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Siritz.com : Qu’est-ce qui vous a amené à créer en 1972 une école de formation aux métiers de l’audiovisuel ?

Max Azoulay : J’étais professeur d’économie et de gestion dans une école d’informatique. Et par ailleurs, j’étais un cinéphile. Et je cherchais à monter une boite, pour être indépendant. C’était l’époque des films institutionnels ou d’entreprise. Et c’est comme ça qu’en 1972, quand j’avais 24 ans, j’ai ouvert L’École Supérieure des Réalisateurs Audiovisuels. L’idée c’était que les réalisateurs disposant de moins de budget pour faire ce type de films il fallait qu’ils soient polyvalents. La formation durait 2 ans. Et, au bout de ces deux années, j’ai découvert que cette polyvalence était nécessaire pour le film institutionnel, mais aussi pour le cinéma. Et là, j’ai créé une troisième année et j’ai changé le nom. C’est devenu l’École Supérieure de Réalisation Audiovisuelle. Et quand on a créé la 5ème et la 6ème chaîne, on est tombé dans le PAF et ça tombait très bien. https://fr.wikipedia.org/wiki/École_supérieure_de_réalisation_audiovisuelle

Siritz.com : Vous avez développé des options ?

MA : Oui. On a créé des options en 3ème année. L’ISTS qui est une école de son. Et, ensuite, l’École d’animation.

Siritz.com : Ce sont des options ou des écoles à part ?

MA : Ce sont 3 écoles à part. Les programmes sont parallèles, avec des connexions entre eux. A l’ESRA, pour le son, la première année ils font tout eux-mêmes. Mais à partir de la deuxième année cela devient très sophistiqué. Cela demande beaucoup de dextérité et ce sont les élèves de l’ISTS qui font les bandes son des films de l’ESRA et de l’ESRA Animation.

Siritz.com : Et les trois écoles amènent à Bac+3 ?

MA : Oui.

Sirizt.Com : L’ESRA s’est créée à Paris. Puis elle s’est développée en créant des écoles en Province. Normalement cela aurait dû être à Lyon et Marseille. Or c’est Nice et Rennes que vous avez choisis.

 

MA : J’étais en contact avec le patron de LTM qui fabriquait des éclairages pour tournage. Il s’était installé à Nice et avait acheté les studios de la Victorine. Et c’est lui qui m’a dit de venir à Nice, qu’il fallait vraiment y faire une école. J’y ai été et je me suis dit pourquoi pas. La ville m’a beaucoup aidé, en me prêtant des locaux en pleine Promenade des Anglais et les studios de la Victorine m’ont prêté des studios de son et de mixage sur place.

Siritz.com : Et Rennes ?

MA : J’ai racheté une école qui existait déjà, l’ETPA. Mais je l’ai complètement modifiée.

Siritz.com : Comment est composé le corps enseignant ? De professionnels ?

Le cinéma ce sont avant tout des émotions

MA : Il a deux catégories d’enseignants : des universitaires, qui enseignent la mise en scène, l’histoire du cinéma, etc… Et des professionnels qui enseignent les techniques (image, montage, son, etc…)

Siritz.com : Pourquoi des universitaires et pas des réalisateurs ?

MA : Parce que j’ai fait des expériences et que je me suis rendu compte qu’un réalisateur est obnubilé par sa propre recherche d’écriture. Or, pour enseigner il faut se détacher de ses propres recherches, parce que les élèves ont besoin d’une vision très large. Et puis, il y a une dizaine d’année on a créé un cours assez original, sur la mise en scène comparée. Et il est très efficace, parce qu’on prend les scènes qui sont réitérés dans le cinéma. Par exemple un crime, un baiser, une fuite, un tunnel, etc…Donc, le cours de mise en scène s’intéresse à la stratégie globale de construction d’un film. Au contraire, le cours de mise en scène comparé va prendre par exemple, de scène de meurtre chez Coppola, chez Scorcèse, chez Hitchcock, etc… Et on va comparer la manière dont ils ont créé l’émotion, parce que le cinéma ce sont avant tout des émotions. On va analyser comment le comédien rentre dans le champ, comment on le filme, comment on mélange le scénario et la mise en scène pour créer cette émotion. Parce que le jour où, par exemple,  ils auront à filmer un crime ou un baiser,  il ne s’agit pas de donner une recette mais de trouver les solutions adaptées à ce qu’ils veulent dire.  Et ce cours permet de voir comment ont fait les grands.

Siritz.com : Comment se répartissent les différents types de cours ?

MA : Les cours théoriques durent en moyenne 22 semaines et parallèlement il y a les cours dirigés ou travaux de préparation de production qui durent toute l’année. Et ils se consacrent à plein temps à leur film à partir d’avril et mai.

Siritz.com : C’est quoi la polyvalence ?

