Serge Siritzky : La crise de la pandémie a dû poser de sérieux problèmes à votre enseignement.
Nathalie Coste-Cerdan : Nous avons mis toute notre énergie à maintenir la continuité des enseignements. Notamment pour tout ce qui relève de la fabrication de courts métrages (environ 200 par an) qui sont au coeur de la pédagogie à l’école. Cela a supposé une organisation très rigoureuse, le recrutement de référents COVID sur les tournages à l’instar de ce qui se pratiquait dans le secteur, la mise en place de geste barrières et des dispositifs de maintenance spécifique requise pour tous les outils de tournage.
Il était important pour l’école de maintenir le cap et de faire de ces exercices, une priorité pour tous.
En revanche, la crise a entraîné plusieurs effets indésirables : au niveau des échanges avec l’étranger d’abord. La Fémis est en effet engagée dans des échanges d’étudiants avec une douzaine écoles dans le monde, pour chacun des départements (par exemple, les étudiants image avec la HFF à Munich, les étudiants scénaristes à l’université Colombia à New York… et nous accueillons en retour les étudiants de ces établissements pendant quelques semaines).
Au pic de la crise pandémique, ces échanges ont été dans leur grande majorité interrompus.
Nous avons également dû suspendre l’ensemble des manifestations, colloques, master-class et accueil d’associations professionnelles qui rythment la vie de l’école et qui font de la Fémis une composante essentielle du cinéma français et un lieu de production d’idées et de débats.
Donc, l’ouverture de la Fémis sur l’extérieur a été en berne pendant ces longs mois et, il est vrai, que cela a été ressenti à la fois par l’équipe pédagogique mais aussi par les étudiants.
SS: Est-ce que vous avez tout de même trouvé des solutions à ces impossibilités ?
L’occasion de développer des applications digitales dans certains domaines
N C-C : Oui. Nous avons largement recouru aux sessions de visio-conférence et autres cours à distance avec nos partenaires français ou internationaux qui, dans de nombreux cas, ont permis des échanges pertinents. Cette situation a d’ailleurs permis de bien équiper la plupart de nos salles de dispositifs qui nous permettent à présent de compléter ou enrichir certains enseignements en présentiel par des interventions à distance, notamment avec et depuis l’étranger.
Par ailleurs, la crise pandémique a été l’occasion de développer des applications digitales dans certains domaines : par exemple, nous avons lancé une application permettant à un aspirant scénariste de faire ses premiers pas dans l’écriture d’une série : comment choisir l’arène ? concevoir ses personnages ? élaborer l’intrigue… ? Cet outil développé avec LAFAAC et financé par le CNC, permet aujourd’hui de compléter les enseignements en présentiel, par une introduction à ces questions.
Enfin, la pandémie qui a affecté la fréquentation nous a amenés à nous interroger sur le contenu de la pédagogie elle-même : par exemple, dans le département de l’exploitation-distribution, cela a été une opportunité de mettre l’accent sur les pistes de sortie de crise et de retour des publics vers la salle (comment optimiser l’utilisation des réseaux sociaux ? Comment améliorer la médiation et l’animation des salles indépendantes) .
Record de candidats depuis deux ans
SS : Justement, est-ce que cette crise du cinéma a eu un impact sur le nombre de candidats dans la mesure où on peut se dire que l’avenir de ces secteurs et de ces métiers est incertain.
N C-C : Au contraire. Les concours de la Fémis n’ont jamais enregistré autant de candidats. Le nombre de candidats a atteint 1 700-1 800 personnes pendant ces 2 années, alors que le niveau moyen se situait à 1 500 depuis une dizaine d’années.En fait, cela est à mettre en relation avec les grandes tendances du secteur qui continuent de faire du cinéma et de l’audiovisuel des secteurs attractifs pour les jeunes : si la fréquentation en salles a enregistré un recul assez net ces 2 dernières années, le niveau de production cinématographique n’a pas été affecté. Bénéficiant des soutiens publics, la production de films s’est maintenue à des niveaux élevés au regard des autres cinématographies mondiales. D’autre part, l’expansion de la fabrication des séries, résultant de l’entrée sur le marché des plateformes, ouvre des perspectives d’emplois dans le secteur de la production.
