Archive d’étiquettes pour : IA générative

L’Intelligence Artificielle est désormais au cœur des prėoccupations de tous les professionnels du cinéma et de l’audiovisuel, comme elle l’est de l’ensemble de la société. Sera-t’elle une révolution technologique comme l’ont été la création des ordinateurs ou la généralisation du numérique ou est-elle d’une autre nature puisque conduisant à la suppression d’une grande partie des emplois, remplacés par des robots.

Il se trouve qu’un livre répond à cette question essentielle. Son auteur, Luc Julia est un français. Il a travaillé chez Apple, est l’un des inventeurs de l’application Siri et, installé à Pablo Alto, dirige actuellement le département recherche de Renault. Le titre de l’ouvrage est parlant : « IA génératives, pas créatives ». Avec  comme sous-titre :    « l’intelligence artificielle n’existe toujours pas. » Et il le démontre, avec des exemples très précis et très faciles à comprendre. Bien entendu l’IA va bouleverser nos métiers comme l’ordinateur a bouleverser celui des comptables. Mais il n’a pas supprimé le métier de comptable : il a augmenté son utilité et il y a multiplié les emplois.

En fait ce qui prête à confusion c’est le choix du mot Intelligence pour qualifier cette technologie. Il y a une soixantaine d’années l’État américain avait créé internet pour que ses armées puissent partager leurs données. Puis il a décidé de faire accéder ses grandes universités à cette technologie pour qu’elles puissent partager le fruit de leurs recherches.  Elles ont alors imaginé ce qu’allait devenir internet quand le monde entier y aurait accès. Et elles ont imaginé le type d’outils qui pourraient être créés pour exploiter les milliards de données d’internet. Elles leurs ont donné un nom : Artificial Intelligence. Mais Intelligence dans l’un de ses sens anglais : renseignements, données. Comme dans Central Intelligence Agency. Pas intelligence dans le sens français : faculté de connaître, de comprendre ; qualité de l’esprit qui comprend et s’adapte facilement.

Pour traiter d’innombrables données dans le but d’obtenir un résultat l’IA utilise le calcul de probabilité. Or, par hypothèse, le calcul de probabilité suppose une marge d’erreur. Or, plus on rajoute de données, et plus elles sont variées, plus il y a de chances que les résultats soient biaisés. En traitant des données multiples Chat GPT, lancé par Open IA, a créé l’IA Générative. Mais quand on l »utilise régulièrement on voit qu’il est capable de commettre d’énormes erreurs. Surtout, l’IA ne peut en aucun cas innover puisqu’elle ne peut que reproduire des données existantes.

Cela étant dit, le livre de Julia décrit les énormes défis et enjeux (économiques, juridiques, environnementaux et éthiques) de l’IA et que l’on commence seulement à entrevoir. Et, après l’avoir lu, il est clair que chacun d’entre nous va devoir savoir maitriser l’IA comme il doit savoir lire, écrire et compter.

 

L’animation est en crise. Partout dans le monde, et notamment en France, sa production a chuté. Pire encore, lors d’un forum organisé par Bloomberg a Singapour, en 2023, Jeffrey Katzenberg, l’un des principaux producteurs américains de blockbusters (il a dirigé Disney et a créé le studio Dreamworks avec Steven Spielberg et David Greffen) a prédit que c’est le secteur de l’audiovisuel qui va le plus être touché par l’IA https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeffrey_Katzenberg. Selon lui, 90% des emplois dans l’animation vont disparaitre. Doit-on donc s’attendre à la quasi disparition de l’animation ?

Au contraire.

La crise de l’animation était prévue mais son ampleur a surpris

Pour ce qui est de la crise du secteur, Marc du Pontavice, le PDG de Xilam, l’un des principaux producteurs français d’animation et qui est côté en bourse, a expliqué pourquoi son chiffre d’affaires a chuté de 41% en 2024. En fait,  les plateformes de streaming, en particulier, ont mis en place un virage radical dans leur stratégie. Pendant plusieurs années, l’objectif était de conquérir le marché avec des dépenses colossales pour produire et acheter des programmes, et donc séduire de nouveaux abonnés. Mais elles ont opéré ensuite un revirement stratégique : le marché étant saturé, le but est désormais la rentabilité, et donc la réduction des coûts. Les programmes d’animation pour la jeunesse en ont fait les frais.

