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Revoir profondément les aides sélectives 

Le fonds de soutien doit être rapidement réformé. Car, avant même l’arrivée du Coronavirus, il était devenu largement déficitaire. Une situation très grave puisque, pour le cinéma comme l’audiovisuel,  ce  soutien financier est l’un des rares mécanismes dont la France peut s’enorgueillir  de son efficacité.

La double nature du fonds de soutien

Cette efficacité est due à sa double nature. C’est  tout d’abord une épargne forcée : le produit de taxe de 10,7% sur les recettes des salles et de 5,15 % sur les recettes des chaînes  n’est reversé aux entreprises françaises de la filière que si elles le réinvestissent. Ce qui les oblige ã un dynamisme structurel. C’est, en second lieu, un droit de douane sur les oeuvres étrangères, et tout particulièrement américaines, puisque le soutien ne bénéficie qu’aux entreprises et aux oeuvres françaises. Ce qui permet de reverser globalement à celles-ci plus que leur part de la recette prélevée.

Par ailleurs, les américains ne peuvent se plaindre de ce droit de douane. Car, pour le cinéma, il  permet å la France d’être, de loin, leur second marché continental, du fait d’un superbe réseau de salles alimenté par la première production nationale de films. Malgré ce droit de douane, leur chiffre d’affaires net est donc plus élevé qu’ailleurs. Certes, le Royaume-Uni est un marché plus important pour les américains. Mais c’est essentiellement dû à la langue commune.

Il est vrai que l’efficacité du soutien est beaucoup moins visible pour la télévision. Mais c’est parce que les ressources de celles-ci sont structurellement limitées. Ainsi,  nous avons choisi à la fois d’avoir l’une des plus basses redevances d’Europe pour financer notre secteur public et d’interdire à des secteurs importants de faire de la publicité à la télévision. Néanmoins,  sans soutien, une grande partie de nos œuvres télévisuelles ne pourrait être  financée.

Le Coronavirus a évidemment aggravé le déficit du compte de soutien. D’abord, par le confinement et la fermeture des salles. Puis, par la baisse du chiffre d’affaires des chaînes gratuites, baisse qui risque de se prolonger. Enfin, par l’absence de films américains en salle. Et donc du mécanisme du droit de douane. Voir sur ce point : http://Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article

Mais, quand les films américains reprendront leurs sorties et les spectateurs leur fréquentation habituelle, le soutien financier retrouvera tout de même son déficit d’avant la crise sanitaire. Or, au mieux, on peut espérer  un maintien des recettes en provenance des salles et de la télévision. Certes, le produit de la  taxe payée par les plates-formes américaines de S-Vod augmentera. Mais son taux de 2% est faible et ne pourrait être aligné sur celui de la télévision payante que si son taux de TVA passait de 20 à 10%. Ce qui est  improbable, parce que ce serait une très mauvaise affaire pour les finances publiques.

Des critères de réussite précis et vérifiables

Pour supprimer ce déficit, la seule solution est donc de réduire les dépenses du fond de soutien. Or,  il serait contreproductif  de réduire le  soutien automatique, alors que  son efficacité est incontestable.  Reste les aides sélectives. Elles n’ont cessé de se développer au fil des années. L’une des causes de cette évolution c’est peut-être que c’est  un moyen, pour le président du CNC, de donner un os à ronger à des secteurs sous sa tutelle. Et de flatter les personnalités nommées dans les commissions d’attribution des aides.

Bien évidemment, la  création et le maintien de ces aides  peuvent être  justifiés. Mais, jusqu’à ce jour,  jamais, lors de leur création, on ne fixe le ou les objectifs à atteindre, si possible en les chiffrant. C’est à dire en définissant des critères de réussite précis et vérifiables. Et, jamais on n’impose de faire un bilan annuel, puis  quinquennal, des résultats atteints par rapport aux objectifs. Accompagné de suggestions.

Pour faire les indispensables économies il faut donc commencer à étudier chacune des aides sélectives existantes à cette aune. Et en hiérarchisant leur intérêt par rapport à une stratégie d’ensemble. Celles qui se trouvent en fin de listes devraient être supprimées ou réduites. Dans certain cas il pourrait d’ailleurs y  avoir fusion. En tout cas, comme, à l’évidence, il y a trop d’aides sélectives, il faut en limiter le nombre et n’en créer une nouvelle qui si on en a supprimé une autre au préalable.

Il est certain que, pour une profession qui n’a connu qu’un CNC qui fabriquait de nouvelles aides comme les banques centrales fabriquent de la nouvelle monnaie, le réveil va être douloureux. D’autant plus qu’il aura lieu au moment où la situation économique d’ensemble du secteur s’est détériorée. Mais cette subite détérioration ne fait qu’accélérer la nécessité de revoir tout l’écosystème  de notre cinéma et de notre audiovisuel. Une  révision qui  peut se révéler positive sur le long terme. https://siritz.com/editorial/__trashed-8/