DÉTRUIRE NOS MÉDIAS PUBLICS ET PRIVÉS
Par Serge Siritzky
Dans un tribune publiée le 28 octobre par le Figaro, Éric Ciotti, député de Nice, président de l’Union des droites et allié du Rassemblement national propose toute une série de mesures pour alléger le poids de l’État. Parmi celles-ci la suppression de centaines d’organismes couteux et inutiles. C’est effectivement une piste essentielle. Mais il cite, à titre d’exemple, l’Arcom ce qui est particulièrement inquiétant. Inquiétant parce que c’est un choix qui, une nouvelle fois, illustre la méconnaissance par nos responsables politiques à la fois des mécanismes économiques et de ce que signifie la démocratie. Inquiétant parce qu’il confirme que l’objectif de notre extrême droite est de détruire nos médias, publics comme privés, parce qu’elle les considère comme systématiquement hostiles.
Rappelons que l’Arcom est un organisme chargé de réguler l’ensemble de l’audiovisuel (télévision et radio) qui utilise le parc limité des fréquences hertziennes dont dispose notre pays. Cet organisme, indépendant de l’État, attribue ces fréquences en visant à ce que nos citoyens bénéficient d’une offre aussi diversifiée que possible, fixe des règles du jeu à leurs utilisateurs et vérifie qu’ils les respectent.
Cette régulation est le principe de l’économie de marché qui repose sur la concurrence mais, par exemple, empêche les abus de position dominante. Elle est également le principe de la démocratie qui repose sur la séparation des pouvoirs, avec des règles du jeu que des organismes indépendants, comme le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État, et aussi l’Arcom, sont chargés de faire respecter, mais qu’Éric Ciotti juge inutiles.
En fait Éric Ciotti a clairement pour objectif de mettre à bas tous nos grands médias audiovisuels. En effet, comme le RN, il propose, s’il vient au pouvoir, de privatiser France télévisions et radio France. A condition qu’il trouve des acheteurs, cela permettra à l’État d’économiser des trois quarts de leurs dépenses qu’il finance avec un prélèvement sur la tva. Mais ces médias devront alors compenser ces pertes de recettes publiques par des recettes publicitaires qu’elles tenteront de prendre à Tf1, M6, RTL et tous les médias privés qui, du jour au lendemain, deviendraient déficitaires. Alors que tous les médias audiovisuels existants sont déjà confrontés au défi de la concurrence des réseaux sociaux qui eux, non seulement ne sont soumis à aucune régulation, mais dont les algorithmes sont conçus pour pousser en avant les contenus les plus populaires, parce qu’ils dénoncent les scandales et les complots, quitte â reposer sur des fake news. Partout dans le monde ces réseaux sociaux sont le ressort du succès des mouvements populistes et de la désagrégation de nos démocraties.
En fait, non seulement l’Arcom ne doit pas être supprimé, mais son mission devrait impérativement être étendue à la régulation de tous les médias numériques. Or, c’est loin d’être un enjeu pour nos nos responsables politiques.