TRANSPARENCE DU CINEMA, PUISSANCE DE LA S-VOD

Les réactions d’Hollywood au choix de Warner

La décision de Warner de sortir tous ses films en 2017 aux Etats-Unis, simultanément en salle et sur sa plateforme de S-VoD, HBO Max, rappelle la spécificité du cinéma, c’est-à-dire d’un film dans une salle. En effet, l’économie du cinéma est transparente puisque les performances de chaque film sont connues dans le détail. Les investisseurs et les talents peuvent donc faire dépendre leur rémunération en partie ou en totalité de ces performances. https://siritz.com/editorial/warner-abandonne-la-fenetre-salle/

Ce n’est pas du tout le cas de la diffusion sur les plateformes de S-VoD, celles-ci se réservant toutes les informations sur les performances d’un programme. Celles -ci sont d’ailleurs composites puisqu’elles comprennent à la fois le nombre de visions, le nombre de personnes ayant vu et le nombre d’abonnés gagnés.

La preuve en a été donnée par la décision de la major de sortir « Wonder woman 84 » à la fois en salle et sur HBO Max. Les agents représentants Gal Gadot, la star du film, et son réalisateur Patty Jenkins, sans parler de Charles Roven, le producteur, ont fait remarquer que leurs revenus, assis sur les performances du film en salle allaient forcement chuter. Et ils ont menacé de ne pas s’impliquer du tout dans la promotion du film. Warner aurait été obligé de leur verser un revenu fixe complémentaire et l’on parle de 10 millions $ pour Gal Gadot.

Quand Warner, a annoncé que ses 17 films de 2021 allaient sortir de la même façon, n’ayant averti les producteurs et les agents que 90 minutes avant l’annonce à la presse, les réactions de ceux-ci ont été immédiates : quelles compensations nous proposez-vous pour le non-respect d’une clause essentielle du contrat ? Dans un premier temps Warner a répondu que sa décision était due aux circonstances exceptionnelles créées par la pandémie, qu’il y aurait tout de même des recettes salles et qu’au bout d’un mois la chronologie habituelle des médias reprendrait. Tandis que l’autre option était, comme l’ont fait d’autres studios, un report de la sortie à une date lointaine, voir inconnue.

Mais agents et producteurs ne veulent rien entendre. Le producteur de « Dune » et de « Godzilla vs King-Kong » a même rappelé que, alors que Warner n’a financé que 25% du budget de 165 millions $ de « Dune », il a mis son véto au rachat par Netflix pour 250 millions $. Quant au réalisateur et aux stars du film ils ont rappelé qu’ils avaient accepté de baisser leur salaire que dans la perspective de suites si le film était un succès en salle.

Ainsi, comme on le voit, la pandémie est une occasion pour les plateformes d’acquérir des films prévus initialement pour le cinéma. Et deux de ces plateformes appartiennent aux deux plus importantes majors. Disney a choisi, pour privilégier sa plateforme, d’abandonner purement et simplement la sortie salle. Warner met fin à la fenêtre d’exclusivité de la salle là où sa plateforme est diffusée.

Enfin rappelons que Netflix a passé un contrat d’exclusivité avec le réalisateur David Fincher. Le premier opus fourni est le film « Mank », un chef d’œuvre de réalisation mais réservé à une petite communauté de cinéphiles connaissant l’histoire de Hollywood. Néanmoins, pour moins de 30 millions $ la plate-forme a obtenu une promotion médiatique exceptionnelle. Et pour encore 4 ans le cinéma a perdu l’un de ses plus grands réalisateurs.

Pour ceux qui parlent anglais ce très intéressant article du New-York Times.