BUSINESS CONTRE DIVERSITÉ CULTURELLE
Par Serge Siritzky
LA FRANCE ET L’EUROPE DOIVENT DÉFENDRE LEUR MODÈLE
Le combat que même la profession cinématographique contre la programmation du «Netflix Film Club » à la cinémathèque française et à l’institut Lumière n’est pas un combat d’arrière-garde.
Tout d’abord l’AFCAE a raison de rappeler dans une lettre ouverte que ces deux institutions sont, principalement, avec un financement public, chargées « d’archiver, conserver, restaurer les oeuvres et les artistes, non de faire la promotion d’une plateforme multinationale, fut-elle mécène d’une restauration, comme le Napoleon d’Abel Gance». https://www.art-et-essai.org/actualites/1199924/netflix-film-club-lettre-ouverte-de-lafcae
Mais surtout, il ne faut cesser de rappeler que la conception qu’a Netflix du cinéma est fondamentalement opposée à celle qu’en a l’Europe, et notamment l’Union Européenne. En matière économique celle-ci est libérale. Elle vise, en créant un vaste marché unique, à tirer les bénéfices des économies d’échelles et à faire émerger les plus compétitifs. Mais, pour que ces objectifs soient atteints, il faut que les entreprises en concurrence respectent les mêmes règles du jeu, notamment certaines normes communes.
Au contraire, dans le domaine culturelle, la France a réussi à faite adopter par l’Union Européenne une philosophie tout à fait différente : sa richesse c’est la diversité de ses cultures et chaque État est en droit d’intervenir économiquement pour maintenir l’expression de sa culture. D’où la compatibilité avec l’Union européenne de toutes nos formes de soutien à la culture cinématographique et audiovisuelle.
Or, en France, et dans beaucoup de pays européens, voir le cinéma en salle fait parti de notre culture. D’où, par exemple, la compatibilité avec les règles européennes du soutien automatique à l’exploitation et à la distribution d’oeuvres françaises ou assimilées,qui est, entre autre, un droit de douane sur les films étrangers.Cette bataille a été gagnée, de haute lutte, par la France, dans les années 80.
Netflix, comme la plupart des américains, ne partagent pas notre point de vue. Pour eux le cinéma, comme toute la culture, est un business comme un autre. Business as usual. Et un business rentable car, non seulement le marché américain est gigantesque, mais leurs plateformes, comme leurs films, visent le marché mondial. https://siritz.com/editorial/la-singularite-du-cinema/
En France, comme dans tous les pays européens qui le voudront, ces géants américains seront obligés de respecter nos règles nationales. Ils ne cesseront de vouloir les contourner, même symboliquement comme avec le Netflix Film Club. Car elles leur apparaissent comme les rites de sauvages qui ignorent les bienfaits de la civilisation, celle-ci ne pouvant être qu’américaine.