Autant de raisons pour expliquer la forte progression du nombre de candidats aux concours.
Comment faire revenir un certain public en salle
SS : Mais la filière exploitation-distribution ?
N C-C : Toutes les associations professionnelles et les syndicats de distributeurs comme d’exploitants se sont mobilisés pour faire en sorte que le nombre de candidats à cette formation, qui est la seule à délivrer pour ces métiers un diplôme homologué au grade de master, se maintienne comme avant la crise.
En fait, sur ces filières, nous insistons beaucoup auprès des candidats de la nécessité de réinventer ces métiers, de repenser la relation au public, de s’interroger sur comment faire revenir un certain public en salle, sur des salles indépendantes par exemple, comment mieux utiliser les réseaux sociaux. Tout ça est au cœur du programme et des mémoires que les étudiants rédigent pendant 6 mois au terme de leur deuxième année. En fait, ces enjeux attirent des vocations parmi les jeunes qui sont extrêmement engagés pour réinventer la salle de demain.
SS : Peut-on dire que la FEMIS a des promotions de 40 élèves qui font 4 ans d’études ? A moins que, à l’intérieur de ces 40 élèves, il y ait des recrutements et des durées d’études différentes en fonction des spécialisations.
Plusieurs cursus de formation initiale
N C-C : Tout d’abord, il faut rappeler que la FEMIS concentre plusieurs catégories de mission : tout à la fois, des missions de formation initiale et de formation professionnelle pour les adultes.
Pour ce qui est de la formation initiale, le cursus dit « principal » forme à 8 métiers : la réalisation, le scénario, le montage, l’image, le son, le décor, la production et les scriptes. Le niveau de recrutement est à Bac + 2. La durée du cursus est de 4 ans – sauf les scriptes pour lesquelles il n’est que de trois ans. Chaque année, une promotion regroupe un quarantaine d’étudiants.
Les autres programmes qui complètent le dispositif de formation initiale sont plus courts : 2 ans pour l’exploitation-distribution (8 étudiants), un an pour l’écriture et la création de séries (6 étudiants), 2 ans pour le programme de formation à la réalisation de la Résidence, ouvert à des passionnés de cinéma sans pré-requis de diplôme (4 étudiants). Un an pour l’atelier international Ludwigsburg-Paris qui forme à la co-production internationale (18 étudiants par an).
Enfin, la Fémis propose également un doctorat de recherche et création qui se déroule sur 3 ans, développé au sein de Paris Sciences Lettres (PSL) avec les autres écoles d’art parisiennes (Conservatoire national d’art dramatique(CNSAD), Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMDP), Ecole des arts décoratifs (ENSAD), Ecole des Beaux-Arts (), Ecole Nationale Supérieure (ENS)). La Fémis recrute un étudiant par an dans ce doctorat qui poursuit une recherche articulant pratique et théorie, à travers une ou plusieurs œuvres cinématographiques.
Une vingtaine de stages/formation continue
SS : Et la formation continue ?
N C-C : Elle repose sur une vingtaine de stages/formation qui sont proposés autour de 5 principaux piliers que sont le scénario, le documentaire, la série, l’exploitation cinéma et la production. Nous accueillons environ 200 stagiaires par an, mais là, pas forcément sur des années entières. La durée des cursus varie de 35 heures pour les plus courtes à 380 heures pour la formation à la direction d’exploitation ou l’Atelier Scénario.
SS : Comment décidez-vous de lancer une formation permanente ?
