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L'édito de Serge
Serge Siritzki

LA FABRICATION DES IMAGES À L’ÈRE NUMÉRIQUE

Par Serge Siritzky

L’industrie de l’image est une industrie d’avenir et dans laquelle la France est particulièrement performante. C’est ce qu’ont rappelé les deux tables rondes organisées vendredi dernier à l’INA sur les « Modèles et enjeux des studios de tournage, de production et de post-production à l’ère du numérique ».
Il faut dire que le lieu était particulièrement approprié pour réfléchir à la fabrication des images à l’ère numérique puisqu’il s’agit sans doute d’un des tous premiers clusters de l’industrie de l’image en Europe et dans le monde. On y trouve en effet à la fois l’INA, avec son incomparable centre d’archives, de production de documentaire et de formation ainsi que les studios de tournage de Bry-sur-Marne, qui sont les principaux studios français et s’apprêtent à doubler de volume.
L’industrie de l’image c’est celle du cinéma, des télévisions, des plateformes mais aussi, désormais,  de You tube. Elle est donc en pleine croissance. La formation, tant initiale que permante est un enjeu essentiel puisque les technologies ne cessent d’évoluer. La France dispose d’un énorme réseau d’écoles et de centres de formation publics et privés. Or, plusieurs intervenants ont rappelé que nombre de ces formations ne débouchaient pas sur des emplois. Il est indispensable que l’État mette en place un mécanisme d’information sur les débouchés effectifs de chaque école ou centre de formation.
Paradoxalement il y a à la fois un nombre croissant de diplômés chômeurs alors qu’il y a des tensions sur certains emplois. Ainsi, le producteur exécutif Nicolas Royer (Voulez-vous Production services) a expliqué qu’il y avait un manque significatif d’administrateurs de production, une fonction essentielle de la production qui doit cumuler compétence et expérience.
Les VFX sont aujourd’hui l’un des piliers de la création cinématographique et audiovisuelle. Et c’est un secteur où la France est particulièrement performante, notamment grâce au regroupement des principaux acteurs au sein de France CFX et du soutien du CNC. À ce sujet, Olivier Emery, Président de Trimaran VFX et coprésident de France VFX à abordé la question de l’IA générative : est-ce une menace pour la plus grande partie des emplois de l’industrie de l’image ? Il a cité l’exemple du détourage d’image qui est un travail fastidieux puisqu’il faut le réaliser  de manière  répétitive image par image. Il existe une application IA qui permet de le réaliser très rapidement à partir d’un prompt. Les résultats sont parfaits sur un petit écran. Mais sur un grand écran « ça ne le fait pas », car l’IA repose sur la statistique : c’est juste à 80 ou 90%, mais, par nature, jamais juste à 100%. Pour le grand écran l’IA ne remplacera pas les techniciens.
Guillaume de Menthon, le président des studios de Bry, en les faisant visiter, à rappelé que des studios étaient performants pour des productions de films à partir de 6 millions € de budget ou de séries dont les épisodes dépassaient 1,3 millions € de budget. Mais un de ses plateaux possède un écran led qui permet de tourner des scènes extérieures à un prix compétitif. La démonstration était impressionnante.
Laurence Schwob, présidente de V Studios et directrice du développement du groupe France télévisions, a d’ailleurs rappelé que les studios de ce dernier à Montpellier, grâce à ces nouvelles technologies, sont très compétitifs pour fabriquer des feuilletons quotidiens à budget légers. Certes, comme plusieurs intervenants, Guillaume de Menthon a reconnu que le cinéma et l’industrie de séries traverse une période de basses eaux au niveau mondial. C’est spectaculaire pour Hollywood où les studios, du fait de leurs coûts et de celui de leurs techniciens, sont désertés : les blockbusters sont tournés à Vancouver ou au Royaume-Uni. Bien pire, la plupart des derniers blockbusters ont été des désastres financiers.
En fait le chiffre d’affaires du cinéma est en recul partout, y compris en France. Est-ce parce que, du fait de la concurrence des plateformes et de l’i-phone son temps est passé ? N’oublions pas que le cinéma est un marché d’offre. C’est une industrie de prototypes. Au cours de son histoire il a connu de nombreuses crises. À chaque fois il en est sorti par un complet renouvellement de sa création.
Enfin, rappelons que la France a un atout considérable : c’est l’existence du CNC, un organisme public particulièrement compétent qui dote le pays d’une stratégie englobant toute l’industrie de l’image de la technologie de fabrication à la salle de cinéma.
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