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L'édito de Serge
Serge Siritzki

PLATEFORMES : LE CSA FIXE DES RÉGLES

Par Serge Siritzky

MAIS SUSCITE DES DÉCEPTIONS

En application du décret SMAD, le CSA vient de passer avec les plateformes un accord, valable trois ans,  pour les faire contribuer au financement de la production audiovisuelle et cinématographique française. https://www.societe.com/actualites/accord_avec_le_csa_les_plateformes_americaines_investiront_300_millions_d_euros_dans_le_cinema_francais-58804.html

Netflix, Disney+, Amazon Prime et Apple TV vont consacrer chaque année, à partir de 2022, 20% de leur chiffre d’affaires à ces deux secteurs, dont 20% pour le cinéma. Ce qui représente un apport supplémentaire annuel de 250 à 300 millions €, dont environ 200 millions € par Netflix. A comparer au milliard € que représente actuellement l’apport total des chaînes françaises.

Amazon Prime soulevait un problème car ce service n’est que partiellement consacré à la diffusion de films et d’œuvres audiovisuelles, puisqu’il propose aussi l’achat de livres et de bien d’autres produits. Finalement Amazon investira 30% de son chiffre d’affaires avec un minimum garanti de 40 millions €.

95% de cet investissement devra être consacré à des œuvres patrimoniales alors que les plateformes demandaient que ce ne soit que 70%. Et 75% devront être des œuvres d’expression originale françaises alors que le CSA aurait pu aller jusqu’à 85%.

L’USPA, France Anim, la SACD et l’ARP critiquent

Mais cet accord déçoit le nombreux professionnels.

Ainsi, l’USPA, qui représente les producteurs d’œuvres audiovisuelles, et Pascal Rogard, le directeur général de la SACD, regrettent que le pourcentage d’œuvres d’expression originales françaises ne soit que de 75%. Et France Anim,qui représente les producteurs d’oeuvres d’animation,  fait remarquer que l’objectif de diversité du décret SMAD n’est pas respecté, alors que la France dispose en animation « d’une industrie mondialement reconnue. » Ainsi les investissements de Netflix ne représenteront que 0,7% de son chiffre d’affaires français et ceux de Disney+ de 0,56% de son chiffre d’affaires. Quant à Amazon Prime rien n’est prévu.

Or, selon le CNC, l’année dernière cette plateforme a proposé   14 000 épisodes d’animation, autant que Netflix, et en croissance de 40% par rapport à l’année précédente.

Mais cet accord  suit celui que les professionnels du cinéma viennent de passer avec le groupe Canal+. https://siritz.com/editorial/accord-entre-canal-et-le-cinema/

Or, dans  cet accord, Canal+ a obtenu que la fenêtre des plateformes pour le cinéma se situe à 15 mois alors que celles-ci veulent être à 12 mois. Leur propre accord arrive à échéance le 2 février et elles pourraient choisir la fenêtre de 12 mois. Ce qui les amènerait à passer leur investissement de 20 à 25% de leur chiffre d’affaires, mais remettrait en cause l’accord du cinéma avec Canal+.

A noter que cet accord s’ajoute à l’intégration des plateformes dans le système français du droit d’auteur, signé par les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel cet automne. Notamment, si, dans un contrat entre un producteur et un auteur, il y a une clause illégale, comme un « buy-out » par laquelle un auteur accepterait de renoncer à l’ensembles de ses droits, cette œuvre ne pourrait bénéficier du soutien financier du CNC et le CSA ne la décompterait pas dans les investissements en œuvres françaises.

Bien plus, en vertu d’une directive européenne du mois de Mai, si un auteur subit, en vertu du contrat signé, un préjudice trop important, il peut provoquer la révision du prix (art 1351-5 du code de la propriété intellectuelle). En second lieu, les plateformes devront informer les auteurs sur le nombre de visionnages de leurs œuvres (article 132-28-1 du code de la propriété intellectuelle).

Néanmoins le réalisateurs membres de la SRF continuent de douter du respect de leur droit d’auteur par les plateformes.

En outre,  Pierre Jolivet, président de l’ARP fait remarquer que les plateformes sont les seules à contrôler leur audience.

 

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