Il faut que les salles puissent couvrir leurs frais de fonctionnement et que les distributeurs les approvisionnent en films. Il y a une solution.
Le cinéma fait partie, comme une grande partie des activités culturelles, et bien entendu de la restauration et du tourisme, de tous les secteurs qui sont ã l’arrêt total. Et, pour l’instant, du côté du gouvernement, du ministre de la culture au Président de la République, même si ce dernier a évoqué un plan, il n’y a pas le plus petit commencement de perspective.
Tous les secteurs du cinéma sont frappés. Mais l’enjeu principal est la réouverture des salles. Quelle que soit la date où elle aura lieu celles-ci devront respecter des mesures de protection sanitaires qui vont augmenter leurs coûts et rėduire leur fréquentation potentielle. Dans certains cas les recettes ne permettront pas de couvrir les frais de fonctionnement, tandis que les frais fixes continueront ã courir.
Mais l’enjeu majeur concerne le public : voudra-y-il prendre le risque de s’enfermer au cinéma tant que le Covid 19 rode et frappe ? Dans ce cas, sauf, peut-être – et encore- pour les films qui venaient de dėmarrer lors de la fermeture des salles, les distributeurs préféreront attendre que la fréquentation revienne à la normale avant de sortir leur film. Mais sans une offre attractive de films, les salles ne pourront rouvrir. Et tant que les salles n’auront pas ouvert, les distributeurs n’ayant aucune idée de l’attitude du public, repousseront la sortie de leur film.
C’est donc un cercle vicieux qu’il faut casser. Et ce, en prenant des mesures exceptionnelles comme le gouvernement n’a cessé d’en prendre pour limiter les conséquences économiques du confinement. Pour y parvenir, il faut baisser considérablement le point mort des exploitants et des distributeurs dans les premières semaines de la rėouverture.
Augmenter fortement le soutien automatique
Cela suppose d’augmenter fortement la recette par entrée, en augmentant fortement le taux de soutien automatique le premier mois de la réouverture des salles. Ce bonus pourrait être ėnorme la première semaine, puis diminuer jusqu’ã la quatrième.
A titre d’exemple si le soutien double le prix moyen de la place qui est de 6,7 € et que, la première semaine, il n’y a que 1 millions d’entrées, soit le quart des entrées en juillet août, l’aide aux exploitants serait de 6,7 millions €. En juillet cela correspondrait pour les exploitants aux recettes de 2 millions d’entrées par semaine contre 3,5 millions habituellement. Si le taux de soutien diminuait de 25% par semaine cela reviendrait à environ 18 à 20 millions sur le mois. L’augmentation du soutien à la distribution pourrait appliquer le même principe et coûter globalement 7 millions €. Soit un total de 25 à 27 millions €Certes, les blockbusters américains ne bénéficieraient nullement de ces mesures. Mais une réouverture des salles dès la mi-juillet leur permettrait de programmer des lancements en août.
L’enjeu est considérable, non seulement pour la reprise d’une vie sociale en France mais aussi pour tout le secteur culturel. Si les cinémas ré-ouvrent les théâtres, puis les autres activités culturelles pourront à leur tour envisager les modalités de leur réouverture.
Une taxe de solidarité sur les grandes plates-formes de S-Vod
Bien entendu le CNC n’a pas la moindre réserve pour financer ces montants et l’Etat devra lui attribuer une dotation exceptionnelle. Mais les fonds nécessaires pourraient provenir en partie, voir en totalité, d’une autre source : une taxe de solidarité sur les plates-formes internationales de S-Vod, comme je l’avais suggéré dans deux précédents éditoriaux*.
Car, désormais, il est clair que le confinement est pour elles un véritable effet d’aubaine. Netflix a annoncé que ses abonnés avaient progressé deux fois plus vite que prėvu au 1er trimestre. Cela confirmerait que le confinement les a fait progresser de 30 % depuis le confinement français et mondial. De même les 50 millions d’abonnés conquis en 6 mois par Disney + confirment cette analyse et les résultats d’Amazon prime doivent être ã la même aune.
Une taxe de 5% sur le chiffre d’affaires de ces plates-formes pendant 3 à 4 mois pourrait financer la presque totalité du bonus calculé plus haut.
En effet, rien que sur Netflix une taxe de 5%, représentant 21% % d’un effet d’aubaine de 30% d’abonnés en plus, rapporterait environ 4,5 millions € par mois. Sur les trois plates-formes cela pourrait représenter 5 à 6 millions € par mois et financer, en 3 où 4 mois presque la totalité du bonus du fonds de soutien. En outre, les plates-formes pourraient bien préférer que cette taxe soit en fait une contribution volontaire au redémarrage du cinéma, ce qui serait pour elles une formidable promotion de leur image de marque.
Et si, par chance, la fréquentation est supérieure au prévision l’Etat devrait garantir de prendre en charge le supplément de fonds de soutien.