IL FAUT DÉVELOPPER DES STUDIOS PERFORMANTS MAIS AUSSI LA FORMATION AU TOURNAGE EN STUDIO
En 2018 les réalisateurs et techniciens de films français avaient dû se mobiliser pour que les pouvoirs publics interviennent afin d’empêcher la disparition des studios de tournage de Bry-sur-Marne. Film France avait alors commandé une étude sur l’enjeu que représentait la survie des studios français pour nos productions cinématographiques et audiovisuelles. Le CNC avait participé au financement de cette étude, mais sans lui marquer un véritable intérêt. https://www.cnc.fr/professionnels/etudes-et-rapports/rapport/les-studios-de-tournage-un-enjeu-primordial-pour-la-production-en-france_990068
UN RETARD ACCABLANT
Or les conclusions de celles-ci étaient sans équivoques :
-l’équipement de l’hexagone en studios était totalement sous développé par rapport au Royaume-Uni et à l’Allemagne, mais aussi à l’Italie et à la Tchécoslovaquie, et, bientôt, à l’Espagne. Nous avons moins de studios, ils ont beaucoup moins de plateaux et aucun grand plateau. Nos studios ont très peu des compléments indispensables à leur activité (back lots, prestataires, etc…).
-chez nous le studio de tournage était une activité déficitaire, alors qu’ailleurs c’était une activité très rentable : « vous leur donner le Sahara et deux ans après ils importent du sable. »
-ce sous-développement allait progressivement devenir un véritable handicap pour la production française et internationale sur notre territoire. En effet, le tournage en décor réel dans les villes va devenir de plus en plus difficile et coûteux. Par ailleurs, pour répondre à la formidable demande de séries de fiction, les tournages en décors récurrents en studio vont être un moyen indispensable pour maitriser les coûts. Enfin les effets spéciaux, qui seront de plus en plus utilisés, ont besoin d’un tournage en studio.
En tout cas, deux ans après la publication de l’étude, les studios de tournage français tournent désormais à plein. Mais ils sont toujours très insuffisants.
LES CAUSES DE CE RETARD
Cette situation avait deux causes majeurs. Tout d’abord le fait que la plupart de nos studios ne possèdent plus leur foncier. Comme ils sont dans ou à la périphérie des grandes villes arrive un moment où soit leur marge est insuffisante pour couvrir leur loyer, soit une opération immobilière y est beaucoup plus rentable. Au contraire, les grands studios européens, et notamment ceux du Royaume-Uni possèdent leur foncier qui constitue un actif dont la valeur ne cesse d’augmenter.
La seconde raison de ce retard tient au fait que la formation de nos réalisateurs, de nos directeurs de production, de nos producteurs, mais aussi de nos scénaristes repose sur une sorte d’« idéologie de la nouvelle vague » selon laquelle la qualité suppose le tournage en décors réel. C’était effectivement le crédo de ces jeunes réalisateurs qui, au début de leur carrière n’avaient pas les moyens de tourner en studio. C’est aujourd’hui un dogme renforcé par le fait que, encore très peu de nos professionnels savent tourner en studio. Seul la Femis inclut une formation du tournage en studio de ses réalisateurs.
DEUX PROPOSITIONS
Cette constatation conduit à deux conclusions. En premier lieu, les villes et les régions doivent mettre en œuvre les outils pour le développement de studios véritablement performants, car le tournage de films et de fictions audiovisuelles sera une importante source de création d’emplois dans les années à venir. Le CNC est moins concerné car c’est essentiellement une administration de distribution de subventions. https://siritz.com/editorial/choc-de-modernisation-pour-les-studios/
En second lieu, il faut développement massivement la formation initiale et permanente de tournage en studio. Y compris pour les scénaristes qui doivent tenir compte de cet enjeu quand ils écrivent leur scénario.
pour information, il faut savoir que, en 2017, les grands studios britanniques avaient calculé que, compte tenu des projets effectifs de production dans le monde, la demande de tournages en studio représentait le double des capacités mondiales. https://siritz.com/editorial/la-multiplication-de-loffre-est-irreversible/