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« UN HÉROS » DE ASGHAR FARHADI

C’est le 9ème film du réalisateur iranien. https://fr.wikipedia.org/wiki/Asghar_Farhadi

Cinéfinances.info* a fourni les données financières de cet article.

Sorti en salle en France le 15 décembre 2021, il est entièrement produit par le producteur/distributeur français Alexandre Mallet-Guy (Memento Film Production) pour un budget prévisionnel de 2,5 millions €. https://fr.wikipedia.org/wiki/Un_héros_(film,_2021)

Il a été entièrement tourné au Iran.

Pour la préparation, 70 jours de tournage et la post-production la rémunération du réalisateur est de 150 000 €, dont 50 000 € d’à valoir sur droits d’auteur et 100 000 € de salaire de technicien. C’est légèrement au-dessus de la rémunération moyenne de réalisateurs de films français sortis en 2021.

Il a en outre écrit le scénario pour une rémunération de 50 000 €.

Le film a bénéficié d’une aide aux cinémas du monde du CNC. Il a été coproduit et préacheté par Arte. Memento distribution a donné un minimum garanti de 300 000 € sur la France et Memento international un minimum garanti de 1,5 millions € pour les ventes internationales.

En 3 semaines le film a rassemblé 145 000 entrées et continue sa carrière.

Le précédent film de Asghar Farhadi était également produit par Memento Film Production mais en coproduction avec l’Espagne(40%)  et l’Italie (10%). Son budget prévisionnel était de 10 millions €.

Pour la préparation, 70 jours de tournage et la post-production la rémunération du réalisateur est de 500 000 €, répartie en part égale entre à valoir sur droits d’auteur et salaire de technicien. Le réalisateur avait en outre reçu 562 000 € pour le scénario.

Le film coproduit par France 3, était préacheté par Canal+, Multithématiques et France 3.

En France il avait rassemblé 830 000 spectateurs.

LE DISTRIBUTEUR MEMENTO VA SE MAINTENIR À UN FILM PAR MOIS

Siritz.com Comment avez-vous débuté comme distributeur ?

Alexandre Mallet-Guy : En fait j’ai démarré par la production. J’ai fait mes études à l’ESSEC et, dans ce cadre, j’ai fait un apprentissage à BNP Paribas dans le financement de médias. Mon ambition était de travailler dans le cinéma. Je m’occupais du ciné-club de TELECOM PARIS, l’école d’ingénieur que j’ai faite avant l’ESSEC. Après l’ESSEC j’ai intégré la Pan-Européenne Production qu’avait créé Philippe Godeau. J’y ai travaillé pendant 2 ans. Philippe Godeau a ensuite décidé de relancer Pan-Européenne Distribution et m’a demandé de m’en occuper. Puis je suis parti et j’ai créé ma propre société.

Siritz.com : C’était à quelle époque et quel âge aviez-vous ?

AM-G : C’était en 2003 et j’avais 29 ans.

Siritz.com : Vous aviez pu voir que la distribution est un métier très risqué. Pourquoi l’avoir choisi plutôt que la production ?

AM-G : En fait j’ai commencé par la production. Emmanuele Crialese, le réalisateur italien de « Respiro » que j’avais sorti pour la Pan-Européenne m’a proposé de produire son prochain film.     « Respiro » avait été un gros succès en France où il a fait 600 000 entrées alors qu’il avait connu un gros échec en Italie. J’ai accepté, mais le projet n’étant qu’au stade du développement, j’ai décidé, pour m’occuper pendant la longue phase d’écriture qui s’annonçait, de me lancer également dans la distribution.

Siritz.com : Et comme distributeur, comment avez-vous débuté ?

AM-G : J’ai été à Rotterdam où j’ai acheté mon premier film, en février 2003 : un premier film hongrois, sans dialogue, « Hic ». Le film a gagné le prix de la révélation européenne de l’année aux European Film Awards et a rassemblé 35 000 spectateurs. Il a ensuite été acheté par Arte France C’était donc, à notre échelle, un joli petit succès qui m’a permis de financer une partie du développement du projet italien.

Siritz.com : Est-ce que, dès le départ, vous aviez une idée du type de films que vous vouliez distribuer ?

AM-G : J’avais juste un petit pécule suite à la vente de mes actions dans Pan-Européenne Distribution, et donc des moyens très limités. J’ai ainsi été contraint de choisir des films étrangers modestes, mais toujours des films de qualité auxquels je croyais vraiment. A chaque fois des films plus importants, avec des risques plus importants. Au départ des films d’auteur pointus, puis, petit à petit, des films au potentiel commercial plus important.

Siritz.com : Quel a été votre premier gros succès ?

AM-G : « Tetro », de Francis Ford Coppola. C’était une coproduction italo- argentine , en noir et blanc, présentée en ouverture de la Quinzaines des réalisateurs en 2009. Tous les principaux distributeurs indépendants avaient passé. Et moi j’ai eu un vrai coup de cœur. Le film a fait       400 000 entrées, mon premier gros succès.

Siritz.com : Quand on regarde votre catalogue on voit que vous prenez les mandats salle, vidéo et aussi international. Cela suppose une structure relativement lourde.

AM-G : En fait, l’activité de vente internationale a été développée par mon associée de l’époque, Émilie George au sein d’une structure distincte Memento International. Émilie avait alors une participation minoritaire dans Memento Distribution et j’avais une participation minoritaire dans Memento International. Nous avons depuis cédé chacun à l’autre ces participations et sommes à présent chacun unique actionnaire de nos sociétés.

