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Siritz.com : Vendredi nous avons interviewer Max Azoulay qui dirige l’ESRA. Vous dirigez ESRA animation. Quelle est la principale différence entre l’enseignement de l’animation et du film ?

Xavier de Broucker : La principale différence c’est que dans l’animation on n’a pas de rushes. Donc, on est obligé de savoir dès le départ ce qu’on veut raconter. Et de ne produire que ce dont on n’a besoin, parce que l’animation c’est très long et couteux à fabriquer.

Siritz.com : Donc il y a peu de montage.

XDB : Très peu. C’est marginal. Alors qu’en prise de vue réelle c’est en grande partie là que s’exprime le film. En animation c’est bien avant, c’est au moment du story board et de l’animatique.

Siritz.com : Quelles sont exactement les étapes ?

XDB : On commence par écrire le scénario. Puis le story-board le fait passer d’objet littéraire à objet visuel. À cette occasion le scénario est souvent remanié. Puis on en fait un animatique, sous forme de dessin animé très sommaire, dessiné en noir et blanc, mais avec le bon timing. Avec les voix des comédiens, la musique témoin et surtout, la bonne durée. C’est le squelette du film. C’est ce qu’on a mis en place à l’école depuis trois ans. Cela permet de beaucoup mieux structurer le temps des élèves et celui des professeurs. Dès le mois de décembre/janvier on sait à quoi va ressembler le film en terme de narration, de caméra, de design.

Siritz.com : Et pour passer au vrai dessin animé ?

De l’animatique à l’animation 3D

XDB : A partir de l’animatique les élèves vont réaliser l’animation réelle en 3D, qui va progressivement remplacer l’animatique, séquence après séquence.

Siritz.com : Pour réaliser l’animatique il faut savoir bien dessiner.

XDB : Bien entendu. C’est pourquoi on a rajouté au cursus beaucoup de cours d’anatomie, de modèle vivant, de perspective. On a rajouté des cours de Digital Painting, qui se font sur tablette numérique. Ceci permet aux étudiants d’apprendre à créer des matte paintings, des extensions de décors 3D, des cyclos etc…
On demande désormais aux étudiants de réaliser des « color scripts », qui sont des recherches préparatoires sur les ambiances de leur film.

Siritz.com : Donc vos élèves réalisateurs apprennent à la fois à raconter une histoire et à dessiner.

XDB : Oui. Il faut les deux.

Siritz.com : Comment se répartissent les trois ans de formation ?

XDB : La première année ce sont les fondamentaux. Il y a beaucoup de dessin. Ils apprennent à utiliser les logiciels, à commencer par Maya. Mais aussi les logiciels de 2D comme Photoshop, Aftereffects, etc. .. En fin d’année, je demande à chaque élève de réaliser un film très court de 30 secondes, de façon à ce qu’à l’issue de la première année chaque élève maitrise toute la chaîne de création.

Siritz.com : Et en 2ème année ?

XDB : On approfondit les connaissances techniques. Toujours du dessin, quelques logiciels supplémentaires. Notamment un logiciel de modélisation qui s’appelle Zbrush. Ils ont d’ailleurs des cours de modelage sur glaise, pour affiner leurs gestes et renforcer leur vision du volume. Et on leur demande d’écrire un scénario sur une thématique précise et imposée pour travailler en profondeur la narration, les mouvements de caméra, le rythme. Là, ils commencent à travailler en collaboration, à deux ou trois. Au final ils seront amenés à travailler tous en équipe. Un film d’animation se fait avec beaucoup de collaborateurs, souvent répartis internationalement.

Apprendre le travail d’équipe

Siritz.com : Et la troisième année ?

XDB : On leur demande de réaliser un film plus ambitieux de 3 minutes 30, en équipe de 5 ou 6 participants. La fabrication s’étale sur toute l’année. Chacun commence par écrire un scénario. On fait ensuite une sélection avec les élèves et les professeurs afin d’élire les quatre scénarios qui vont être lancés en production. Les équipes se constituent autour des scénarios sélectionnés.
Parallèlement, ils vont continuer à suivre des cours d’animation 3D. Et aussi des cours professionnalisant, notamment sur le statut d’auteur ou d’intermittent du spectacle.

Siritz.com : Qui sont les enseignants ?

XDB : Il en a de deux sortes. Les enseignants liés à l’école, en CDI. Ce sont plutôt des professeurs de technique 3D, comme le logiciel Maya, ou bien de scénario ou d’analyse filmique. Et des enseignants qui travaillent dans les studios d’animation, qui viennent pour des interventions spécifiques sous forme de workshop. Ils viennent parfois pour une ou plusieurs semaines, c’est le cas pour les enseignants de story-board/animatique.

Siritz.com : L’animation est un secteur qui marche très bien en France. Il ne doit pas y avoir de chômage.

XDB : Oui. Il y a beaucoup d’activité. Mais il y a également beaucoup d’écoles et donc beaucoup d’étudiants qui en sortent. Je dis à mes étudiants qu’il faut avoir un bon niveau parce qu’il y a de la compétition.

Siritz.com : Vous faites de la formation permanente ? Parce que dans ce secteur les techniques doivent constamment évoluer.

Vers l’animation en temps réel comme le jeu vidéo

XDB : Oui. Par exemple, comme je travaille aussi beaucoup à l’extérieur je vois au fil du temps quelles nouvelles compétences sont nécessaires. J’ai demandé à un enseignant qui est en CDI chez nous de dispenser un enseignement sur un logiciel qui s’appelle Unreal, qui permet de faire du rendu en temps réel. Le rendu correspond au temps de calcul des images et c’est l’une des grandes contraintes de l’animation 3D. Petit à petit on est en train de basculer vers ces moteurs de jeux vidéo qui permettent de gagner un temps phénoménal mais fonctionnent différemment de ce qu’on connait. On est en train de se former dessus et, dès cette année, on va l’enseigner aux étudiants. https://fr.wikipedia.org/wiki/Unreal_Engine