Archive d’étiquettes pour : Baisse de la fréquentation

Le précédent éditorial s’interrogeait sur la façon de « Reconquerir le public perdu ». https://siritz.com/editorial/reconquerir-le-public-perdu-du-cinema/ . C’est un sujet essentiel parce que l’objectif de cette industrie culturelle est évidemment que ses oeuvres soient vues. En outre, l’économie de son parc de salles repose sur environ 200 millions de spectateurs par an. Une chute permanente de 30% de ses entrées risque de conduire à de nombreuses faillites et pertes d’emploi.

A ceux qui estiment que cet objectif bassement « commercial » est une menace pour la création nous renvoyons à notre Carrefour du 11 février 2021 « Un scénariste met les pieds dans les plats ». https://siritz.com/le-carrefour/un-scenariste-met-les-pieds-dans-le-plat/ Il y dit notamment : « Beaucoup de films ne sont pas faits pour être vus mais pour être financés »

La question fondamentale est de savoir s’il est possible et reconquérir le public perdu et, si c’est le cas, comment. Or, comme on l’a vu, les Américains ont réduit leur production alors qu’elle représentait 55% de nos entrées. Ils la réduisent parce que les grands studios en réservent une partie à leur plateforme. Ainsi il n’y aura pas de dessin animé Disney réservé aux familles ce Noël, puisqu’il sera diffusé par la plateforme Disney +.

Par ailleurs, et c’est aussi grave, de nombreux grands réalisateurs américains ont signé des contrats à long terme pour réaliser des séries. C’est ainsi le cas de David Fincher, le réalisateur de « Seven » ou du « Social Network ». Bien entendu c’est aussi le cas de grands réalisateurs français. A court terme du moins, il y a peu de chance que cette évolution change.

Comme on l’a vu dans le précédent éditorial, sur la quinzaine de films qui sortent chaque semaine il y a presque toujours un film français qui est un succès par rapport aux attentes de ceux qui l’ont financé et il doit sans doute en être de même de films étrangers non américains comme actuellement « EO », le film polonais de Jerzy Skomilovski.

Mais ce qui manque actuellement au cinéma français ce sont les comédies véritablement très drôles et qui sont capables de rassembler plusieurs millions de spectateurs et même 10 millions ou plus. C’est évidemment ce qu’il est le plus difficile à faire. Cela suppose de grands scénaristes, de grands dialoguistes. Et aussi de grands producteurs qui sont des aventuriers au bon sens du terme, pas uniquement des financiers.

Depuis 1950, il y a 10 films français qui ont dépassé les 10 millions de spectateurs en France. Ce sont tous, sans exception, des comédies et ils ont tous été de grands succès à l’étranger.

TOP BOX OFFICE FILMS FRANÇAIS DEPUIS 1950

Bienvenue chez les Ch’tis (2008) : 20,5 millions de spectateurs

Intouchables (2011) :19,4

Le grande vadrouille (1966) :  17,3

Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre  (2002) : 14,5

Les visiteurs (1993) : 13,7

Le Petit monde de Don Camillo (1952) : 12,8

Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ? (2014) : 12,4

Le Corniaud  (1965) : 12,8

Les Bronzés 3 (2006) : 10,3

Taxis 2 (2000) : 10,3

Pendant cette même période 17 films américains ont dépassé les 10 millions de spectateurs et, la plupart, ne sont pas des comédies.

POUR RENVERSER DES ÉVOLUTIONS INQUIÉTANTES

Un lundi et un mardi  avec un Cinéchiffres, qui fournit la fréquentation quotidienne, dans toutes les salles de Paris-Périphérie,  un peu supérieur à 40 000 entrées.  Je n’ai jamais vu ça depuis la création de cet outil en 2002. Les plus basses eaux étaient au-dessus de 60 000 entrées. Et encore, pas dans des périodes de bonne fréquentation comme novembre.

Pourtant, il y a incontestablement beaucoup de bons films à l’affiche, dans le registre du cinéma commercial comme du cinéma d’auteur.

Globalement, par rapport à 2019, la fréquentation a baissé d’environ 25%. Apparemment ce sont surtout les jeunes qui vont moins au cinéma, mais quand ils y allaient, c’était plutôt pour aller voir des films américains. Or les films américains s’en tirent mieux que les autres. https://www.lesinrocks.com/cinema/box-office-france-aline-en-tete-mais-la-frequentation-est-en-berne-424465-19-11-2021/

D’une manière générale, la fréquentation se répartie entre quelques succès et énormément de déceptions, voire d’échecs.

Parallèlement, selon Médiamétrie, en octobre l’audience de la télévision, qui avait progressé avec le confinement et la pandémie, marque une chute importante par rapport à celle d’octobre 2019. Or,  les jeunes  ont toujours  très peu regardé la télévision. https://www.lefigaro.fr/medias/la-chute-inquietante-du-temps-passe-devant-la-tele-20211116

Visiblement, ces périodes de confinement ont modifié l’approche qu’ont les français de leur temps de loisir, notamment culturel. Mais est-ce l’iphone et les plateformes qui sont la cause de ces évolutions ? Peut-être. Mais ce n’est pas certain.

Car celles-ci sont à rapprocher d’une autre évolution, qui elle est apparemment paradoxale : alors qu’il y a encore énormément de chômeurs, plusieurs secteurs ont du mal à recruter et il y aurait 300 000 emplois non pourvus. Principalement dans des secteurs mal payés et qui ne nécessitent pas une formation  poussée, comme la restauration, l’hôtellerie ou le bâtiment. https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/debat-emplois-non-pourvus-pourquoi-certains-postes-n-interessent-ils-pas-les-chomeurs-7900097792

En fait, il y a peut-être un point commun entre ces trois évolutions : pendant le confinement de nombreux français ont réfléchi à ce qu’ils voulaient faire de leur vie et comment l’organiser.

Et ils ont décidé de changer.

La société, et notamment le cinéma et l’audiovisuel, va devoir d’adapter â ce qu’ils recherchent. https://siritz.com/editorial/le-cinema-en-salle-doit-innover/