N-C-C : Nous identifions des segments, des métiers en tension que nous relaient des acteurs présents sur le terrain. Nous validons par des études exploratoires, confortées par nos échanges avec l’AFDAS, qui est l’OPCO (l’opérateur de compétences des entreprises de proximité) des domaines concernés.
Donc, au total, pour les formations initiales et continues, ce sont donc environ 400 personnes qui, chaque année, suivent des formations de la Fémis, pour les métiers artistiques, techniques et économiques du cinéma et de l’audiovisuel.
SS : Est-ce que, lors de leur recrutement, les 40 élèves de la promotion du cursus général, savent quelle spécialité ils vont suivre ?
Le concours d’entrée
N C-C : Oui, pour le cursus général, comme pour les autres cursus, ils choisissent leur spécialité parmi les métiers cités précédemment. Ils ont la possibilité de candidater jusqu’à 27 ans et peuvent se présenter 3 fois. Leur cursus est organisé effectivement autour de vœux qu’ils expriment au moment de leur candidature. L’âge moyen d’entrée à l’école est de 23 ans.
SS : Ils ont les mêmes épreuves au concours ?
N C-C : Non. Il y a des épreuves communes au premier tour (dossier d’enquête) et au dernier (grand oral). Mais le second tour est différent selon les départements et les métiers auxquels ils préparent : les épreuves ne sont pas mêmes car les pré-requis sont différents pour les ingénieurs du son, les chefs opérateurs ou les scénaristes.
SS : Les formations sont très différentes ?
N C-C : La première année, les étudiants suivent l’équivalent d’un tronc commun dans lequel ils vont mieux comprendre le rôle de chaque métier au sein de la création cinématographique ou audiovisuelle, ce qui est bien sûr pour la plupart, un peu flou au départ.
SS : Est-ce qu’ils peuvent changer de spécialité s’ils se rendent compte au cours de cette première année que leur vocation est différente de celle qu’ils envisageaient ?
N C-C : Non. Il y a des prédispositions et des apprentissages propres à chaque métier. Par exemple, pour écrire des histoires, le rapport à l’écriture est évidemment décisif, ce qui n’est pas forcément le cas du décor, où la place du dessin est centrale, ou de l’image, marqué par les influences de l’architecture, de la peinture ou de la photographie. Dans la mesure où nous recrutons les étudiants avec une certaine maturité, nous pensons qu’ils ont déjà réfléchi à la place qu’ils souhaitent occuper dans la création cinématographique.
Mais l’un des enjeux de la réforme à venir est de pouvoir autoriser, moyennant une argumentation solide, un changement de filière. Il apparaît que certains étudiants peuvent découvrir une affinité pour un autre métier, différent de celui attendu au départ. L’organisation de la pédagogie étant centrée sur des projets de films où chacun est amené à exercer le métier qu’il a choisi, cette possibilité de changer ne sera toutefois ouverte que pour quelque cas par promotion et moyennant une argumentation très documentée.
L’origine des élèves
SS : Au concours d’entrée, il y a des écrits et des oraux. A l’oral qu’est-ce qui distingue par exemple quelqu’un qui veut être réalisateur et quelqu’un qui veut être ingénieur du son ? Est-ce qu’il y a quelque chose de précis ?
N C-C : Oui. C’est très différent. Comme je l’ai dit, le concours se déroule sur 6 mois. Les épreuves se déroulent en 3 tours. La première est une épreuve dite de « dossier d’enquête » : 3 mots (abstraits ou concrets, mais toujours polysémiques) sont proposés aux candidats. Ils en choisissent un et procèdent à une enquête personnelle sur ce concept pendant un mois et demi. Ce dossier d’enquête leur donne déjà l’opportunité de préciser leur rapport intime avec le cinéma et de déployer une sensibilité particulière, en fonction aussi du département cible choisi, par exemple à l’environnement sonore ou à la photo, en complétant l’analyse écrite par des enregistrements sonores, des vidéos, des photos. Ensuite, les épreuves de 2ème tour sont spécialisées par département. Par exemple, le concours réalisation comporte un tournage de scène avec un acteur tandis que les scénaristes disposent de 6h pour écrire un traitement autour d’un concept.