MA : Ils vont faire un diaporama en début de première année. Ils ont tous fait de la photo. Ils font des travaux pratique de son pour faire un son 2 pistes. Et ils vont raconter une histoire, ce qui va les obliger à apprendre à découper, à choisir les plans la direction de caméra, la bande son, etc… Et, à partir de janvier, ils vont développer l’écriture d’un court-métrage de 5 minutes. Et là, ils constituent leurs équipes et peuvent participer à plusieurs films, dans des fonctions différentes.

Siritz.com : Et en 2ème année ?

MA : Ils font un spot pub et un film de 10 minutes. Là aussi ils auront des fonctions différentes sur plusieurs films. Ainsi, au bout de 2 années ils ont une vision d’ensemble sur le cinéma. Et là ils vont choisir une des options proposées en 3ème année : écriture et mise en scène, image, montage et post-production, production. On prend 3 élèves de la sélection réalisation et ils vont constituer leurs équipes en puisant dans les autres sections. Leur équipe va ressembler à celle du circuit professionnel.

Siritz.com : Ils ont d’emblée tout le matériel nécessaire ?

MA : Évidemment. Sans avoir à débourser un centime.

Siritz.com : La formation animation est tout de même très différente, parce que la partie dessin est essentielle.

MA : Tout d’abord on prend des gens qui savent déjà dessiner. D’ailleurs on réfléchit à la possibilité de mettre en place deux années préparatoires pour apprendre le dessin. Ils vont apprendre à utiliser des logiciels, dont Maya qui est le principal. Et ils vont apprendre à faire les décors, les personnages. Ils vont avoir des TP pour apprendre le son. En première année ils vont faire des films de 2 à 3 minutes, mais qui ne sont pas forcément parlant parce qu’il y a le problème du mouvement des lèvres. A partir de la deuxième année ils peuvent commencer à le faire.

L’ESRA de Bruxelles et de New-York

Siritz.com : Vous avez ouvert une école à Bruxelles.

MA : Pour donner une dimension européenne à l’école.

Siritz.com : D’où viennent les élèves ?

MA : La moitié sont Belges, l’autre moitié vient du nord de la France ou d’ailleurs.

Siritz.com : L’école est gratuite ?

MA : Non. En Belgique l’enseignement supérieur est gratuit. Mais pour être « subsidié », il faut attendre 10 ans, puis soumettre un dossier et on peut être accepté ou non. Donc j’ai ouvert et l’école est payante.

Siritz.com : Et New-York ?

MA : C’est une quatrième année qui n’est pas diplômante. Mais ça leur permet de travailler avec des profs américains d’écrire un scénario, de réaliser un film là-bas et, surtout, de faire des stages et de connaître le monde professionnel. Ça fait 12 ans que cela existe. Il y a très peu d’élèves qui restent définitivement, mais la moitié environ reste de 3 à 5 ans avant de rentrer en France.

Le DHEC à Bac+5

Siritz.Com : Quelle est la différence du Bac +5 par rapport au Bac +3 ?

MA : C’est le diplôme des hautes études cinématographiques (DHEC). Il y a deux options : réalisation/scénario et l’option production/distribution. La distribution est véritablement en plus. Et on y parle aussi des plateformes. Cela correspond à un besoin. Il y a plein d’étudiants qui ont fait une licence de sciences humaines ou économiques et qui s’intéressent à l’écriture de scénario et à la réalisation. Ou des élèves d’écoles de commerce qui s’intéressent à la production et la distribution. Mais ils n’ont pas la même formation que les diplômés de l’ESRA qui ont fait les options techniques. C’est pourquoi les élèves de la 3ème année de l’Esra doivent se mettre à la disposition des élèves du DHEC pour faire leurs films.

Siritz.com : Il y a une forte extension du secteur. Cela se ressent chez vous ?

MA : Tous nos élèves trouvent un stage, puis ont un bouleau. https://siritz.com/editorial/choc-de-modernisation-pour-les-studios/

Siritz.com : Est-ce que vous faites de la formation permanente ?

MA : Oui. On a le label CALIOTI. On vient d’obtenir le label de Pôle emploi et on devrait obtenir celui de France compétence. En ce moment, nous avons un stage de 6 mois en formation continue.

Siritz.com : Vous avez combien d’élèves en tout.

MA : Grosso modo 2 300 étudiants, dans l’ensemble des villes et des écoles.

Siritz.com : L’école de Nice vient d’ouvrir des locaux à Cannes.

MA : Oui. Ils sont à Cannes La Bocca et sont tout simplement magnifiques. C’est un bâtiment créé par la ville de Cannes pour le dédier à l’audiovisuel. Il possède des plateaux de prise de vue, des amphithéâtres, des salles de cours, des studios de son, des salles de montage. C’est en face du Cineum, un multiplexe de 12 salles de cinéma. Les élèves vont partager leur formation entres les locaux de Nice et ceux de Cannes.

*Rappelons que l’ESRA EST LE SPONSOR DE SIRITZ.COM DEPUIS SA CRÉATION.