveaux : « Un p’tit truc en plus ». https://siritz.com/cinescoop/le-premier-demmarrage-de-lannee/Avec 250 000 entrées il a réalisé le plus fort premier jour de l’année et, avec 1,112 millions  d’entrées, la seconde semaine de l’année, juste derrière « Dune 2 ».  Soit 15 fois les entrées au Cinéchiffres, alors qu’un coefficient entre 3 et 4 est considéré comme tout à fait correct. C’est typiquement un film qui « marche en profondeur ». Et, alors qu’il avait réalisé le mercredi 1er mai 16 000 entrées, fait exceptionnel, il est monté à 19 000 entrées le mercredi 8 mai !

Pourtant il s’agit du premier film de son réalisateur, Artus, un humoriste à succès qui en est par ailleurs interprète avec le comédien Claude Cornillac.  Ce n’est pas, à l’évidence un film « tiré » par  le poids de ses rôles principaux, puisque ils n’ont reçu comme rémunération fixe que 50 000 €, soit 50% de la rémunération médiane de tous les films de fiction français sortis en 2023. La rémunération du réalisateurs comme le budget du scénarios sont sensiblement en-dessous de la moyenne de ceux des films de fiction français. Le budget global du film n’en est pas moins 30% au-dessus de la moyenne de celui des films français, avec 35 jours de tournage.

En fait, son succès est dû à son sujet qui tourne autour d’un fait de société  auxquels ne sont pas indifférents un  grand nombre de personnes :  l’existence de handicapés mentaux. https://siritz.com/editorial/faire-rire-de-dures-faits-de-societe/Et, ce qui explique l’élargissement de son audience, c’est qu’il est interprétés par de véritables handicapés mentaux qui se révèlent de très bons comédiens, faisant preuve d’intelligence et de sensibilité.   Et, une situation que chacun considère â priori comme dramatique, se révèle pouvoir susciter du bonheur. Ce qui conduit ceux qui ont vu le film â en parler autour d’eux et à créer un formidable bouche à oreille.

En somme, ce film rappelle que l’un des moteurs du succès du cinéma est de sortir des sentiers battus. Donc, d’offrir un p’tit truc en plus.