SS : Bac+2 ou 3 au recrutement, plus 4 ans d’études cela peut faire bac +7. C’est vraiment une formation de haut niveau. J’ai noté dans votre rapport d’activité qu’il y a de plus en plus d’étudiants qui viennent des écoles d’art. Comment explique-t-on cette tendance ?
N C-C : Nous cherchons à détecter, pour chaque métier, des candidats ayant une sensibilité, un regard et un point de vue artistiques. La forte progression des écoles d’art parmi les candidats est un mouvement que nous avons mesuré lors du dernier concours.
Mais l’enjeu est de rester très ouvert, de pouvoir mélanger des profils extrêmement variés à l’intérieur de chaque département. Par exemple, en décor, on a effectivement des gens qui viennent d’écoles spécialisées type Boule ou Etienne, mais aussi des formations d’architecture ou encore de l’Université (cinéma ou autres). Pour le son, les candidats proviennent plutôt du BTS, mais certains ont fait de la musique, viennent également de l’université ou se sont engagés dans des études de musicologie.
Un accélérateur de parcours
A noter qu’un niveau « Bac + 5 » est exigé pour l’écriture de série, qui reste très exigeante, puisque les étudiants qui intègrent l’école, doivent être capables en une seule année de participer à l’écriture d’épisodes de séries existantes dans des ateliers d’écriture de producteur, mais aussi de développer leur projets personnel, sous la forme d’un pilote. Notre formation s’adresse ainsi à des profils qui ont aussi déjà une expérience d’écriture : elle a été conçue comme un accélérateur de parcours.
Parmi les actions menées au cours des années récentes, nous avons aussi essayé de favoriser la filière dite « professionnelle ». Plutôt que de devoir afficher un niveau bac +2 ou 3, les candidats doivent justifier d’une activité professionnelle sur 2 ans, l’âge limite étant de 30 ans. L’idée c’est d’aller chercher des gens qui ont une expérience de vie qui n’est pas forcément l’expérience académique traditionnelle. 10% de candidats sur les 1800 sont issus de cette filière.
Nous avons le 3 décembre organisé une journée Portes Ouvertes de l’école à travers lesquelles nous essayons de faire découvrir toute la richesse de cursus et faire en sorte que les candidats comprennent ce qu’est vraiment cette école. Nous avons accueilli 1500 personnes malgré le froid et la grève des transports.
90% de nos élèves ont un emploi au bout de 9 mois
SS : Il semble que les diplômés de votre école ne connaissent pas le chômage.
N C-C : Ils sortent en moyenne à 27 ans. Nos enquêtes d’insertion montrent que, pas moins de 9 mois après leur sortie de l’école 90% d’entre eux ont un emploi en tant qu’intermittents, auteurs, ou en tant que CDD ou CDI.
A signaler toutefois des écarts liés à la nature des métiers, puisque les techniciens vont faire plusieurs films par an, alors que les réalisateurs n’en réaliseront selon toute vraisemblance qu’ un tous les 5 ans. Mais nous nous réjouissons toutefois du fait que plusieurs jeunes réalisateurs diplômés en 2017/2018 ou 2019, ont déjà réalisé (ou sont sur le point de le faire) et sorti leur film en salles.
Pour l’ensemble des étudiants, le passage à l’école est la promesse de rencontre avec de nombreux professionnels au cours du cursus et de liens puissants avec les élèves de leur promotion.
SS : Est-ce que dans les candidats en provenance d’écoles d’art il y en a qui viennent d’écoles de comédiens. Parce que l’on voit de plus en plus de comédiens devenir eux-mêmes réalisateurs.
