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L'édito de Serge
Serge Siritzki

Pour une taxe de solidarité sur les plates-formes de S-Vod et de VoD

Par Serge Siritzky

Des bénéficiaires et des victimes

Dans tous les secteurs de l’économie, les grands vainqueurs du confinement quasi généralisé sont les entreprises numériques. Non seulement leur activité n’est pas arrêtée, ni même ralentie, mais elle boostée. C’est le cas des plates-formes de S-Vod comme Amazon Prime,  Netflix et, bientôt de Disney +. Et aussi semble-t-il des plates-formes de Vod. Au contraire, les activité traditionnelles, comme la diffusion des films par les salles de cinéma,  sont stoppées nettes. Les distributeurs et producteurs  dont les films venaient de sortir ou allaient juste le faire, sont de véritables victimes. Dans ces conditions un effort de solidarité des premières ã l’égard des secondes est  tout ã fait justifié et devrait être engagé au plus vite.

Comme on l’a vu dans des articles de la rubrique Cinescoop de Siritz des deux semaines précédentes, ceux qui sont particulièrement touchés sont les distributeurs et les producteurs des films qui venaient de sortir. Pour les films français, y compris ceux qui s’avéraient être des succès, il est impossible d’amortir l’investissement du distributeur en minimum garanti et frais d’édition en quelques jours, ni même en trois semaines. Et, pour ceux qui, de toute façon n’allaient pas amortir cet investissement, la perte sera aggravée.

Certains films ont si bien démarré qu’ils reprendront forcément leur exploitation en salle quand celles-ci rouvriront, si possible fin avril ou début mai. Mais ils devront relancer une campagne de promotion pour avertir les spectateurs. Et, même si, sur le long terme, cette période de confinement va sans doute donner aux français une fringale de sorties, il est probable  que, pendant plusieurs semaines,  ils vont attendre d’être certains que le virus ne frappera plus. D’ailleurs, le gouvernement ordonnera sans doute des reprises progressives.

La pandémie fausse le modèle économique des la distribution de films

Le confinement est un coup dur pour les distributeurs, mais aussi pour les producteurs des films  concernés. Même  quand ils ne comptaient pas toucher de suppléments de recettes, l’exploitation en salle  générait du soutien automatique.

D’une manière générale, les baromètres de Siritz montrent que la distribution de la majorité des films français est, pour leur distributeur, une investissement déficitaire, les recettes ne couvrant pas les frais. Mais que ces déficits sont plus que compensés par les bénéfices  de quelques films. Si, du fait d’un évènement aussi inattendu que l’actuel pandémie, les bénéfices de ces quelques films bénéficiaires se transforment en pertes, cela fausse l’économie du secteur au point de pouvoir menacer l’existence de leurs distributeurs et producteurs.

Cette situation exceptionnelle justifierait une mesure exceptionnelle que nous a suggéré, au cours d’une conversation  sur l’analyse concrète de cette situation, le financier Serge Hayat, qui dirige notamment la sofica Cinėmage. Le président du CNC serait en effet en droit de demander au gouvernement de faire voter d’urgence  par le Parlement une loi créant une taxe additionnelle de solidarité sur le chiffre d’affaires des plates-formes numériques, notamment Netflix, Disney +, Amazon Prime et les plates-formes de VoD. Elle serait de durée limitée, c’est å dite la durée du confinement et de ses effets, mais aussi des avantages procurées ã ces plates-formes. Si, par exemple,  elle était d’un mois, avec un taux de 10% (0,8% du chiffre d’affaires annuel), on peut estimer que Netflix, avec ses quelques 7 millions d’abonnés paierait 7 millions € en un mois. Amazon Prime, avec autant d’abonnés, mais un tarif d’abonnement de  moitié, paierait 3,5 millions € en un mois. Si on rajoute les autres plates-formes cela ferait au moins 14 millions € pour un mois de confinement. Pour 6 semaines cela ferait 21 millions €. Une goutte d’eau pour ces entreprises qui auront été favorisées par la crise sanitaire et une juste compensation pour les distributeurs et producteurs de films français victimes du confinement, ceux qui venaient de sortir ou allaient le faire, comme ceux dont le tournage a été soudainement arrêté sans pouvoir faire appel aux assureurs. Les producteurs de séries dont le tournage a été arrêté pourraient également bénéficier de ce soutien.

Et ces aides viseraient à relancer la fréquentation quand les salles rouvriront, en incitant les distributeurs à une nouvelle campagne de promotion et en augmentant le soutien automatique généré, pour les distributeurs et les producteurs, par les entrées des quelques semaines suivant la réouverture des salles.

Enfin, cette  mesure ne pourrait bénéficier qu’aux films français, ce qui est dans la nature du soutien financier du CNC.

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