L’équilibre financier de notre industrie cinématographique repose largement sur le cinéma américain. Avant l’épidémie de Covid il générait jusqu’à 55% des entrées de nos salles de cinéma et permettait, chaque année, de dépasser les 200 millions de spectateurs, niveau indispensable pour assurer l’équilibre financier des salles.
Depuis, cet 2020 cet équilibre a été rompu parce que la production des grands studios de Hollywood s’est interrompue pendant l’épidémie, puis, de nouveau â la suite d’une grève de 6 mois des scénaristes et des comédiens. Normalement, cette production ayant repris, les indispensables blockbusters de Hollywood vont réapparaitre à partir du second semestre. C’est évidemment vital pour nos salles qui sont l’épine dorsale de notre industrie du cinéma..
Mais un article d’ Alain Le Diberder sur son site « Après la révolution numérique », analyse la crise sans précédent que traversent les grands studios américains et qui menace leur survie. Rappelons que Alain Le Diberder, qui a eu des fonctions importantes dans l’audiovisuel français, de Canal + à Arte, est aussi un des meilleurs économistes de l’audiovisuel. https://fr.wikipedia.org/wiki/Alain_Le_Diberder . En fait, : « Le vieil Hollywood : anatomie d’une chute » est le premier de 6 articles. Ils nous obligent à nous interroger sur ce qui se passerait si Hollywood n’était plus au rendez-vous. https://alain.le-diberder.com/le-vieil-hollywood-anatomie-dune-chute/
Alain Le Diberder
Dans le premier article Il fait trois constatations. Tout d’abord l’effondrement du cours de bourse des majors depuis trois ans, de -15% pour Fox Broadcasting à -84% à Warner Discovery, en passant par -43% pour Disney. Or cette évolution est totalement à contre-courant de la bourse américaine. Nous avions souligné les menaces de démantèlement qui pèsent sur Paramount. https://siritz.com/editorial/vers-une-major-historique-de-moins/ Certes, certains de ces groupes sont encore bénéficiaires et ont de la trésorerie. Mais une grande part de leur capital est détenu par des fonds d’investissement. Or, l’évolution est telle que ceux-ci risquent de se réveiller et d’exiger un grand nettoyage.
Cette évolution s’explique tout d’abord par l’effondrement des abonnements au câble outre-Atlantque. C’est grave parce qu’aux États-Unis les chaînes de télévision étaient toutes reçues par le câble et non par le hertzien. L’accès au câble est payant (en moyenne 150 $ par mois) et les réseaux payent très cher toutes les chaînes, généralistes ou thématiques. Cette importante recette est donc en train de chuter. Or la plupart des chaînes, à commencer par les 4 grandes généralistes appartiennent aux studios. Certes les foyers américains ont quitté le câble pour les opérateurs internet. Mais ceux-ci ne payent pas le même prix aux chaînes et les foyers ont abandonné l’abonnement à des chaînes au profit d’autres services.
Seconde constatation : Internet a vu la réussite d’un opérateur de S-vod, Netflix. Alain le Diberder décrit de manière édifiante l’aveuglement des majors à l’égard de ce nouveau service et leur incapacité à comprendre le numérique. Jusqu’à ce que chacun crée son propre service de S-Vod, en cumulant les erreurs, et qu’ils y perdent, en cumulé, 10 milliards $ par an. Leur diversification dans la S-vod est un véritable tonneau des danaïdes.
Enfin, troisième constatation, et qui explique la seconde, est le grand âge des dirigeants de ces groupes (75 ans en moyenne) alors que l’âge moyen des dirigeants du numérique est de 48 ans. Les dirigeants des majors sont d’une génération qui ne comprend ni les enjeux et ni les impératifs de ces nouvelles technologies. Et, en outre ils sont excessivement bien payés, même quand leurs résultats sont désastreux.
En conclusion Alain Le Diberder n’exclut pas l’entrée dans le secteur audiovisuel et cinématographique d’Apple et de Google.tv et le renforcement de celui d’Amazon. Tandis que 2025 devrait voir l’entrée en force de lIA dans la création. Les 5 articles suivants analyseront chacun des 5 grands studios survivants.
Bien entendu, au cours de leur histoire, Hollywood, comme le cinéma, leur plusieurs fois semblé à l’aube de sa disparition et, à chaque fois trouvé les chemins de leur résurrection. Mais le cinéma français ne peut se désintéresser des nouvelles menaces qui pèsent sur le cinéma américain.