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L'édito de Serge
Serge Siritzki

SUPPRIMER LA PUBLICITÉ SUR LE SERVICE PUBLIC ?

Par Serge Siritzky

Deux députés, l’un de l’opposition (Jean-Jacques Gaultier, LR) l’autre de la majorité (Quentin Bataillon, Renaissance), viennent de remettre un rapport sur le service public de la radio et de la télévision. Ils proposent, notamment , la suppression totale de la publicité et du parrainage sur ce service public, ainsi que la création d’une holding regroupant France télévisions, Radio France et l’INA. Les présidentes de France télévisions et Radio France s’opposent à ces deux idées. Qu’en penser ?

LE RÔLE IRREMPLAÇABLE DU SERVICE PUBLIC DE LA TÉLÉVISION ET DE LA RADIO

Tout d’abord remarquons que ces deux députés font partie de ceux qui reconnaissent le rôle irremplaçable de ce service public. A l’heure du populisme c’est important. N’oublions pas que Boris Johnson, lorsqu’il était Premier ministre du Royaume-Uni, envisageait de privatiser la BBC. Selon-lui, un service public financé par une taxe n’avait plus aucun sens alors que le numérique et internet offraient une surabondance de contenus audiovisuels.

Or, cette offre numérique, notamment celle des GAFA, est aussi une menace pour nos médias nationaux puisqu’elle accapare une part croissante de l’attention des citoyens et des recettes publicitaires. Elle est surtout une menace pour nos démocraties puisque la majorités de ses contenus sont anonymes et peuvent véhiculer, en toute impunité, des fake news et des messages de haine. Elles ont joué un rôle déterminant dans le Brexit, l’élection de Trump et celle de Bolsonaro. Alors que les dirigeants de nos médias sont responsables devant les tribunaux de ce qu’ils diffusent. Il est donc impératif de protéger ces médias « traditionnels ».

L’ÉTAT A L’HABITUDE DE NE PAS  SE DONNER  LES MOYENS DE SES OBJECTIFS

En France où la télévision a commencé par être publique,  à la différence des télévisions publiques britanniques et allemandes, elle était entièrement soumise au pouvoir exécutif. Elle était, comme les autres télévisions publiques en Europe, financée par la redevance. Mais, là encore, à la différence des redevances de nos voisins, la notre était insuffisante pour financer notre service public. C’est une habitude de notre État qui, sous prétexte de bien gérer son budget, est de  pas se donner  les moyens de ses objectifs. Comme une entreprise qui serait gérée par son comptable. Résultat le déficit du budget de l’État est énorme, son endettement abyssal et notre balance commerciale est structurellement déficitaire.

Ainsi, pour compléter ce manque à gagner les ressources de notre service public provenaient aussi de la publicité. Ce qui réduisait les recettes des chaînes privées quand elles sont apparues.

La redevance a été supprimée. L’État a compensé ce manque à gagner par le versement d’une fraction de la TVA. Notons que le gouvernement a dit qu’il a supprimé un impôt , ce qui est faux. Comme pour la taxe d’habitation, il l’a compensé par un apport du budget de L’État. Il est vrai que, comme celui-ci est déficitaire, en réalité, il est compensé par une augmentation de l’endettement de l’État.

Mais cette compensation n’a été votée que pour deux ans. Pour aller au-delà il faudrait que le Parlement le permette par une loi organique. Celle-ci doit être votée par les deux Assemblées ou, si le Sénat la refuse, par une majorité absolue de l’Assemblée Nationale. Il y a des chances que ce soit le cas.

Pour compenser la perte de la publicité et du parrainage (456,8 millions € en 2022) ils proposent de taxer les GAFA, ce qui serait une assiette en expansion car leurs recettes ne cessent de croître. Cela pourrait renforcer progressivement le service public si, dès la première année, la perte de recettes publicitaires était compensée. Et si l’État n’en profitait pas pour réduire la quote-part de TVA.

Un des arguments pour cette nouvelle taxe est que la publicité perdue irait sans doute majoritairement vers les GAFA plutôt que vers les chaînes privées. Mais les recettes de ces dernières n’en augmenteraient pas moins.

Ce qui est important c’est de reconnaitre le rôle essentiel du service public dans le financement de la production cinématographique et audiovisuelle. Une production qui se différencie de celle du privée et assure la diversité de l’offre. Ce service public renforce aussi le pluralisme de l’information.

Autre proposition des deux députés : la création d’une holding chapeautant France télévisions, Radio France et l’INA. En fait, sous l’apparence d’une rationalisation du fonctionnement du service public de l’audiovisuel il s’agirait de la création d’une organisation supplémentaire, donc de coûts et de sources de conflit . Alors qu’il y a des tas de problèmes non résolus auxquels il serait temps de s’attaquer.

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