N C-C : Effectivement. Il y a un certain nombre d’acteurs qui deviennent eux-mêmes de très bons directeurs d’acteurs et s’engagent dans la voie de la Réalisation. Au sein de La Résidence par exemple, qui est ce cursus de deux ans, ouvert à des profils de passionnés de cinéma ayant réalisé des courts métrages, dont je parlais tout à l’heure, on a effectivement plusieurs jeunes étudiants comédiens, dont certains en particulier sont passés par le « Jamel Comedy club » ou bien par des écoles de théâtre. On note donc effectivement une appétence particulière des comédiens pour la réalisation.
La pédagogie du projet
SS : Un des principes de la formation c’est qu’au cours de celle-ci les élèves réalisent des courts métrages, chacun dans sa spécialité.
N C-C : C’est bien, comme je l’ai déjà évoqué, le cœur de l’enseignement, dans ce qu’il est convenu de qualifier de « pédagogie de projet ». Ça vaut aussi bien pour la formation initiale que pour la formation continue. Les compétences sont acquises à travers des exercices concrets concernant tous les stades de la fabrication, depuis l’écriture jusqu’à sa finalisation et sa projection à l’écran. Mais l’école n’est pas juste un studio de production ou une société de de fabrication. Elle aspire aussi à favoriser la réflexion, à chaque stade et pour chaque métier, et à ménager les allers-retours entre gestes de cinéma et pratique. En clair, nos cours ne sont pas les mêmes qu’à l’université, car chez nous la pratique irrigue la pensée. C’est ce qui fait la très grande valeur de notre apprentissage. Et puis, l’école favorise les affinités cinématographiques et les renforcent pendant le parcours de 4 ans. Ce seront des collaborateurs dans les films à venir et cela dessine les « bandes de cinéma » qui sont la marque de fabrique de la Fémis et qui se suivent de film en film.
SS : Dans votre formation de producteur, vous formez à la production déléguée, c’est-à-dire au montage des financements et au choix des principaux collaborateurs ou à la direction de production, qui met en place et contrôle la fabrication du film ?
N C-C : Le métier de producteur recouvrant de nombreuses aspects (production déléguée, production exécutive, direction de production). Ces différents volets sont enseignés à travers de nombreuses rencontres avec des professionnels. Le montage financier ne fait toutefois pas partie de la pratique, car il risquerait de déstabiliser l’économie du court métrage. Ce n’est pas notre vocation.
En revanche, nous donnons beaucoup d’importance à l’accompagnement des auteurs, du développement de l’écriture. Ça nous est spécifique, ça nous distingue de l’enseignement d’HEC ou de Sciences Pô. Nous préparons les producteurs à écouter la petite musique, l’envie de création d’un auteur ou d’un réalisateur, mais aussi lui faire entendre un certain nombre d’éléments concrets sur la pertinence et la faisabilité du projet, le lien avec le public. Pour nous c’est au fondement du rôle du producteur. Ici encore, il y a des duos producteur/réalisateur qui se forment à l’école et qui vont se suivre tout au long de leur carrière.
Les partenariats avec les autre grandes écoles
SS : La FEMIS a des partenariats avec de grandes écoles françaises et étrangères.
N C-C : Ces partenariats ont dans les cursus de formation initiale, un rôle important et très apprécié par les élèves. Nous avons développé des relations avec une dizaine d’écoles assez prestigieuses au niveau mondial sur des projets pédagogiques. Par exemple, les élèves en scénario se rendent pendant quatre semaines à l’université Columbia à New-York durant lesquelles ils continuent d’explorer un projet de série amorcé pendant 2 mois en France. La bas, des professeurs vont les éclairer sur les techniques d’écriture nord-américaines. Ce double regard nous semble très intéressant.
Précisons que nous sommes aussi en partenariat avec les autres écoles d’art françaises sur beaucoup d’exercices, notamment pour les comédiens, que l’école ne forme pas. Ainsi, avec le Conservatoire d’Art Dramatique, le CFA d’Asnières, ou la Comédie française permettent de diversifier les profils.
