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L'édito de Serge
Serge Siritzki

NETFLIX+WARNER : MENACE OU ESPOIR ?

Par Serge Siritzky

Le rachat du groupe Warner par Netflix, pour le prix énorme de 83 milliards $, est évidemment un tournant dans l’histoire du cinéma et de l’audiovisuel mondial.
L’obstacle de la famille Ellison et de Trump ?
Ce rachat comprend le studio de cinéma, la plate-forme HBO Max, D.C. studios (Superman) et W Games (jeux vidéo). Netflix décroche ce rachat au nez et à la barbe de deux autres géants de Hollywood, Comcast-Universal et Paramount. Le récent propriétaire de Paramount est David Ellison, le fils de Larry Ellison, propriétaire d’Oracle, un des premiers groupes du monde et une très proches de Trump. Tous deux affirment qu’ils feront interdire ce rachat par les autorités anti-trust américaines qui, comme toutes les institutions jusque là indépendantes des États-Unis sont désormais à la botte du président Trump. C’est possible, mais pas certain, car, depuis qu’en novembre dernier les républicains ont perdu toutes les élections partielles (gouverneurs, parlementaires, maires) qui ont eu lieu un peu partout aux États-Unis, un vent de fronde commence à s’élever contre le président au sein des parlementaires républicains. Certes l’autorité antitrust estime qu’un groupe est en position dominante s’il contrôle 30% du marché. Or ce serait pratiquement le cas de Netflix et de HBO MAX sur le marché des plateformes. Néanmoins, le nouveau groupe  ne manquera pas d’avancer qu’il ne sera pas aussi puissant que le groupe Youtube en terme d’audience.
Par ailleurs, alors qu’Universal ou Paramount n’auraient pas eu besoin du réseau de distribution de Warner qui aurait donc disparu, Netflix s’engage à maintenir la distribution cinéma de Warner jusqu’en 2029 et donc à maintenir cet acteur essentiel de la distribution mondiale.
Abandon ou non de la distribution en salles
Mais le monde du cinéma n’oublie pas que Netflix a toujours été résolument pour la diffusion de films simultanément en salle et sur sa plate-forme, ce qui condamne la fréquentation cinématographique de ces films à être marginale. Néanmoins, en payant cet énorme prix pour acquérir une major du cinéma le groupe Netflix semble manifester son intention de se diversifier. Il devient bien plus que la première des plateformes. Or l’économie de la diffusion des films en salle repose sur l’exclusivité. Quand sa seule activité était d’exploiter une plateforme, les salles et les festivals de cinéma n’étaient que des outils de promotion de ses contenus. Mais il a déjà une fois radicalement changé de stratégie. Ainsi, il était catégoriquement contre le financement de sa plateforme par la publicité avant de s’y rallier. A-t’il racheté fort cher l’un des principaux réseau mondiaux de distribution en salle pour le passer par pertes et profits et n’en conserver que le catalogue ? Ne va-t’il pas tenter de fabriquer des blockbusters qui vont lui permettre de rentabiliser, et donc de valoriser cet outil ? Or, pour amortir ces blockbusters et ce réseau il lui faudra choisir de diffuser ces films en exclusivité dans les salles. Dans ce cas Netflix ou HBO Max auront ensuite l’exclusivité de la diffusion sur plate-forme de ces blockbusters.
Ted Sarandos, le génial propriétaire de Netflix, a inventé la première plate-forme. Mais si celle-ci s’est imposé, comme, de loin, la première d’entre elles, c’est aussi qu’il a su l’alimenter par des séries  exceptionnelles. Logiquement ne devrait-il pas tenter de faire de même dans le cinéma en salle? Le moins que l’on puisse dire c’est qu’à part Disney la créativité des studios américains s’est effondrée. Pour renverser la situation ils ont besoin d’un choc. A juste titre le rachat de Warner par Netflix fait trembler le monde cinéma. Mais peut-être le nouveau Warner va-t’il apporter aux films cinéma le renouvellement dont ils ont tant besoin en cette période de crise aigüe du secteur. Netflix + Warner : menace ou espoir ?
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