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L'édito de Serge
Serge Siritzki

LA CULTURE FACTEUR D’INTÉGRATION SOCIALE

Par Serge Siritzky

LE CiNEY18 VA EN ÊTRE UNE SPECTACULAIRE DÉMONSTRATION PERMANENTE

Les entreprises et tous les professionnels du secteur culturel ne doivent cesser de faire savoir que l’exception culturelle se justifie parce que la culture est un facteur essentiel d’intégration sociale. Or, ces entreprises et ces professionnels vont prochainement disposer d’un outil pour le démontrer de manière spectaculaire à ceux qui en doutent. Ils ont tout intérêt à observer sa mise en œuvre et à le soutenir.

UN ARRONDISSEMENT TRÈS SOUS DÉVELOPPÉ EN CINÉMAS

Le CiNey se situera porte de Clignancourt, au nord du XVIII-ème arrondissement de Paris. Pour comprendre l’enjeu sachez qu’avec 192 000 habitants cet arrondissement n’a que deux établissements cinématographiques et 13 cinémas, situés à son extrémité sud. Avec 10 fois plus d’habitants l’ensemble de la capitale possède 30 fois plus de cinémas.

Or, tout au nord de cet arrondissement, entre le boulevard Ney et le périphérique,  on trouve une zone de 15 000 habitants. Il existe environ 450 zones de ce type en France et ils rassemblent 3 millions d’habitants. Ces zones sont ce que l’État qualifie de « quartiers prioritaires de la ville ». Il y a ici principalement la plus vieille cité HBM (habitations à mon marché) de Paris, occupée par des familles issues du monde entier, mais également des HLM traditionnels et deux nouveaux  îlots de logements destinés aux populations plus aisées. Les 6 000 étudiants qui vont chaque jour à l’Université de Clignancourt-Sorbonne ne s’attardent pas dans le quartier. Malgré tous les efforts il n’y a donc pas intégration de ces différentes populations.

33% DES JEUNES DE 16 À 25 ANS NE SONT « NI EN ÉTUDE NI EN EMPLOI »

Autre caractéristique du quartier que nous venons de citer : 33% des jeunes de 16 à 25 ans « ne sont ni en étude ni en emploi. » Le moins que l’on puisse dire est qu’ils n’ont aucune raison de se sentir intégrés à la société et que c’est un problème pour l’ensemble du pays.

Mais, dans ce XVIII-ème nord, il se trouve que les choses sont en train de changer. Tout d’abord parce qu’ il y a 15 ans, un groupe de cinéastes, de musiciens et de photographes, a pris conscience du problème et a estimé que la pratique culturelle était un moyen de renverser le cours des choses.

Ensemble, ils ont créé une association, LA SIERRA PROD qui, en lien avec les établissements scolaires du quartier, a amené 10 000 personnes, jeunes en scolarité et moins jeunes, à réaliser 50 clips musicaux, 40 courts-métrages (fiction, reportages, documentaires), 7 long-métrages documentaires sur le renouvellement urbain de leur quartier. Elle organise chaque année des projections, des concerts, des expo photo accueillant le plus vaste public. Donc elle permet de s’exprimer, en travaillant collectivement, et à fournir, souvent avec humour, un regard sur la société et ses problèmes.

Les jeunes créent de spectacles musicaux

Les jeunes et les moins jeunes réalisent qu’ils ont quelque chose à dire sur le monde qui les entoure, donc qu’ils en font partie. Prenant confiance en eux, ils prennent conscience que la culture est leur affaire.

Et voici qu’un beau jour le Bricorama du boulevard Ney ferme ses portes. Que vont devenir ces       1 600 m2 ? L’équipe de LA SIERRA PROD  imagine alors d’y créer un lieu très particulier qui va faire accéder le quartier au sens large à toutes les formes de pratiques culturelles. Et elle réussit à convaincre la ville de Paris, différentes  collectivités publiques et administrations, dont celles en charge des quartiers prioritaires, ainsi que le CNC de financer son projet.

Les locaux du Bricorama

UN CENTRE CULTUREL EXCEPTIONNEL

Le centre comportera deux cinémas (qui ambitionnent d’être de véritables salles Art et Essai), une salle polyvalente transformable en salle de spectacle, une salle de montage, un studio de prise de vue et d’enregistrement, un café bar, une librairie. Dans ce quartier où l’on ne trouve que des fast-food, ce sera aussi un endroit pour le mieux manger, avec un restaurant, une épicerie et une cuisine. La fondation de l’Armée du Salut, partenaire du lieu, va en prendre la gestion pour qu’il soit accessible à toutes les bourses. Et, pour lutter contre le chômage des jeunes , la Mission locale de Paris, l’autre partenaire du lieu,  va proposer aux 16/ 25 ans des parcours d’insertion liées à l’entreprenariat culturel.

Le budget total de l’équipement est de 2,2 millions € et près des trois quarts ont déjà été trouvés auprès d’organismes publics, car tous estiment qu’il s’agit sans doute d’un équipement qui sera fréquenté par tous les ceux qui vivent dans le quartier ou ses alentours comme par ceux qui le traversent. Et, donc, qui sera un puissant outil pour contribuer à résoudre certains des problèmes d’intégration de notre société. Le solde est en bonne voie.

Le projet CINEY18

Mais le CiNey a aussi pour ambition d’être un partenaire et nullement un concurrent des entreprises privées du cinéma, de l’audiovisuel et de la musique. Son but est d’être un facteur d’ascension sociale et que ses utilisateurs deviennent des citoyens qui vont au cinéma et au concert. Ainsi la programmation de ses salles sera très différente des salles commerciales traditionnelles avec qui elle souhaiterait passer des accords.

LA SIERRA PROD, qui est une association à but non lucratif est le seul actionnaire du CiNey. Elle peut bénéficier de mécénat, avec déduction d’impôt. Or, elle va en permanence pouvoir être utilisée par les entreprises du secteur culturel comme démonstration vivante de leur rôle irremplaçable dans l’intégration sociale, un des grands défis auquel est confronté notre pays.

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