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Le rapport de la Cours des comptes sur le CNC est un outil remarquable pour évaluer les performances de notre système de soutien à l’audiovisuel et, surtout, au cinéma.https://www.ccomptes.fr/system/files/2023-09/20230920-S2023-0722-CNCIA_0.pdf

Il reconnait que nous avons incontestablement le meilleur système de soutien au cinéma, ce qui nous permet d’être, de loin le premier producteur européen, avec, de loin, la plus forte part de marché pour notre production nationale. Et nous avons, grâce à notre remarquable réseau de salles, le plus fort taux de fréquentation par habitant d’Europe, un taux équivalent à celui des États-Unis. Dans notre pays le cinéma joue plus que partout ailleurs son rôle de lien social, même si une partie de la population n’en bénéficie toujours pas .

Le fait que ce soit le CNC qui pilote notre politique de soutien au cinéma et à l’audiovisuel est un atout, car il s’agit d’une administration compétente et pérenne, alors que la plupart des autres secteurs en France souffrent de la valse des ministres et des politiques.

Mais ce rapport constate que, de 2001 à 2019 le nombre de films d’initiative française est passé de 172 à 240, ce qui correspond à un accroissement de 40%, alors que la fréquentation est restée au même niveau. Le nombre moyen d’entrées par film a donc diminué d’autant. Plus significatif encore, au cours de cette même période le nombre de films ayant enregistré moins de 20 000 entrées a augmenté de 53%, donc beaucoup plus vite que le nombre total de films, pour atteindre un tiers de tous les films. Ceux qui enregistrent moins de 5 000 entrées sont passés de 10 à 14%. La « diversité » a donc augmenté, mais les films de la diversité ont de moins en moins de chance de trouver un public. C’est l’inverse du but visé puisque l’accroissement du nombre de films nuit en premier lieu aux films fragiles. En revanche, la Cour des comptes n’a cru nécessaire de souligner, que de 2010 à 2019, l’exportation de films français est passé de 522 millions € à 372 millions €, soit une chute de 29%.

Or, de 2011 à 2019, le soutien public à proprement dit est passé de 20 à 28%. Soit une progression de 40%. Dans ces conditions, l’efficacité marginale du soutien public ne cesse de diminuer. Et, rappelons qu’une partie importante du soutien au cinéma n’est pas constitué par ce que l’on considère comme du soutien public mais par les obligations d’investissements des chaînes de télévision auxquelles viennent de s’ajouter les obligations d’investissement des plates-formes de S-vod.

Dans ces conditions le CNC et la profession auraient intérêt, conformément à la première proposition de la Cour des comptes, à définir une véritable stratégie. C’est à dire à définir des objectifs rationnels, motivés et chiffrés, dont la réalisation sera vérifiée tous les 5 ans. Et à définir les moyens adéquats à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs, en vérifiant leur efficacité. Le politique soutien au cinéma ne peut en effet se résumer, comme la ministre de la Culture semble le penser, à disposer de toujours plus d’argent public,  alors que les rendements  de cet argent ne cessent de décroitre.

Car le moment approche où, du fait de son endettement et de son déficit public considérables, l’État Français sera contraint de remettre en cause tous nos prélèvements publics qui sont les plus élevés au monde alors que nos services publics ne cessent de se dégrader. Le cinéma, c’est-à-dire le CNC et les professionnels, devrait prendre les devants dans cette démarche en commençant à faire le ménage chez lui.

SELON JÉRÔME SEYDOUX ELLE PASSE PAR LA MONTÉE EN GAMME DE L’OFFRE

Dans le Figaro de mardi dernier, Jérôme Seydoux, le président et propriétaire de Pathé, s’est exprimé de manière très intéressante sur les causes des difficultés que rencontre le cinéma français.

Son point de vue est évidemment à prendre en compte puisqu’il est à la fois le premier exploitant de salles de cinéma de France et d’Europe et l’un des principaux producteurs et distributeurs de films.Mais aussi parce que c’est lui qui, en 1993, a mis fin a la fin de la chute de la fréquentation en France. Celle-ci, du fait  du fort développement de l’offre télévisuelle, était passée de 202 millions de spectateurs en 1982 à 116 millions de spectateurs en 1993. Il a compris que la reconquête du public passait par les multiplexes, avec leurs grands écrans, leurs salles gradinées et leurs fauteuils confortables ainsi que des parkings gratuits, puisqu’ils étaient situés dans des centres commerciaux à la périphérie des villes. Il en a ouvert deux en 1993 qui ont été de gros succès et la profession a suivi.

Jérôme Seydoux

Aujourd’hui il constate l’actuelle chute de la fréquentation en France qui est passée d’un minimum de 200 millions de spectateurs par an à, sans doute, quelques 160 millions, ce qui est très insuffisant pour l’équilibre financier des entreprises du secteur.

A ses yeux les plateformes sont la troisième irruption de la télévision dans le monde du cinéma. Elles existaient avant la Covid mais leur usage a été fortement développé par le confinement. Une nouvelle fois le cinéma doit s’adapter et cesser «d’être le Vatican du cinéma, un pays très dogmatique».

Il critique fortement notre chronologie des médias signée il y a peu. Si les français maintenaient leur position la S-Vod pourrait sortir en salle dans les autres pays et directement sur ses plateformes en France. Alors qu’à ses yeux le cinéma et les plateformes ne sont pas des adversaires car « demain la salle sera une véritable devanture pour celles-ci.

« En France, il n’y a pas assez de talents pour produire 340 films par an. Nous ferions mieux de produire moins de films mais de meilleure qualité, et le CNC devrait arrêter de saupoudrer les aides pour d’avantage les concentrer. »

En fait, pour concurrencer le petit écran à domicile, le cinéma doit, comme il l’avait fait avec les multiplexes, devenir une sortie offrant un véritable spectacle.  « C’est pourquoi Pathé va ouvrir Boulevard des Capucines, où se situera le siège de Pathé, un restaurant, un bar, des salles de coworking et sept salles de cinéma avec 1 000 places haut de gamme…. Les spectateurs veulent bien revenir chez nous. Forcément les prix augmenteront pour accompagner cette montée en gamme. »

Une initiative qui sera suivie de près par le reste de la profession en France et dans le monde.