Marc du Pontavice

Pour le syndicat des producteurs AnimFrance ce virage était anticipé. Son ampleur et sa brutalité ont en revanche très clairement surpris une grande partie de l’industrie de l’animation, qui a pris la crise de plein fouet. Néanmoins il faut noter que  le résultat de  Xilam est resté positif du fait de son important catalogue et de son département prestation.

Les coûts de l’animation vont baisser et son marché croître

Mais alors, l’activité du secteur va-t-elle subsister à un niveau très inférieur à ces dernières années ?  C’est là que l’analyse de Katzenberg est on ne peut plus optimiste. Selon lui, là où, il y a 10 ans, pour produire un des blockbusters américains de l’animation il fallait 500 salariés travaillant 5 ans, grâce à l’IA générative il n’en faudra plus que 50 travaillant 3 ans. Toutes les taches répétitives et d’exécution seront supprimées. Donc le coût des films et des séries d’animation va considérablement baisser. Donc le volume de ces productions va sensiblement augmenter puisque, l’animation, qui reste un programme très attractif, sera moins cher, dont plus rentable.

Jeffrey Katzenberg

Mais si 90% des emplois sont condamnés à disparaitre, ce sera tout de même une catastrophe.  Or ce ne sera pas le cas. Tout d’abord parce que seuls les Américains produisent des films d’animation qui nécessitent le travail de 500 techniciens. Et, en second lieu, même aux États-Unis, les différents métiers de l’animation ne vont pas disparaitre. Ils vont fortement évoluer et devront savoir utiliser l’IA générative pour être encore plus créatifs et travailler plus vite. Ils devront maitriser le « prompting », c’est à dire l’art de demander à l’IA ce qu’ils veulent créer. En fait, aux États-Unis, comme partout ailleurs, ce  seront toujours des professionnels de l’animation qui écriront les scénarios, inventeront les personnages (leur squelette, leur visage, la façon dont ils s’habillent et se meuvent, le décor, leur voix), les bruits, la musique, etc…  Mais, partout, comme à Hollywood, ils iront plus vite, ce qui réduira les coûts de production et augmentera la rentabilité de l’animation. En revanche ces auteurs et techniciens créatifs pourraient se passer des apprentis pour exécuter certaines tâches d’exécution. D’où un défi pour la formation. Mais l’IA générative est une chance pour l’animation ?

Un nouveau marché pour l’animation

Par ailleurs internet, avec You tube et les réseaux sociaux, vient d’ouvrir un gigantesque marché pour la création audiovisuelle. L’animation devrait en être l’un des principaux bénéficiaires. Car ces diffuseurs ont besoin d’un nombre incommensurable de programmes d’animation courts et bon marché. Pour l’instant c’est déjà un marché pour les catalogues. Mais, avec un petit chiffre d’affaires compte tenu des tarifs publicitaires . Mais les productions originales pourraient avoir des recettes décuplées.

Ainsi, rappelons-nous les années 50. Les télévisions américaines avaient besoin d’un énorme volume de programmes d’animation pour leurs grilles du matin à destination des enfants. Mais pour lesquelles elles n’avaient que de tous petits budgets, parce que, pour les annonceurs, les enfants n’avaient pas du tout la valeur des spectateurs du prime time.

Et, en visant ce marché, Hanna Barbera est devenu le principal producteur d’animation au monde. Le studio y est parvenu en  produisant de l’animation rudimentaire, coupant en deux le nombre d’images par seconde, en réutilisant les dessins d’une scène dans d’autres scènes, réduisant par 7 le nombre de nouveaux dessins par série.  Mais cette réduction des coûts n’a pas empêché Hanna Barbera de produire des séries originales qui ont marqué l’histoire de l’animation :  The Flinstones,  Scooby-Doo, The Smurfs, etc…