PERIL SUR LA FENETRE D’EXCLUSIVITÉ DES CINEMAS
Aux Etats-Unis Universal et le réseau de salles de cinéma AMC rompent le dogme
Le quotidien professionnel britannique « Screen daily » a annoncé hier que le Studio américain Universal et le principal réseau de salles de cinéma des Etats-Unis ont passė un accord qui bouleverse l’économie du cinéma : pour certains films Universal le rėseau aura une fenêtre d’exclusivité de 17 jours. Puis le film pourra être diffusé en VoD premium, le studio et le rėseau de salle se partageant les marges sur ce nouveau média. AMC possède d’ailleurs un service de Premium VoD.
La règle de la fenêtre d’exclusivité aux salles est appliquée partout
Or, jusqu’à maintenant, toutes les salles de cinéma américaines imposaient une fenêtre d’exclusivité de 3 mois sur la diffusion sur tout autre média. En France, la réglementation la fixe même 4 mois, avec des dėrogations à 3 mois en fonction du nombre d’entrées. Cette exclusivité est la règle dans quasiment tous les pays. Elle correspond grosse modo à la durė d’exploitation d’un film en salle. Elle repose sur le principe de la chronologie des médias. Ce principe repose lui-même sur un principe simple : la diffusion débute sur le média le plus cher par spectateur. C’est la salle de cinéma. Puis ce principe est respecté entre tous les autres medias. En fin de course se trouve donc les chaînes gratuites.
Cette chronologie des media est la même que pour le livre. Celui-ci est lancé en édition brochée. Quand les ventes dans ce format sont quasiment terminées débute la vente en livre de poche, beaucoup moins cher. Elle procure un chiffre d’affaires supplémentaire. Mais, si le livre de poche était vendu en même temps que l’édition brochée, la plupart des lecteurs qui auraient acheté l’édition brochée achèteraient l’édition de poche, beaucoup moins cher. Et le chiffre d’affaires des éditeurs comme des libraires chuterait fortement. Sans doute la plus grande partie d’entre eux disparaîtraient.
La plate-forme internationale de S-Vod Netflix cherche par tous les moyens à diffuser des films de cinéma en même temps que les salles. Celles-ci, ayant le même raisonnement que les éditeurs et les libraires à propos du livre de poche, résistent partout dans le monde. Netflix comme Amazon Prime n’ont pu, jusqu’ici, qu’acheter des films qui ne sortent pas en salle. En France, pendant le confinement, alors que toutes les salles étaient fermées, 2 films ont ėté vendues à Amazon Prime :
« Forte » https://siritz.com/cinescoop/vente-de-forte-a-amazon-prime-analyse-des-donnees-financieres/ et « Pinocchio » https://siritz.com/financine/vente-de-pinocchio-a-amazone-prime-suite/
De même, sans respecter le délai de 4 mois, mais avec l’accord du CNC, des distributeurs ont fait diffuser leurs films en VoD. Certains exploitants possèdent d’ailleurs leur propre service de VoD. Mais, dans l’hexagone, le chiffre d’affaires de la VoD est très limité, même s’il a sensiblement augmenté pendant le confinement. En début de semaine, alors que les salles françaises sont ré-ouvertes, deux films français très attendus par les exploitants, ont été vendus pour une sortie directe en S-VoD. « Brutus VS César » https://siritz.com/financine/amazon-prime-versus-cesar/ et « Bronx » https://siritz.com/financine/de-carybde-en-scylla-pour-lexploitation/. Ces annonces ont fait l’effet d’une bombe dans l’exploitation.
Le virage à 180° d’AMC
L’accord entre AMC (filiale du groupe chinois Wanda) et Universal, filiale de Comcast, est quant à elle doublement surprenante. Tout d’abord, parce qu’ au printemps denier, Jeff Shell, PDG de NBCUniversal, avait annoncé qu’Universal envisageait de sortir ses films en même temps en salle et en Premium VoD (19$). La réaction d’Adam Aron, le PDG d’AMC (8 000 écrans), avait été immédiate : il avait écrit à la directrice du studio qu’il ne sortirait plus ses films. https://siritz.com/cinescoop/chronologie-des-medias-comcast-recadre-universal/
En sont lieu parce que, venant de la part d’un des principaux exploitants nord-américains, cette première brèche dans le dogme de la fenêtre exclusive des salles est un tournant. Selon AMC c’est un moyen pour un exploitant de devenir un acteur important des media numériques. En outre, la Premium VoD propose le film ã un prix élevé, supérieur ã celui d’un billet de cinéma. Néanmoins, plusieurs personnes peuvent regarder le film en même temps, ce qui en réduit le prix par spectateur. En outre, si un film ne sort pas dans seul circuit, comment les exploitants se partageront les bénéfices de la Premium VoD. Ceux qui ne les partageraient pas refuseront probablement de sortir le film.
Bientôt l’Europe et le Moyen-Orient
La plupart des exploitants estiment au contraire que «quand les bornes sont franchies il n’y a plus de limite ». Selon eux, le dogme de la fenêtre d’exclusivité vient d’être récusé et la Prime VoD ne pèsera pas lourd face aux géants de la S-VoD mondiale qui se précipiteront dans la brèche.
AMC est non seulement le premier exploitant d’Amérique du nord, mais le premier exploitant mondiale. Il est en effet présent dans 14 pays européens. Et, il est, notamment, le numéro 1 au Royaume-Uni, en Ireland, en Italie, en Espagne, en Suède, en Finlande et dans les Etats Baltes. En outre, il est le premier exploitant en Arabie Saoudite.
On ne connait pas la date de début de ce nouveau mode d’exploitation car la plupart des salles d’AMC aux Etats-Unis sont fermées. Par ailleurs, AMC et Universal ont déclaré qu’ils allaient commencé à étudier l’extension de cet accord à l’Europe et au Moyen Orient.