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L'édito de Serge
Serge Siritzki

L’ENJEU DE LA LUTTE CONTRE LE PIRATAGE

Par Serge Siritzky

Roseline Bachelot a affirmé qu’elle va agir

Avant la crise sanitaire, le piratage était le principal fléau qui frappait le cinéma. Bien entendu, tous les professionnels du secteur considéraient, à juste titre,  que c’était du vol. Il avait, en outre, des conséquences économiques énormes pour le cinéma et l’audiovisuel. C’était en effet, pour les distributeurs de films,   la principale cause de la chute, des recettes de la vidéo : vente de DVD, VoD de location et de vente. Or, ces recettes sont indispensables pour amortir les pertes ou dégager une légère marge. 

C’est d’ailleurs du fait du développement de ce fléau mondial que les majors américaines ont décidé de passer à la sortie « day and date ». C’est à dire sur tous les territoires en même temps. Donc, bien que toutes nos salles soient ouvertes, ils n’y programment pas leurs films, sauf exception. Bien entendu, même si la France réussissait à éliminer le piratage sur son territoire, il continuerait dans les autres territoires. Ce qui justifierait le maintient des sorties mondiales des films américains. Mais, si notre pays réussissait à supprimer ce fléau ce serait une formidable incitation pour les pouvoirs publics de ces pays à nous imiter. 

Les incontestables résultats de notre mécanisme actuel de lutte

L’enjeu de la lutte contre le piratage est donc essentiel. Comment pouvons-nous  y parvenir ? Nous avons mis en place un mécanisme qui a obtenu d’incontestables résultats. Mais ces résultats sont insuffisants. Parce que notre mécanisme vise à faire fermer les sites pirates et nécessite de passer par les tribunaux pour y parvenir. Il a réussi à faire chuter les visionnages pirates de 16 millions par mois en 2015 à 8 millions par mois aujourd’hui. Mais cela reste énorme.

Les sites pirates ont néanmoins changé de nature. Comme l’a très bien expliqué Nicolas Seydoux, président de l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle, au Congrès de  la FNCF. https://siritz.com/editorial/les-lecons-du-congres-de-la-fncf-a-deauville/ Auparavant, on les trouvait facilement en cherchant sur Google. Maintenant, ils ont éclaté en une multitude de sites clones. On ne peut les trouver qu’en ayant de bonnes connaissances en technologies numériques. La chaîne des outils mise en place (ALPA, Hadopi, tribunaux) se révèle alors beaucoup moins efficace. 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Association_de_lutte_contre_la_piraterie_audiovisuelle

Sanctionner le consommateur de l’œuvre piratée

Or, pour supprimer ces 8 millions de visionnages pirates mensuels, sanctionner et fermer des sites ne suffit pas : il faut sanctionner directement et systématiquement les consommateurs. Par une amende, comme les amendes aux infractions au code de la route. Mais les gouvernements se sont toujours opposés à ces mesures qui frapperaient leurs électeurs. Récemment, la  députée   Aurore Clément avait déposé un amendement instaurant cette amende. C’est le ministre de la Culture, Franck Riester, qui l’avait bloqué ! 

Or, Nicolas Seydoux fait justement remarquer que, désormais les pirates ne sont pas de jeunes citoyens désargentés. Mais des personnes disposant de solides connaissances dans les technologies numériques. Et qui sont tout à fait conscients que leur acte est de la contrefaçon, c’est  à dire du vol.

A ce même Congrès, la nouvelle ministre de la culture, Roseline Bachelot, a affirmé qu’elle allait s’attaquer sérieusement au problème. On verra si elle débloque l’amendement d’Aurore Clément. Par ailleurs, tous les fournisseurs d’accès ont accepté de bloqueur les sites de piratages détectés par l’ALPA. Sauf Orange dont l’Etat est actionnaire… Là encore, voyons ce qui va se passer.

L’enjeu de la lutte contre le piratage est essentiel pour le cinéma et l’audiovisuel sur notre territoire. Mais aussi au niveau mondial : si la France met en place ce mécanisme d’amendes systématiques, il sera efficace. Et il sera alors un modèle pour les autres Etats. Tout simplement parce qu’il sera créateur de valeur, c’est à dire de chiffre d’affaires et d’emplois. Par les temps qui courent, c’est un objectif de tous les Etats du monde.

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