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L'édito de Serge
Serge Siritzki

SUR LA FENÊTRE PRIORITAIRE DE LA SALLE

Par Serge Siritzky

LE CINÉMA REPREND DU POIL DE LA BÊTE

John Fithiam, le président de l’Association américaine des salles de cinéma vient de proclamer une nouvelle fois que l’avenir de Netflix passe par les salles de cinéma. C’est-à-dire que, contrairement à ce que ne cessait d’affirmer Ted Sarandos, le responsable des contenus de Netflix, la salle doit continuer à avoir la priorité dans la diffusion des films de cinéma. Au début de son existence Netflix avait proposé aux salles de sortir les films simultanément en salle et sur sa plateforme. Un peu comme si le livre de poche proposait de sortir en même temps que l’édition brochée.

Un démarrage foudroyant

Cette proposition avait semblé s’imposer pendant l’épidémie de Covid. Alors que de nombreuses salles étant fermées, des producteurs et des distributeurs avaient choisi cette solution pour amortir leur investissement. Puis, face à la résistance des exploitants un peu partout dans le monde, Netflix et les autres plateformes avaient commencé à commander directement des films aux grands talents du cinéma, pour les diffuser en exclusivité en S-Vod. Et plusieurs de ces films étaient de qualité, comme « Coda » l’Oscar du meilleur film américain ou « The power of the dog » de Jane Campion.

Les abonné de Netflix reculent

Mais maintenant que l’on sort de la crise du Covid la situation a changé. Pour la première fois les abonnés de Netflix ont cessé de progresser et ont même reculé. Et la plateforme doit faire face à la concurrence de Disney +, Apple TV, Amazon Prime, et bientôt, HBO Max. Or toutes les études montrent que le public sélectionnera la, ou éventuellement les deux plateformes auxquelles il compte s’abonner. Celles-ci ne vont donc pas pouvoir compter sur un chiffre d’affaires en constante augmentation. Au contraire. Il n’y aura peut-être pas la place pour toutes ces offres.

Les séries, les programmes pour enfants et les documentaires constituent incontestablement leur programme de base. Ils ne coutent pas 40 millions $ ou plus pour 2 heures comme les films de cinéma. Sans doute moins de 20 fois moins. En outre, comme le fait remarquer John Fithiam, la sortie en salle est l’occasion d’un puissant marketing pour un film. Pour une plateforme, pouvoir annoncer la prochaine diffusion d’un programme dont ont intensément parlé les médias quelques mois plus tôt est un atout. De ce point de vue la règlementation française est tout à fait logique et justifiée. Bien entendu, la durée de la fenêtre de priorité salle est un enjeu essentiel. La France ayant le réseau de salles le plus dense est justifiée à exiger une fenêtre plus large que dans d’autres pays.

John Fithiam a raison d’estimer que si les plateformes ont tout intérêt à se ranger à cette analyse cela risque de ne pas être le cas pour Amazone Prime.  Selon lui, le modèle économique de cette plateforme n’est pas de « gagner de l’argent avec des films » mais plutôt d’attirer le chaland pour qu’il y « fasse ses courses et passe par son service de livraison ».

L’autre logique d’Amazon

Amazon Prime vient d’ailleurs de racheter pour 8,5 milliards de dollars les studios MGM, qui produisent notamment la franchise James Bond. Si Amazon Prime veut ainsi soustraire des films aux salles de cinéma « pour ne les diffuser qu’à domicile, ils réduisent le choix des consommateurs ainsi que la concurrence », déplore John Fithian.

Les 335 000 entrées que vient de réaliser, dans 619 salles en France,  dès son premier jour, « Docteur Strange in the multiverse of madnes », confirment que, désormais les jeunes sont  de retour dans les salles, comme avant la crise pour aller voir les blockbusters américains. Or ceux-ci vont arriver rafale.

Dans un précédent éditorial je citais l’article du Figaro dans le quel Jérôme Seydoux, le PDG de Pathé, présentait sa stratégie de reconquête du public et manifestait son optimisme. https://siritz.com/editorial/operation-reconquete-du-public/

Mon éditorial « Fréquentation : raison d’être  optimiste », plus optimiste encore que lui,  me parait tout à fait justifié.https://siritz.com/editorial/frequentationsraison-detre-optimiste/?preview_id=8932&preview_nonce=e02e62ae00&post_format=standard&_thumbnail_id=4894&preview=true

 

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