TELEVISION ET CINEMA DANS LA CRISE
Par Serge Siritzky
Les deux secteurs sont affectés, mais différemment
La télėvision et le cinéma sont affectés très différemment par la crise actuelle. https://siritz.com/editorial/les-salles-de-cinema-en-grand-peril/A court terme la télėvision gratuite a vu ses recettes publicitaires baisser. Mais elle a pu en en grande partie compenser ce recul par un serrage des boulons. Et, à la rentrée, l’activité semble repartir. Mais les chaînes n’ont pas la moindre visibilité sur les mois à venir. Pour la télėvision payante les recettes publicitaires sont marginales.
La menace de la S-VoD
Mais, sur le long terme, toutes les télėvisions vont être touchées par la S-VoD et certains services sociaux comme Facebook ou You tube. Les réseaux sociaux grignotent régulièrement des parts de marché publicitaire. Et il n’est pas certain que, pour les chaînes gratuites, la publicité ciblée et l’ouverture à celle des films permette de compenser cette évolution. En outre, l’élargissement de l’offre de la S-Vod va inévitablement grignoter l’audience de toutes les chaînes. Pour l’instant, en France, il y a quatre services de S-Vod : Netflix, Amazon Prime, Disney + et Apple TV. Mais s’y ajouteront sans doute les services qui existent dėjà aux Etats-Unis, HBO Premium et Peacock, le service de S-Vod gratuit d’Universal, financé par la publicité. Il est enfin possible que Facebook lance sa propre offre de programmes.
Canal + a rėagi de deux façons : en devenant, avec My Canal, un service de S-VoD disposant d’un important catalogue de programmes. Et en développant l’activité de distributeur de chaînes payantes et de S-Vod. A l’image d’ Apple et de Google qui exploitent une importante activité de diffusion d’applications internet. Par ailleurs, nos grands groupes de chaînes gratuites vont lancer Salto, un service de S-Vod utilisant leur catalogue. Mais s’il n’a pas un important budget pour financer des programmes exclusifs, il risque de ne pas faire le poids.
Surtout, les services américains s’adressent au marché mondial et ont donc des moyens sans commune mesure avec ceux de leurs concurrents français. Or, pour le cinéma, la fiction, le documentaire ou l’animation les talents ne sont pas multipliables ã l’infini et leur prix va finir par s’envoler. En outre, les services américains vont sans doute élargir leur offre aux grands événements sportifs, à l’information et au flux.
Les chaînes de tėlėvision n’ont pourtant pas perdu la bataille. Un groupe comme Canal a montré ses capacités d’adaptation. Et il pourra y avoir des alliances entre les grandes chaînes européennes payantes ou gratuites. Il pourra y avoir aussi des alliances entre celles-ci et des plates-formes mondiales.
Bouleversement de l’économie du cinéma
Pour le cinéma la situation est beaucoup plus difficile. https://siritz.com/editorial/les-salles-de-cinema-en-grand-peril/ Même en période d’épidémie, il y a toujours des films rentables. Mais de moins en moins. Et, tant que le Coronavirus restera une menace, la fréquentation se maintiendra en-dessous du niveau nécessaire à l’équilibre des salles. Il faut donc que très vite le gouvernement mette en place un soutien qui permette à celles-ci de faire la soudure.
En outre, toute l’économie de la production est bouleversée. Les tournages à l’étranger sont stoppés. Et les plates-formes de S-VoD vont picorer dans l’offre de films pour les diffuser directement, sans passage par les salles de cinéma. Les montants d’investissements encadrés ne peuvent donc être respectés. Et le CSA ne sait comment gérer ce déséquilibre dont il ne peut prévoir l’évolution. Est-ce que, quand la S-VoD sera intégrée dans l’économie du cinéma, cette pratique disparaîtra ? Tout dėpendra sans doute de leur fenêtre de diffusion. Elles exigeront probablement la même que Canal +. Mais cette dernière, comme tous les investisseurs encadrés d’ailleurs, pourrait aussi prėvoir dans son contrat que le rachat pour une sortie directe en S-VoD est impossible. Cela pourrait même être prévu par la réglementation.