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L'édito de Serge
Serge Siritzki

VERS LES 200 MILLIONS DE SPECTATEURS

Par Serge Siritzky

LES PESSIMISTES ET LES OPTIMISTES

Au début de l’année on s’interrogeait sur l’avenir de la fréquentation cinématographique en France. Certains craignaient que l’on ne retrouve jamais les 200 millions de spectateurs annuels que l’on connaissait sans interruption, depuis 2009, jusqu’à la crise du COVID. En 2019, juste avant le début de la crise et de la fermeture des salles, elle avait même atteint 213 millions de spectateurs. L’année dernière, alors que les salles avaient de nouveau été ouvertes en permanence, elle ne se situait qu’à 152 millions d’entrées.

Les pessimistes avançaient deux arguments pour estimer que l’on ne retrouverait jamais les 200 millions de spectateurs :

-Tout d’abord, avec le confinement, les Français avaient appris à se distraire sans sortir.

-En second lieu, les multiples plates-formes proposaient, à domicile, une offre de très bonne qualité et bon marché.

En outre, ils estimaient que ce raisonnement était valable dans le monde entier, à commencer par les États-Unis dont les films, avant la crise, généraient 55% des entrées françaises. Les grands studios allaient forcément réduire leur production pour financer le développement de plates-formes ainsi que de séries pour ces plates-formes. Et ils allaient diffuser certains de leurs grands films directement sur leur plate-forme, pour booster celle-ci, sans passer par la salle de cinéma. L’offre de films en  serait affaiblie.

Les optimistes, dont j’étais, estimaient que la « sortie cinéma » répondait à un besoin qu’aucune plate-forme ne pouvait remplacer. Quant à la fréquentation de l’année dernière qui, en France avait chuté de 25% par rapport aux années d’avant la crise, elle était due, avant tout, au recul du cinéma américain, résultat de l’arrêt de la production de films outre-Atlantique, pendant le confinement, alors qu’elle n’avait cessé dans l’hexagone. Mais, après la crise, cette production a repris, au même niveau qu’avant la crise. Et même, à un niveau supérieur, puisqu’il faut reprendre les projets stoppés.

UN BLOCKBUSTER DOIT SORTIR EN SALLE

Bien plus, les studios se sont rendu compte que le succès d’un blockbuster en salle procure des profits auxquels il serait fou de renoncer. Et un blockbuster, sorti en salle, réalise plus d’audience sur une plate-forme  s’il était sorti directement sur cette plateforme, sans passer par la salle. Cette sortie en salle constitue en fait une véritable rampe de lancement. Enfin, à part Netflix, qui est très bénéficiaires, jusqu’à présent, toutes les plates-formes, y compris Disney, sont des gouffres financiers. Et, à mesure que les plates-formes se multiplient, rien ne dit que cette situation ne persistera pas.

En tout cas, la production de blockbusters par les studios a repris de plus belle. Et, un premier test pour eux a été la sortie de « Avatar 2 » à la fin de l’année dernière.  Or le film a réalisé dans le monde entier des performance équivalentes au premier.

En France, la sortie des blockbusters des studios va reprendre au rythme d’avant la crise et permettre aux films américains de retrouver une part de marché d’au moins 50%, alors qu’elle n’avait été que de 40% en 2022 (61 millions d’entrées).

LE RETARD SUR L’ANNÉE RECORD DE 2019 SE RÉDUIT

Début mai en tout cas la fréquentation cumulée depuis le début de l’année était de 66,6 millions d’entrée, soir une progression de 30% par rapport à la même période de 2022. Si l’on extrapole cette progression sur l’ensemble de l’année, cela donne 197,6 millions d’entrées. Soit tout près des 200 millions d’entrées qui étaient la règle depuis 2009.

En outre, dans sa newsletter Filmsource, qui analyse chaque semaine les performances des films en France et dans le monde, Éric Marti, qui dirige FilmScore France et qui est l’un des meilleurs connaisseurs du secteur, désormais ne se contente pas de comparer la fréquentation cumulée en France de cette année avec la précédente, mais le fait avec l’année record de 2019 (213 millions de spectateurs). Or, en janvier, nous étions à -18%. Début mai nous ne sommes plus qu’à -12% après avoir été à 10%. Là encore, si l’on extrapole, cela donne plus de 190 millions de spectateurs en 2023.

La tendance est à la réduction de l’écart avec 2019

Et la semaine qui vient sort un nouvel opus de « Fast and furious », un blockbuster qui sort habituellement l’été (mais, cet été les blockbusters vont s’y bousculer) et réalise au moins un million d’entrées dès la première semaine.

Donc, il se confirme que le cinéma en France a retrouvé ses niveaux d’avant Covid. Comme il reste toujours une industrie de prototypes, le résultat final dépendra évidemment de l’offre. Mais il semble que, d’ici la fin de l’année, elle sera particulièrement forte.

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