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L'édito de Serge
Serge Siritzki

NOTRE CINÉMA DOIT TENIR COMPTE DE LA SÉRIE

Par Serge Siritzky

La série est aujourd’hui un art majeur et cette vérité a été reconnue au dernier Série Mania par l’accord signé entre la Guilde des scénaristes, la SACD, le SPI et l’USPA.

Il faut reconnaitre que, pendant longtemps, en France, l’ensemble de la fiction télévisuelle a été considéré comme un cinéma bas de gamme. Et, dans notre cinéma, depuis la Nouvelle vague, seul le réalisateur était considéré comme le véritable auteur. C’était le plus souvent lui qui écrivait le scénario et, parfois, ce scénario était tout ce qu’il y a de mince.

A la télévision il y avait des téléfilms et des collections de téléfilms tournant autour d’un personnage. Très rarement des séries feuilletonnantes. C’est aussi bien après ses voisins que la France c’est lancée dans le feuilleton quotidien-le soap- considéré comme le bas de gamme du bas de gamme.

Aujourd’hui tout a évidemment changé. Dans la série, l’auteur est avant tout le scénariste qui crée un univers et de multiples personnages et les fait évoluer dans des histoires qui s’enchainent. Avant même que la création du scénario soit entreprise une « Bible » présentant l’univers, les personnages et les grandes lignes de l’histoire doit être réalisée. De plus en plus souvent ces scénarios sont écrits au sein d’un Atelier d’écriture structuré (ADES), qu’un scénariste dirige et où le travail est partagé entre plusieurs scénaristes.

Enfin, la rédaction de la Bible, puis des scénarios font l’objet d’un grand nombre de réécritures et s’étendent sur des périodes qui peuvent être très longues.

L’accord signé reconnait la spécificité de la création d’une série, y codifie les méthodes de travail et les étapes, et y adapte les modes de rémunération. Les scénaristes de séries seront mieux rémunérés ce qui devrait augmenter sensiblement le nombre d’auteurs choisissant cette voie, mais aussi obliger les producteurs à avoir des fonds propres suffisant pour leurs  permettrent d’investir dans tous les étapes initiales de la création.

Cet accord aura certainement des effets importants sur la création cinématographique en France puisque de nombreux auteurs, pour qui seul le film de cinéma était le graal, vont se rendre compte que la série l’est tout autant, sinon plus. Il est d’ailleurs possible d’exceller dans les deux genres comme le prouve Marco Bellochio, l’un des grands réalisateurs du cinéma italien, avec « Esterno notte » une mini-série qui est un véritable chef d’oeuvre, tant par son scénario que sa réalisation. Il est clair que les professionnels du cinéma bénéficient d’une possibilité de diversification dont bénéficient peu d’industries.

Le cinéma français doit évidemment tenir compte de cette évolution. Les studios américains jouent la carte des blockbusters qui présente un spectacle avec lequel la télévision, même avec des écrans larges, ne peut rivaliser. Jérôme Seydoux, la président de Pathé, est un peu sur la même longueur d’onde avec ses films à gros budgets. Il y a sans doute d’autres pistes. Après tout « Intouchables » a   attiré 20 millions de spectateurs en salle. C’était un film aà budget moyen et Omar Sy était un acteur inconnu.

En revanche, la multiplication des films, qui est à l’heure actuelle la priorité de la politique du cinéma de l’État, n’est certainement pas la bonne voie, d’autant plus que les séries ont un énorme appétit, loin d’être satisfait, de talents et de capitaux.

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