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Une des caractéristiques du cinéma en France est la priorité qu’il donne à la diversité des films proposés au public. C’est un objectif essentiel qui repose sur l’idée que la Culture ne peut se limiter à sa dimension économique. Le bon fonctionnement de l’Économie repose en effet sur la juste concurrence des entreprises, les plus performantes éliminant les moins performantes et, ce, au profit des consommateurs.

Au contraire, la Culture repose sur la possibilité offerte aux citoyens d’accéder à l’offre culturelle la plus diversifiée possible, ce qui les enrichit C’est notamment sur ce principe que fonctionnent nos salles de cinéma art et essai. C’est ce même principe que la France a fait reconnaitre par l’Union Européenne et qui lui a permis de mettre en place tout son écosystème de soutien à son cinéma et son audiovisuel.

Dans ce cadre s’est imposé la notion de cinéma d’auteur, chaque oeuvre exprimant le point de vue particulier de son auteur, tant par son contenu et que par sa réalisation.

Sans se soucier de savoir si cela peut intéresser un public

Mais, petit à petit, et à mesure que les moyens affectés au cinéma ont augmenté, la notion d’auteur a souvent été détournée de sa raison d’être. Pour certains professionnels du secteur, chaque « auteur » doit avoir les moyens d’exprimer ce qu’il a envi, comme il en a envi et sans se soucier de savoir si cela peut intéresser un public. Ce point de vue, qui est aussi celui de critiques dont la vocation est pourtant d’éclairer le public sur la diversité de films à voir, va même jusqu’à considérer qu’un film qui dispose de gros moyens et qui attire un public important, notamment parce qu’il est très distrayant, ne peut être considéré comme l’œuvre digne d’intérêt. Ce serait par exemple le cas d’«Avatar 2». Qu’il raconte une histoire passionnante illustrant des enjeux comme la biodiversité, l’environnement ou les méfaits de la volonté de domination de l’homme et que sa mise en scène soit spectaculaire, le disqualifierait à priori.

Cet exemple ne serait que risible s’il ne reflétait la conception d’un certain nombre de films français et la tendance à l’augmentation de leur nombre.

LA FRANCE ET L’EUROPE DOIVENT DÉFENDRE LEUR MODÈLE

Le combat que même la profession cinématographique contre la programmation du «Netflix Film Club » à la cinémathèque française et à l’institut Lumière n’est pas un combat d’arrière-garde.

Tout d’abord l’AFCAE a raison de rappeler dans une lettre ouverte que ces deux institutions sont, principalement, avec un financement public, chargées « d’archiver, conserver, restaurer les oeuvres et les artistes, non de faire la promotion d’une plateforme multinationale, fut-elle mécène d’une restauration, comme le Napoleon d’Abel Gance». https://www.art-et-essai.org/actualites/1199924/netflix-film-club-lettre-ouverte-de-lafcae

Mais surtout, il ne faut cesser de rappeler que la conception qu’a Netflix du cinéma est fondamentalement opposée à celle qu’en a l’Europe, et notamment l’Union Européenne. En matière économique celle-ci est libérale. Elle vise, en créant un vaste marché unique, à tirer les bénéfices des économies d’échelles et à faire émerger les plus compétitifs. Mais, pour que ces objectifs soient atteints, il faut que les entreprises en concurrence respectent les mêmes règles du jeu, notamment certaines normes communes.

Au contraire, dans le domaine culturelle,  la France a réussi à faite adopter par l’Union Européenne une philosophie tout à fait différente : sa richesse c’est la diversité de ses cultures et chaque État est en droit d’intervenir économiquement pour maintenir l’expression de sa culture. D’où la compatibilité avec l’Union européenne de toutes nos formes de soutien à la culture cinématographique et audiovisuelle.

Or, en France, et dans beaucoup de pays européens, voir le cinéma en salle fait parti de notre culture. D’où, par exemple, la compatibilité avec les règles européennes du soutien automatique à l’exploitation et à la distribution d’oeuvres françaises ou assimilées,qui est, entre autre, un droit de douane sur les films étrangers.Cette bataille a été gagnée, de haute lutte, par la France, dans les années 80.

Netflix, comme la plupart des américains, ne partagent pas notre point de vue. Pour eux le cinéma, comme toute la culture, est un business comme un autre. Business as usual. Et un business rentable car, non seulement le marché américain est gigantesque, mais leurs plateformes, comme leurs films, visent le marché mondial. https://siritz.com/editorial/la-singularite-du-cinema/

En France, comme dans tous les pays européens qui le voudront, ces géants américains seront obligés de respecter nos règles nationales. Ils ne cesseront de vouloir les contourner, même symboliquement comme avec le Netflix Film Club. Car elles leur apparaissent comme les rites de sauvages qui ignorent les bienfaits de la civilisation, celle-ci ne pouvant être qu’américaine.