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L'édito de Serge
Serge Siritzki

CONGRES DE LA FNCF : INQUIÉTUDES ET OPTIMISME

Par Serge Siritzky

Le Congrès de la Fédération Nationale des Cinémas qui vient de se tenir à Deauville était particulièrement intéressant. I https://www.lefilmfrancais.com/cinema/158466/congres-fncf-2022-richard-patry-nous-devons-nous-adapter-aux-nouvelles-pratiques-des-spectateurs-dont-les-habitudes-changent

Il a notamment permis de mettre l’accent sur une problème qui n’avait jamais été abordé par le passé et qui fait peser de graves menaces sur l’avenir des salles de cinéma et donc du cinéma en France : les salles de cinéma sont de gros consommateurs d’énergie, qu’elles soient vides ou pleines, et leurs factures vont exploser cet hiver. Tant la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, que le président du CNC , Dominique Boutonnat, ont promis que l’État va mettre en place une compensation mais ils ont dû reconnaitre qu’à ce jour celle-ci n’existait pas.

La menace par Walt Disney de ne pas sortir en salle à l’automne son blockbuster « Black Panther, Wanda forever », parce que la chronologie des médias situe sa fenêtre pour une diffusion sur sa plate-forme Disney à 17 mois et que cette diffusion doit cesser quand elle démarre sur une chaîne en claire, fait évidemment très peur aux exploitants. Car le précédent film de la franchise avait rassemblé 3,7 millions de spectateurs. Les pouvoirs publics ont prévu une réunion le 4 octobre avec toutes les parties prenantes de cette chronologie des médias. Mais  cette chronologie des médias  est fixée par des accords interprofessionnels. C’est évidemment une règle absurde s’agissant d’une production Disney qui n’est nullement pré-financée par les chaînes françaises. Et, même pour un film français, alors que la fenêtre de Canal+ ou d’Orange est à 6 mois,  il est absurde de porter celle d’une plate-forme  à 15 ou 17 mois. Elle est le résultat d’un chantage de Canal+ sur les producteurs français, la FNCF ayant laissé faire.

La principale préoccupation de l’ensemble de la profession est la baisse de la fréquentation qui est globalement de 28%. Certes la situation est encore pire dans d’autres grands pays : -60% en Italie, -40% en Espagne, -32% aux États-Unis. Ce qui est frappant c’est que la baisse dans nos petites salles, notamment les salles art et essai, est de 10%  inférieure à celle de nos grandes salles. Certains estiment que c’est dû aux prix élevés pour les spectateurs occasionnels des grandes salles. Mais cette interprétation est très contestée car les grandes salles offrent beaucoup de tarifs réduits pour différentes catégories de population.

En tout cas les distributeurs indépendants sont évidemment très touchés par cette chute de la fréquentation. Le CNC a prévu pour eux un nouveau bonus/minimum garanti de 3 millions €.

Tous les exploitants ont rappelé, comme Christine Désandré, du Loft de Chatellerault, que le cinéma est un marché d’offre et que ce qui compte c’est la qualité des films pas leur nombre. Il y a trop de « films tièdes ». Christophe Courtois, qui dirige la distribution de SND, a précisé : « Il faut faire des films spectaculaires ou qui relient à son époque ». Il rappelle que la production cinéma est un métier à risque dans lequel les gros succès compensent les pertes dues aux échecs et permettent de dégager un bénéfice. Et « le succès crée du lien social », ce qui explique l’importance du cinéma dans notre société. Il indique que seuls 15% des Français sont au courant des films qui sortent. Il est donc important de renforcer la promotion des films de cinéma.

Olivier Snanoudj, le vice-président de Warner France estime que, pour que le cinéma devienne une sortie pérenne il faut que les films soient des évènements. Selon lui le système français de soutien à la production « pousse les producteurs à produire vite », ce qui explique que souvent les scénarios sont insuffisamment travaillés, ce qui n’est pas le cas des séries. https://siritz.com/editorial/revoir-lecosysteme-de-notre-cinema

Éric Marty qui dirige Comscore France a montré que la baisse de la production de films par les studios américains avait commencé bien avant le Covid. Ils pensaient donc que, pour tenir tête aux plates-formes il fallait moins de films, mais des films événements.

Il faut dire que la Journée des distributeurs de jeudi, où les principaux distributeurs présentaient leur line up à venir, poussait à l’optimisme. A partir du premier trimestre de l’année prochaine il semble qu’il y a beaucoup de films, français, américains et étrangers très porteurs.

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