Siritz.com : Aujourd’hui vous êtes un des principaux distributeurs indépendants. Est-ce que vous pourriez caractériser le profil de votre société, c’est-à-dire des films que vous distribuez ?

AM-G : Mes choix sont toujours en fonction de coups de cœur, soit sur scénario, soit sur film fini vu en festival. J’essaye de faire une moitié de films français et une moitié de films étrangers. On a débuté avec des films étrangers, puis on a commencé à recevoir des scénarios de films français. Notre premier succès français a été « Au bout du conte », le film d’Agnès Jaoui avec Jean- Pierre Bacri. Puis, dans la foulée « Le Passé » d’Asghar Farhadi, que j’ai produit, tous deux millionnaires en entrées. A partir de là, on a commencé à recevoir beaucoup de scénarios.

2 millions d’entrées

Siritz.com : J’imagine qu’il y a des producteurs avec lesquels vous travaillez plus régulièrement.

AM-G : Oui. Il y en a 5 ou 6 qui nous envoient leurs scénarios en priorité et à qui nous faisons confiance à priori. Mais rien n’est automatique. Tout dépend du scénario. On essaie aussi, bien sûr, de suivre les auteurs avec qui nous travaillons.

Iritz.com : Le fait qu’il y a de plus en plus de films qui sortent vous oblige-t-il, pour faire remarquez les vôtres à augmenter vos frais d’édition ?

AM-G : Sur la typologie de films que nous distribuons, le travail avec la presse et les médias nous permet de limiter nos frais d’édition.

Siritz.com : Les producteurs disent que les distributeurs ont tendance à diminuer les minima garantis. Or, c’est déjà le cas des apports des chaînes de télévision.

AM-G : Malheureusement ce n’est pas notre cas, les autres partenaires financiers, notamment les chaines de télévision, ayant diminué sensiblement leurs apports ces dernières années, nous nous retrouvons souvent à devoir compenser cette baisse de financements par un apport accru de notre part.

Siritz.com : Vous produisez ou coproduisez des films. Mais est-ce que, comme certains distributeurs, vous envisagez de produire des séries ?

AM-G : Pas du tout. Je ne m’y connais pas du tout, je n’en regarde pratiquement pas moi-même. On va développer la production de films. On va ainsi produire, avec Agat Films, le nouveau film d’Antoine Raimbault, le réalisateur d’« Une Intime Conviction », que nous avions distribué avec succès.

Siritz.com : J’imagine que pour vous, distributeur, le confinement s’est bien passé, compte tenu du soutien de l’État.

AM-G : Les aides de l’État ont jusqu’à maintenant permis de très bien amortir le choc. Le vrai problème aujourd’hui est celui des minima garantis des films sur lesquels on s’est engagé il y a deux ans et qui vont sortir dans les prochains mois dans un marché convalescent qui va avoir besoin de temps pour retrouver des couleurs. On le voit. Les chiffres de la reprise sont très bas. Le mois de juin va être meurtrier, avec énormément de films français qui vont se concurrencer chaque semaine et un public qui tarde à revenir en salles.

Siritz.com : Mais, par exemple, « La bonne épouse », sorti entre les deux confinements a été un succès.

AM-G : Il a fait 650 000 entrées alors qu’on tablait sur plus d’un million d’entrées au regard du chiffre des premiers jours de pré-confinement. Nous allons à peine couvrir notre investissement.

Siritz.com : « Mandibules » a très bien démarré. Mais, du fait du beau temps, comme tous les films il a fortement chuté. Il vous reste encore beaucoup de salles ? https://siritz.com/cinescoop/la-remuneration-de-quentin-dupieux/

AM-G : Il a chuté moins que d’autres et on conserve une belle combinaison. On devrait atteindre 250 000 entrées. En période normale il en aurait fait certainement  400 000.  Difficile dans ces conditions d’amortir notre investissement sur le film. Mais le CNC nous promet des mesures de majoration du soutien financier généré. Et 80% des frais liés à notre première sortie avortée en décembre vont nous être remboursés par le CNC. Nous avons vraiment la chance en France de bénéficier d’un tel soutien de l’État, c’est vraiment quelque chose d’unique au monde.

Siritz.com : Dans les films à sortir vous en avez trois sélectionnés en compétition au Festival de Cannes : « Julie (en 12 chapitres) », « Les Olympiades « de Jacques Audiard et « Un héros » d’Asghar Farhadi.

AM-G : Et « Ouistreham », le film d’Emmanuel Carrère, avec Juliette Binoche, d’après le livre de Florence Aubenas qui fera l’ouverture de la Quinzaine des réalisateurs. Nous allons essayer de rester, malgré la crise sanitaire, sur un film par mois, un rythme qui a toujours été le nôtre depuis une dizaine d’année.

Siritz.com : Vous n’avez pas eu d’offres des plateformes pendant le confinement ?

AM-G : Si Amazon et Netflix nous ont fait une offre pour « Mandibules ». Mais Canal, qui avait pré-financé le premier passage, s’y est opposé.

Siritz.com : Vous ne craignez pas un trop plein de films à la rentrée ?

AM-G : Si. Bien entendu. Le problème va être de tenir les films à l’affiche.