Par ailleurs, l’appel à projets France 2030, dans lequel nous déployons un projet autour du décor et de l’écriture de séries, nous a donné l’opportunité de nous rapprocher d’écoles comme les Gobelins ou de consolider nos liens avec l’Ecole Louis Lumière. L’enjeu est de ne pas nécessairement assurer tout faire tout seul, mais de considérer que nous avons, notamment sur le volet nouvelles technologies, sur les enjeux de dessin, de passage de la 2D à la 3D beaucoup à apprendre de ces autres écoles. Et puis, nous avons développé également des partenariats avec les industries techniques, pour garantir la mise à disposition des outils utilisés sur le marché (caméras, logiciels de post-production ou d’effets spéciaux). Ce qui évidemment n’est pas toujours dans nos moyens, surtout que ces technologies évoluent de plus en plus vite que nous cherchons à introduire graduellement dans la pédagogie et mettre à disposition de nos étudiants..
Pour ce qui est des séries, nous avons imaginé une nouvelle formation, car c’est un secteur en plein développement et il y a une très forte demande de scénaristes.
SS : Mais, aux États-Unis, le showrunner d’une série est la fois le principal scénariste de l’équipe de scénaristes et celui qui réalise le ou les premiers épisodes, pour créer des modèles que d’autres réalisateurs devront suivre. Formez-vous ses scénaristes qui ont cette double compétence ?
N C-C : La question de l’écriture c’était vraiment l’objectif principal de cette formation, créée il y a près de 10 ans, qui soit une sorte d’accélérateur pour permettre à la fiction française de rejoindre les standards internationaux. On peut dire que tous ceux qui ont contribué à créer et animer ce département ont atteint les objectifs assignés à la formation. La plupart des étudiants qui ont suivi ce cursus ont trouvé tout de suite du travail. Sur les quatre-vingts qui ont suivi la formation, il y en a même 10 qui ont réussi à produire leur série pour chaque diffuseur comme pour des plates-formes. Par ailleurs, les étudiants formés dans le cursus général à l’image et au son sont régulièrement sollicités pour travailler sur des séries.
SS : L’enseignement est fondé principalement sur la réalisation de courts-métrages. Mais, pour un scénariste, un court-métrage c’est un autre type d’oeuvre que le long métrage.
N C-C : Tous les scénaristes écrivent un long métrage par an, avec plusieurs versions et comités de validation. Donc, à la sortie de l’école, un élève scénariste en a écrit 4.
SS : On voit de plus en plus d’élèves de la FEMIS dans les génériques.
N C-C Au générique de 70% des films produit en France chaque année figure un ancien étudiant ou plus de la FEMIS : ce chiffre illustre la porosité entre le cinéma français et notre école. Pour les films sortis tout récemment, depuis le mois de Septembre, qui ont défendu les couleurs d’un cinéma d’auteur français ambitieux qui rencontré un certain succès en salles. Citons notammentEmmanuel Mouret, réalisateur de « Chronique d’une liaison passagère », Alice Winocour réalisatrice de « Revoir Paris », Rebecca Zlotowski « Les enfants des autres », Léa Mysius « Les Cinq diables ».
Mentionnons également de jeunes diplômés sortis depuis moins de 5 ans qui illustrent la vitalité de la jeune création, et accompagné d’ une certaine reconnaissance critique : Lola Quivoron pour « Rodéo » Florent Gouelou pour ‘Trois nuits par semaine » ou Lucas Delangle avec « Jacky Caillou ». Tous ces jeunes gens et jeunes filles issus de cette école, perpétuent une conception d’un cinéma à la fois exigeante, soucieux de réinventer des formes et qui a envie de raconter des histoires. Qui a aussi de l’ambition de porter à l’écran ce pourquoi les gens vont au cinéma, à savoir un spectacle total, ambitieux dans la mise en scène et dans la fabrication.