Partager l'article

L'édito de Serge
Serge Siritzki

PLATEFORMES : LE LOUP DANS LA BERGERIE

Par Serge Siritzky

LA MINE D’OR EST DEVENU UN BOULET

Le secteur de l’audiovisuel va devoir revoir entièrement son approche des plates-formes de streaming. Il y a peu, c’était un nouvel eldorado qui allait élargir considérablement son activité. Les plates-formes elles-mêmes semblaient devoir être des mines d’or pour les studios américains.

Or, à ce jour, seule la plate-forme de l’inventeur de ce nouveau service, Netflix, est bénéficiaire. Toutes les autres plateformes des studios sont largement déficitaires.

Le moins que l’on puisse dire c’est que le procès intenté par certains actionnaires à l’ancien PDG du groupe Disney, Bob Chapek, et au groupe lui-même, pour avoir triché sur le nombre des abonnés de sa plate-forme de streaming, Disney +, interpelle. Non seulement les pertes de celle-ci seraient bien supérieures à ce qui était annoncé, mais, pour deux trimestres successifs, ses abonnés auraient chuté, passant de 163 à 158 millions. Or, Disney, par son image auprès des familles et ses capacités de production était, de tous les studios, celui dont la plate-forme semblait la plus à même de rattraper Netflix. En tout cas, les abonnés de ce dernier continuent de progresser, atteignant les 230 millions. De ce fait, l’ensemble du groupe Disney, malgré ses succès dans la production et la distribution, affiche une perte de 659 millions $.

Qu’en sera-t-il alors des plates-formes de Warner, Paramount et Universal ? Si cette diversification se révèle une illusion pour elles qu’en sera-t-il de leur activité de production et de distribution ?

AMAZON, APPLE ET PEUT-ÊTRE GOOGLE ET MICROSOFT

Rappelons qu’en 1948, le décret Paramount avait interdit aux studios d’investir dans les salles de cinéma. Elles s’en sont finalement très bien porté. Or, adoptant la thèse néolibérale selon lequel moins le marché est régulé, mieux il se porte, le  ministère de la justice américain a annoncé qu’il va supprimer cette interdiction.

Mais ce néolibéralisme, qui a sans doute permis aux GAFA américains de devenir les géants de l’économie mondiale, a peut-être introduit le loup dans la bergerie. Ainsi Amazon et Apple ont également leurs plates-formes de S-Vod et vont investir massivement dans la production. Ces groupes ont de bonnes chances de s’imposer, non parce qu’ils sont les meilleurs, mais parce que ces investissements sont une goutte d’eau pour eux et qu’ils ont les moyens de procéder au dumping le plus extrême. Pour Amazon c’est un moyen de promouvoir Amazon Prime qui est la devanture de son gigantesque magasin. Apple a  peut-être une idée de ce type derrière la tête. Et on ne peut exclure que, demain, peut-être Google et Microsoft, pour qui se serait également une goutte d’eau, ne les rejoignent.

Cela permet en tout cas d’être optimiste quand aux perspectives de création, de production et d’emploi. Mais plus forcément avec les mêmes acteurs.

© Copyright - Blog Siritz